Chapitre 16

INTRODUCTION AUX ETATS D'HYPERSENSIBILITE

 

Selon la classification de Gell & Coombs, on distingue quatre types d'hypersensibilité (HS) :

1° l'hypersensibilité du type I (ou allergie immédiate) : elle survient chez des sujets prédisposés par un terrain, dit atopique, et est liée à la production excessive d'IgE spécifiques d'allergènes divers, le plus souvent inhalés ou ingérés. Les symptômes qui peuvent alors apparaître sont respiratoires (rhinite, toux spasmodique et asthme), oculaires (conjonctivite le plus souvent), digestifs (vômissements, douleurs abdominales, diarrhée), ou cutanés (dermatite atopique, urticaire et/ou oedème de Quincke). On estime que, dans les pays occidentaux, 15 à 20 % des individus sont atteints d'allergie immédiate. L'anaphylaxie se rapproche de l'allergie immédiate, dans la mesure où elle est également liée à des IgE. Toutefois, elle s'en distingue par le fait qu'elle peut survenir aussi bien chez des sujets atopiques que non atopiques, et que les allergènes en cause sont généralement différents de ceux de l'allergie immédiate : il s'agit essentiellement des médicaments, de certains aliments et des venins d'hyménoptères.

          2° l'hypersensibilité cytotoxique (HS du type II) : elle est liée à des anticorps (IgM, IgG) qui se fixent sur des antigènes exprimés constitutivement ou adsorbés passivement sur la membrane des cellules de l'organisme. Ces anticorps induisent la destruction des cellules en activant le système du complément et/ou par opsonisation des cellules phagocytaires-cytotoxiques (monocytes et macrophages, lymphocytes K ou tueurs).

          Les manifestations liées à ce type d'HS ne sont qu'exceptionnellement du ressort de l'allergologue : il s'agit essentiellement de cytopénies (anémies hémolytiques, thrombopénies, leucopénies), et de certaines néphrites intersticielles et tubulo-intersticielles induites par des médicaments.

          L'hypersensibilité cytotoxique intervient également dans certaines maladies auto-immunes, telles le syndrome de Goodpasture, le pemphigus et la pemphigoïde bulleuse, etc.

          3° l'hypersensibilité semi-retardée (ou HS du type III) : elle est liée à la formation et au dépôt de complexes antigène-anticorps (com-plexes immuns : CI) dans les tissus. On distingue le phénomène d'Arthus, où les CI se constituent au niveau même des tissus, et la maladie sérique, où ils se forment dans la circulation, avant de se déposer dans les tissus.

          Les principales affections allergologiques relevant d'une HS de type III sont les pneumopathies d'hypersensibilité, soit liées à l'inhalation répétée d'antigènes organiques (maladies des poumons de fermier, des éleveurs d'oiseaux et des colombophiles, etc.), soit induites par des médicaments ingérés ou injectés.

          Certaines néphropathies, vascularites et éruptions cutanées, essentiellement dûes à des médicaments, relèvent aussi d'une HS semi-retardée du type maladie sérique.

          Les CI circulants jouent aussi un rôle important dans la pathogénie des maladies auto-immunes non organospécifiques (diffuses), tel-les le lupus érythémateux disséminé (LED), l'arthrite rhumatoïde (AR), etc.

          4° l'hypersensibilité retardée (HSR ou HS du type IV) : elle résulte du recrutement et de l'activation, au niveau même des organes et des tissus-cibles, de cellules effectrices diverses (monocytes et macrophages ; lymphocytes T effecteurs et cytotoxiques ; cellules de Langerhans, dans la peau), sous l'effet de substances (cytokines) secrétées par les lymphocytes T activés par l'antigène.

          Les principales affections allergologiques relevant d'une HSR sont les eczémas de contact ou par ingestion, et certaines photodermato-ses ; d'autres affections (urticaires chroniques, "allergies" microbiennes) pourraient égale-ment relever, au moins en partie, d'une HSR.

          L'HSR joue également un rôle important dans certaines maladies auto-immunes spécifiques d'organes, dans les mécanismes de défense anti-infectieuse (défense contre les micro-organismes à développement intra-cellulaire, tels les virus, les mycobactéries, et certains parasites), et dans les processus de défense antitumorale.

Hypersensibilité de type I (allergie immédiate & anaphylaxie)

 

I - Physiopathologie de l'allergie immédiate et des réactions anaphylactiques et anaphylactoïdes

A - Introduction

1)          Définitions

 

Le terme allergie définit, d'une façon large, un ensemble de manifestations cliniques liées à une réponse anormale de l'organisme à l'introduction de substance(s) non toxique(s), faisant intervenir une réponse immunitaire excessive et/ou inadaptée spécifique de la (des) substance(s) en cause, et ne survenant que chez un nombre limité d'individus (synonyme = réaction d'hypersensibilité).

          Selon la classification de Gell & Coombs, l'allergie immédiate (HSI) caractérise l'ensemble des manifestations cliniques survenant chez des individus génétiquement prédisposés par un terrain dit atopique, ce terrain étant caractérisé par une production exagérée d'IgE, en réponse aux stimulations exercées par les antigènes de l'environnement, également appelés allergènes ; ces sujets présentent également une réactivité exagérée des organes et des tissus cibles (muqueuse nasale, bronches, peau, etc.) aux stimulations exercées par les allergènes et par les facteurs non spécifiques de l'environnement (irritants de la peau et des voies respiratoires, inhalation d'air froid et sec, exercice physique, etc.).

               2)    Génétique de l'atopie

Le caractère génétique de l'atopie a initialement été mis en évidence par les études de familles. Ainsi, les études de la transmission des parents aux enfants montrent que, pour un enfant, le risque d'être atopique est respectivement de l'ordre de 15 %, 25 à 30 %, et 50 à 60 % lorsque aucun, un seul ou les deux parents sont allergiques ; ce risque peut même atteindre 80 % lorsque les deux parents sont atteints de la même maladie allergique (rhinite et/ou asthme, notamment).

Les études des fratries nées de parent(s) atopique(s) montrent une concordance de l'ordre de 40 % entre enfants non jumeaux ou jumeaux dizygotes, de 70 à 90 % entre jumeaux monozygotes élevés ensemble, et de 45 à 65 % entre jumeaux monozygotes élevés séparément : compte-tenu du fait que la prévalence de l'atopie est comprise entre 12,5 et 20 % dans la population générale, ces résultats montrent bien l'existence de facteurs génétiques transmis des parents aux enfants. Toutefois, la différence entre les jumeaux monozygotes qui ont été élevés ensemble et ceux qui ont été élevés séparément montre aussi le rôle joué par l'environnement (exposition aux allergènes notamment) dans le développement des maladies allergiques.

          Les études génomiques et chromosomiques ont permis de mettre en évidence des associations entre allergie immédiate et certains gènes particuliers (études génomiques) ou des marqueurs retrouvés avec une fréquence anormalement élevée sur certains chromosomes des individus atopiques (études chromosomiques) ; ces marqueurs correspondent à des groupes de gènes (dits gènes candidats), codant pour des cytokines, des systèmes enzymatiques ou des récepteurs impliqués dans la physiopathologie des maladies allergiques (cf. Tableau I).

B – Les acteurs de l’HS immédiate

1)          Les anticorps (IgE)

Les travaux d'Ishizaka ont permis de montrer que l'activité du sérum des allergiques était liée à une classe d'immunoglobulines distincte des autres classes connues et de concentration sérique extrêmement faible. Cette classe d'anticorps fut isolée en 1966, et reçut le nom d'IgE (erythema-wheal reaction-inducing immunoglobulin). A la même époque, Bennich & Johansson isolaient une protéine myélomateuse qui, après étude comparative, se révéla être identique aux IgE. Il fut ensuite démontré que les IgE pouvaient se fixer sur la membrane des basophiles et des mastocytes, et que l'adjonction d'antiglobulines (anti-IgE) induisait une activation des cellules ainsi sensibilisées par des IgE, se traduisant notamment par une dégranulation et une libération d'histamine dans le surnageant.

Origine, structure et propriétés générales des IgE : les IgE sont des anticorps synthétisés et excrétés par les lymphocytes B et les plasmocytes à IgE. Comme toutes les immunoglobulines, les IgE sont constituées de l'assemblage de deux chaînes lourdes (chaînes e) et de deux chaînes légères du même type (k ou l) (Fig. 1) ; il n'existe pas de sous-classes connues pour les IgE. Les IgE ne traversent pas le placenta et n'activent pas le complément, tout du moins par la voie classique.

          On trouve des IgE dans le serum, ainsi que dans certaines sécrétions (salive, sécrétions nasales, urines, selles). Le taux des IgE sériques est presque nul à la naissance, et croît progressivement de 10 à 15 UI/ml par année d'âge (une unité internationale correspondant à 2,4 ng) pour atteindre le taux adulte (< 200 à 250 UI/ml) vers l'âge de 10-12 ans. L'origine des IgE sécrétoires est double : une certaine proportion de ces anticorps provient d'une synthèse locale par les lymphocytes B et les plasmocytes à IgE des muqueuses, le reste provenant d'une simple transsudation des IgE sériques.

          Les IgE sont capables de se fixer sur la membrane de certaines cellules, cette fixation prolongeant leur demi-vie, qui peut alors dépasser 3 à 4 semaines, et leur permettant d’exercer leurs fonctions. Plusieurs types de récepteurs ont été identifiés :

          -         des récepteurs de type I (Fce-RI, de forte affinité), qui sont exprimés sur la membrane des cellules effectrices de l'allergie immédiate (mastocytes et basophiles, mais aussi éosinophiles, monocytes et macrophages, etc.) ;

          -         des récepteurs de type II (Fce-RII, ou antigène CD23), de faible affinité et exprimés sur des cellules diverses, et notamment sur les lymphocytes T (Te) et B (Be) régulant la production des IgE. L'expression des Fce-RII est modulée par certaines cytokines (IL-4 stimulante, et IFN-g inhibiteur), ainsi que par le taux des IgE elles-mêmes ; enfin, ces récepteurs peuvent être libérés sous forme soluble (sCD23), et les interactions entre le CD23 (de membrane ou soluble) et les lymphocytes B à IgE contribuent activement à stimuler la production des IgE par ces cellules (cf. infra) ;

          -         enfin, des récepteurs de type III (e-BP ou galectine/Mac-2), également de faible affinité, exprimés sur des types cellulaires très divers, et dont les fonctions sont encore mal connues.

Régulation de la synthèse des IgE : les mécanismes régulant la synthèse des IgE ont tout d'abord été étudiés chez l'animal (souris et rat, notamment), les résultats obtenus chez ces animaux ayant permis d'orienter les études effectuées ultérieurement chez l'homme. Les travaux effectués chez l'animal ont permis de montrer que :

          -         les réponses IgE étaient particulièrement dépendantes du thymus et des lymphocytes T ;

          -         la synthèse des IgE était régulée par des mécanismes contrôlant sélectivement la production des IgE, sans modifier celle des anticorps des autres classes (notion de régulation isotypique) ;

          -         les lymphocytes contrôlant la synthèse des IgE exprimaient des récepteurs de membrane pour les IgE (lymphocytes Te et Be) et, selon leurs conditions d'activation, produisaient des facteurs stimulant (IgE-PF ou IgE synthesis-potentiating factor) ou inhibant (IgE-SF ou IgE synthesis-suppressor factor) la production des IgE.

          Chez l'homme, les principales cellules régulant la synthèse des IgE sont les lymphocytes Be (CD23+) : activées par les IgE et les complexes immuns à IgE, et surtout par certaines cytokines (interleukines 4 et 10 : cf. infra), ces cellules libèrent le fragment extracellulaire de leurs récepteurs de membrane pour les IgE sous la forme de sCD23, qui stimule la production des IgE par les lymphocytes B activés. L'expression du CD23 et sa libération sont également stimulées par des médiateurs de l'allergie, tels le PAF (platelet-activating factor) et le LTB4 (leucotriène B4). Ont également été identifiés des lymphocytes T (Te) et des monocytes sanguins exprimant des récepteurs de faible affinité pour les IgE ; il est probable que ces cellules exercent aussi des effets modulateurs sur la production des IgE, mais ceci n'a pas encore été établi avec certitude.

          D'autres mécanismes, dont les interactions avec les systèmes décrits ci-dessus commencent à bien être connues, exercent également des effets régulateurs déterminants sur la production des IgE, chez l'homme et chez les rongeurs : l'interleukine 4 (IL-4), ainsi que les IL-10 et 13, toutes trois produites par les lymphocytes T helper de type 2 (Th2), stimulent la génération et l'activation des LyTh2 eux-mêmes et des LyBe, la libération du sCD23, la différenciation des lymphocytes B en plasmocytes producteurs d'IgE et, par voie de conséquence, la production des IgE. Ces effets sont inhibés par l'IFN-g (interféron-gamma) et l'IL-2 (produits par les LyTh1), ainsi que par l'IL-12 (produite par les cellules présentatrices d'antigène et orientant les réponses immunitaires vers des réponses du type Th1). L'IFN-g inhibe également la production d'IL-4, d'IL-10 et d'IL-13 par les lymphocytes Th2, alors que les IL-4, 10 et 13 inhibent la production d'IFN-g par les lymphocytes Th1 (Fig. 2).

2)            Cellules effectrices et médiateurs

Classiquement, les principales cellules qui produisent les médiateurs de l'allergie immédiate sont les polynucléaires basophiles et les mastocytes, dont les principales caractéristiques sont indiquées dans le tableau II. Cependant, les résultats des études effectuées dans le courant de ces dernières années ont montré que d'autres cellules (polynucléaires neutrophiles et éosinophiles, monocytes et macrophages, plaquettes, cellules endothéliales, cellules des épithéliums muqueux, et lymphocytes T) jouaient également un rôle important dans la pathogénie de ces réactions.

Les mastocytes : il s'agit de cellules dont les précurseurs médullaires sont probablement communs aux cellules de la lignée monomacrophagique. Ces précurseurs peuvent également être détectés dans le sang circulant, les organes lymphoïdes centraux et périphériques, et certains organes et tissus non lymphoïdes (peau, tractus digestif, etc....). C'est au niveau de ces organes que s'effectue leur maturation en mastocytes.

          Dans l'espèce humaine, on distingue deux principaux types de mastocytes :

          -         les mastocytes T, dont les granulations contiennent essentiellement de la tryptase : ils représentent le type de mastocytes prédominant dans les muqueuses, et envi-ron un tiers des mastocytes pulmonaires. Leur nombre est significativement augmenté dans la muqueuse nasale des malades atteints de rhinite allergique et dans la paroi et les sécrétions bronchiques des asthmatiques ;

          -         les mastocytes TC, dont les granulations contiennent de la tryptase et de la chymase : ils représentent le type de mastocytes prédominant dans la peau (derme) et les sous-muqueuses, et environ les deux tiers des mastocytes pulmonaires.

          En sus des médiateurs classiques de l'inflammation et de l'allergie (histamine, prostaglandines et leucotriènes, PAF, etc.....), les mastocytes activés produisent des cytokines diverses comme l'IL-1, l'IL-3, le GM-CSF (granulocyte/macrophage colony-stimulating factor), l'IL-4, l'IL-5, et le TNF (tumor necrosis factor, pro-inflammatoire) ; la participation de ces cytokines aux réactions allergiques du type immédiat est discutée plus loin.

Les basophiles : il s'agit de cellules de la lignée granulocytaire, qui dérivent de précurseurs localisés dans la moelle osseuse. Bien qu'ils puissent se localiser dans les tissus, dans certaines circonstances pathologiques (phase de début des dermites de contact, urticaires chroniques et phase tardive des réactions allergiques du type immédiat, notamment), les basophiles sont essentiellement des cellules du sang circulant. Leurs granulations intracytoplasmiques contiennent les médiateurs préformés qui seront expulsés lors de l'activation des basophiles : histamine, ECFA (eosinophil chemotactic factor of anaphylaxis) et NCFA (neutrophil factor of anaphylaxis), notamment ; elles contiennent également une certaine quantité de MBP (major basic protein), comme celles des polynucléaires éosinophiles.

          Chez les allergiques, il existe une augmentation significative du nombre et du pourcentage des basophiles sanguins, notamment pendant les expositionx aux allergènes ; en outre les basophiles des allergiques sont particulièrement activables par les allergènes, l'anti-IgE, certaines cytokines, et les activateurs non spécifiques.

Les autres cellules effectrices de l'allergie immédiate : de nombreuses autres cellules participent à des degrés divers à la pathogénie des réactions allergiques du type immédiat. Certaines d'entre elles (un certain pourcentage des macrophages, cellules de Langerhans, polynucléaires éosinophiles, plaquettes), qui possèdent des récepteurs membranaires pour les IgE, et qui peuvent être sensibilisées in vivo par les IgE, seraient directement activées par la fixation de l'antigène sur les IgE elles-mêmes fixées sur leur membrane. Cependant, d'une façon générale, le recrutement et l'activation de ces cellules (cellules effectrices dites "secondaires") n'interviennent que dans un second temps (phase tardive de la réaction d'allergie immédiate), et résultent essen-tiellement des effets chimiotactiques et (pré)activateurs des médiateurs et cytokines libérés par les mastocytes.

          Les polynucléaires éosinophiles (PNE) sont les principales cellules effectrices secondaires de l'allergie immédiate chez l'homme : leur prolifération et leur survie sont essentiellement assurées par l'IL-5, comme le confirment les résultats d'une étude récente qui montre que, chez les souris transgéniques fortement productrices d'IL-5, il existe une importante éosinophilie sanguine et tissulaire qui, pour l'essentiel, est inhibée par les anticorps anti-IL-5. Le recrutement local des éosinophiles est favorisé par d'autres cytokines qui exercent des effets chimiotactiques (IL-3 et 6, GM-CSF), et qui stimulent l'expression de molécules d'adhésion intercellulaire sur les cellules endothéliales (IL-4).

          Les PNE contiennent de nombreuses enzymes, qui sont libérées dans le micro-environnement et le sang, après que les éosinophiles aient été activés : il s'agit notamment de la MBP (major basic protein), de l'ECP (eosinophil cationic protein), de l'EPO (eosinophil peroxydase) et de l'EDN (eosinophil-derived neuro-toxin). Toutes ces enzymes exercent, à des degrés divers, des effets cytotoxiques (lésions des épithéliums cutané et muqueux, et des cils vibratiles), pro-inflammatoires (chimiotactisme et activation des mastocytes, des basophiles, et des autres cellules effectrices), et neurotoxiques (activation des terminai-sons nerveuses parasympathiques, à l'origine du prurit et de l'hyperréactivité nasale ou bronchique).

          Les PNE activés libèrent également :

          -         des médiateurs divers : PAF, leucotriènes (LTC4 et LTD4 principalement), et prostaglandines ;

          -         des anions peroxyde (O2-) et superoxyde (H2O2), cytotoxiques pour des cellules diverses, et qui induisent une dégranulation non spécifique des mastocytes ;

          -         des neuropeptides pro-inflammatoires, histaminolibérateurs et bronchoconstricteurs (substance P notamment).

          De nombreuses observations montrent que les PNE jouent un rôle important dans la pathogénie des réactions allergiques du type immédiat (asthme et rhinites/sinusites notamment). Ainsi :

          -         leur nombre est significativement augmenté dans le sang, le chorion de la muqueuse respiratoire, et les sécrétions nasales et bronchiques des allergiques ;

-         chez les allergiques, une forte proportion des éosinophiles sont "hypodenses". Il s'agit de PNE activés, qui expriment de très nombreux récepteurs pour les IgE, des molécules d'adhésion intercellulaire, et, semble-t-il, des antigènes d'histocompatibilité de classe II ;

          -         des taux élevés des médiateurs produits par les PNE sont détectés dans le sang et dans les sécrétions respiratoires (ECP et MBP notamment) ;

          -         il existe une corrélation entre l'hyperréactivité bronchique ou nasale et les concentrations de la MBP et des PNE dans le liquide de lavage bronchoalvéolaire (LBA) ou de lavage nasal, chez les sujets atteints d'asthme ou de rhinite ;

          -         enfin, il existe une corrélation entre la production in vitro de LTC4 par les PNE et la sévérité des symptômes, ainsi que le degré d'hyperréactivité bronchique, chez les asthmatiques.

          Les cellules monomacrophagiques : divers arguments permettent fortement de suggérer qu’elles jouent un rôle important dans la physiopathologie des réactions allergiques, et notamment de l'asthme. En effet :

          -         in vivo, d'importantes quantités de macrophages sont présents à la surface de l'épithélium bronchique et dans le liquide de LBA des asthmatiques. De plus, une importante proportion des macrophages pulmonaires des asthmatiques expriment des récepteurs pour les IgE, et, ex vivo, sont activables par les stimulations IgE-dépendantes ;

          -         il existe des signes d'activation des macrophages alvéolaires chez les asthmatiques (mis en évidence par une augmentation de la chemiluminescence), dont l'intensité est significativement corrélée avec la gravité de l'asthme ;

          -         enfin, ex vivo, les macrophages libèrent des médiateurs directement ou indirectement impliqués dans les réactions allergiques, tels le PAF, le TXB2 (thromboxane B2), et le LTB4 ; ils libèrent également diverses cytokines histaminolibératrices et pro-inflammatoires (IL-1 et 6, TNF-a), la production de ces médiateurs et cytokines étant significativement plus importante chez les allergiques que chez les non aller-giques.

          Les macrophages (alvéolaires) activés produisent également un antagoniste du récepteur pour l'IL-1 (IL-1Ra : IL-1 Receptor-antagonist) et un inhibiteur du TNF (TNF-Inh), qui pourraient contribuer, dans une certaine mesure, à modérer les réactions allergiques ; toutefois, la production de ces inhibiteurs est significativement plus faible chez les allergiques que chez les témoins non allergiques.

          Les lymphocytes T jouent un rôle déterminant dans la pathogénie des réactions allergiques du type immédiat : en effet, on observe couramment un infiltrat riche en lymphocytes T (essentiellement CD4+) durant la phase tardive de ces réactions, ainsi qu'une augmentation de la proportion des lymphocytes T activés (exprimant des antigènes d'histocompatibilité de classe II et des récepteurs membranaires pour l'IL-2) dans le sang et la muqueuse bronchique des sujets atteints d'asthme sévère. Chez les asthmatiques, l'importance de l'infiltrat en lymphocytes T activés est significativement corrélée avec l'augmentation du nombre des éosinophiles dans le liquide de LBA et avec la sévérité de l'asthme. Les résultats de plusieurs études récentes ont montré que la majorité des clones de lymphocytes T CD4+ isolés du site des réactions allergiques étaient des lymphocytes Th2, et qu'une certaine proportion d'entre eux exprimaient des récepteurs de faible affinité pour les IgE (CD23+). Par ailleurs, les lymphocytes T sanguins des sujets allergiques sont hyperactivables in vitro, alors que ceux des non-atopiques le sont peu.

          Bien que persistent encore certaines incertitudes, on peut penser que les lymphocytes T participent à la phase effectrice des réactions allergiques du type immédiat en produisant divers facteurs et médiateurs :

          -         des cytokines exerçant des effets mitogéniques et/ou chimiotactiques sur les polynucléaires basophiles et les mastocytes (IL-3, GM-CSF), ainsi que sur les éosinophiles (IL-5, GM-CSF). Il existe d'ailleurs une corrélation significative entre le degré d'éosinophilie sanguine et le pourcentage des lymphocytes T activés dans le sang des sujets allergiques ;

          -         des facteurs exerçant des effets histaminolibéra-teurs non spécifiques ou potentialisant la dégranulation IgE-dépendante des basophiles et des mastocytes, comme les IL-2, 3 et 5.

          Le rôle-clé joué par les lymphocytes T dans la phase tardive de la réaction allergique du type immédiat vient d’être mis en évidence par des expériences montrant que le transfert passif de lymphocytes T spécifiques à des rats non immunisés leur transfère la capacité de développer une réponse tardive aux stimulations allergéniques, alors que la réactivité immédiate est conférée par le transfert passif de sérum riche en IgE spécifiques.     

          Les cellules épithéliales : il est maintenant clairement établi que ces cellules (notamment dans les épitheliums respiratoire et conjonctival) expriment des molécules d'adhésion intercellulaire, au cours des réactions allergiques ou des tests de provocation spécifiques, et sont capables de produire des médiateurs chimiotactiques et activateurs pour les polynucléaires éosinophiles et pour les cellules mono-macrophagiques (LTB4 et LTC4), ainsi que des substances stimulant la production du mucus bronchique ; enfin, elles produisent des cytokines diverses, telles le GM-CSF, l'IL-6 et l'IL-8. A ce titre, les cellules épithéliales pourraient bien jouer le rôle de cellules effectrices de l'allergie immédiate.

          Toutefois, les cellules épithéliales semblent également jouer physiologiquement un certain rôle protecteur, notamment en réduisant la pénétration des allergènes, en "protégeant" les terminaisons nerveuses sensorielles de l'arbre respiratoire, et en produisant un/des facteur(s) bronchorelaxant(s) dont la nature n'est pas encore clairement établie. Elles produisent également de l'enképhalinase ou NEP (neutral endopeptidase), qui inactive les neuropeptides bronchoconstricteurs. La réduction de ces propriétés protectrices, liée à l'abrasion des cellules de l'épithélium bronchique, est probablement l'un des facteurs déterminants de l'hyperréactivité bronchique dans les asthmes sévères, ainsi qu'au cours et au décours de certaines infections virales des voies respiratoires.

          D'autres cellules jouent probablement un rôle dans la pathogénie de l'asthme : il s'agit notamment des polynucléaires neutrophiles et des plaquettes, et des cellules endothéliales et des fibroblastes pulmonaires.

          Les résultats d'études diverses, dont certaines déjà anciennes, ont montré la présence d'un nombre élevé de polynucléaires neutrophiles et de plaquettes, et une importante activation de ces cellules, dans la paroi et la lumière bronchiques, chez les patients atteints d'asthme gravissime. De plus, les plaquettes des sujets allergiques libèrent in vitro des substances histaminolibératrices, encore mal identifiées, et des facteur(s) induisant une hyperréactivité bronchique.

          Les cellules endothéliales produisent des médiateurs (PAF, LTB4, etc.) et des cytokines proinflammatoires diverses, dont l'expression a été mise en évidence sur le site des réactions allergiques ; les fibroblastes bronchiques, quant à eux, produisent des cytokines et du collagène, qui pourraient être responsables de la fibrose observée dans les asthmes sévères. 

C - PHYSIOPATHOLOGIE DE L'HSI

1)          Anomalies de la synthèse des IgE

 

Comme cela a déjà été évoqué, des taux élevés d'IgE sont couramment détectés dans le sérum et les secrétions des patients atteints d'allergie immédiate, ainsi que dans le sang du cordon, chez les nouveau-nés de parents atopiques.

          Diverses anomalies susceptibles d'expliquer cette production exagérée d'IgE ont été détectées chez les atopiques, et notamment :

          -         une augmentation du nombre et de l'activité des lymphocytes B à IgE, qui est significativement corrélée avec la sévérité de la maladie ;

          -         une augmentation du nombre et de l'activité fonctionnelle des lymphocytes Te et Be, qui est plus ou moins bien corrélée avec une augmentation du taux plasmatique de l'antigène CD23 soluble et du taux des IgE sériques ;

          -         et surtout des modifications portant sur les lymphocytes Th1 et Th2 : ainsi, chez les atopiques, observe-t-on une augmentation du nombre des clones de lymphocytes Th2 et de la production des cytokines correspondantes, et une diminution relative du nombre des clones de lymphocytes Th1, et de la production d'IL-2 et, surtout, d'IFN-g.

2)          Pathogénie de la réaction allergique et de l'hyper-réactivité périphérique 

 

Les IgE, synthétisées et sécrétées suite aux contacts avec les allergènes de l'environnement, se fixent sur les récepteurs exprimés sur la membrane des cellules effectrices de l'allergie immédiate. Lors d'une nouvelle exposition à l'allergène, ce dernier se fixe sur les IgE, elles mêmes fixées sur la membrane des cellules effectrices, et induit une agrégation des récepteurs pour les IgE ; cette agrégation est responsable d'une activation de divers systèmes enzymatiques, induisant l'extrusion des granulations intracytoplasmiques et la synthèse de médiateurs ("néo-formés"). La réaction allergique, notamment dans les voies respiratoires, se déroule le plus souvent en deux temps, avec :

          -         une phase précoce, de survenue rapide (quelques minutes à quelques dizaines de minutes après le contact avec l'allergène), caractérisée essentiellement par des phénomènes vasculaires (oedème et érythème, exsudation) et par une contraction des fibres musculaires lisses (bronchospasme, dans l'asthme) ;

          -         une phase retardée (ou tardive), qui se développe progressivement dans le courant des heures suivantes, et qui est essentiellement caractérisée par une réaction inflammatoire lente à régresser.

                    Selon la conception classique, déjà un peu ancienne (Fig. 3), la phase immédiate de la réaction allergique du type immédiat résulterait de la libération rapide des médiateurs vasoactifs et constricteurs des fibres muscu-laires lisses (histamine notamment) par les mastocytes. L'activation des mastocytes conduit également, mais avec un certain retard, à la synthèse de médiateurs proinflammatoires divers (prostaglandines D2 et F2a, thromboxanes, leucotriènes, etc.), responsables d'un afflux local et d'une (pré)activation des cellules "effectrices secondaires" (éosinophiles, basophiles, macrophages, etc.), elles mêmes sensibilisées par des IgE et susceptibles d'être à leur tour activées par les allergènes, les médiateurs et facteurs proinflammatoires libérés par ces cellules étant à l'origine de la phase tardive, prolongée, de la réaction allergique. Les divers médiateurs impliqués, les cellules qui les produisent, et leurs principales activités biologiques sont indiqués dans les Tableaux III et IV.

                    La conception plus récente de la phase tardive de la réaction allergique du type immédiat (Fig. 4) tient compte du fait que la plupart des cellules effectrices présentes sur le site de la réaction allergique (lymphocytes T, mastocytes et basophiles, éosinophiles, macrophages, etc.) sont capables de produire des cytokines pro-inflammatoires diverses, essentiellement du type Th2 (IL-4 et IL-5 notamment), mais aussi non spécifiquement Th2 (IL-1 et 8, TNF, GM-CSF, RANTES, etc.). Le rôle joué par ces cytokines dans la physiopathologie de la réaction allergique du type immédiat est étayé par les résultats d'études diverses qui montrent que :

          -         des concentrations élevées de ces cytokines sont détectables sur le site de la réaction allergique et dans le sang, et corrélées avec la sévérité de la réaction allergique ;

          -         in vitro et in vivo (expérimentation animale), ces cytokines stimulent la prolifération, la différenciation, l'adhésion, le chimiotactisme et la survie des cellules effectrices, et contribuent à (pré)activer ces cellules ;

          -         les anticorps anti-cytokines et les antagonistes ou les inhibiteurs des cytokines exerçent des effets anti-allergiques in vivo, chez l'animal ;

          -         la désensibilisation spécifique (DS), enfin, induit une diminution de la production de ces cytokines, qui est corrélée avec l'amélioration clinique des malades.

          Les diverses cytokines impliquées, et leurs principales activités biologiques, sont indiquées dans le Tableau V.

3)            Conception d’ensemble

 

Dans l’état actuel des connaissances, on considère donc que le terrain atopique est un terrain génétiquement déterminé qui oriente les réponses immunitaires aux allergènes vers une réponse immunitaire du type Th2 prédominant. Les cytokines produites par les LyTh2 activés par les allergènes sont à la fois responsables d’une augmentation de la produc-tion des IgE et de la prolifération, la différenciation, le recrutement et la (pré)activation des cellules effectrices impliquées dans les réactions allergiques du type immédiat (Fig. 5).

          La dégranulation mastocytaire, qui fait suite à la fixation des allergènes sur les IgE, elles mêmes fixées sur la membrane mastocytaire, se traduit par la libération rapide de médiateurs vaso-actifs et constricteurs des fibres musculaires lisses (phase précoce), ainsi que par la libération plus lente, mais prolongée, de médiateurs et de cytokines qui concourent à recruter et à (pré)activer les autres cellules effectrices, sur le site de la réaction allergique (phase tardive). Les mastocytes tiennent donc lieu de cellules "starter", à l’origine d’une réaction inflam-matoire plus ou moins durable, qui est entretenue par la fixation des allergènes sur les IgE fixées sur la membrane des cellules ainsi recrutées et (pré)activées (éosinophiles notamment, mais aussi macrophages, plaquettes, etc.), ainsi que par les médiateurs et cytokines produits par ces cellules elles mêmes. C’est ce qui explique que, à terme, seuls les médicaments anti-inflammatoires (corticoïdes notamment) sont efficaces dans le traitement des maladies allergiques de sévérité modérée ou importante.

          A plus ou moins long terme, les médiateurs et les enzymes libérés par les cellules effectrices sont susceptibles d’induire des lésions irréversibles (destruction des cellules épithéliales, fibrose), qui rendent les traitements moins efficaces et plus aléatoires.

D – Allergènes et manifestations cliniques de l’HSI

1)          Les allergènes 

Les antigènes (ou allergènes) responsables des allergies de type immédiat sont extrêmement variés. Il s'agit presque toujours de protéines, ou bien d'haptènes qui deviennent immunogènes en se combinant avec des protéines de l'organisme.

          La classification des allergènes repose sur leur voie de pénétration dans l'organisme : ainsi distingue-t-on les aéroallergènes (qui pénètrent essentiellement par voie respiratoire, d'où leur ancienne dénomination de pneumallergènes, mais aussi parfois par voie épicutanée), les trophallergènes (qui pénètrent par voie digestive), et des allergènes divers, qui pénètrent dans l’organisme par des voies variées (médicaments et substances biologiques notamment).

Les aéroallergènes : par ordre de fréquence décroissant, les aéroallergènes les plus répandus et les plus allergisants sont les acariens de la poussière de maison ("mites" dans la terminologie anglo-saxonne) ; il s'agit d'insectes microscopiques qui se nourrissent de squames humaines et animales, et sont particulièrement abondants dans la literie et les tissus d'ameublement. Dans la population générale, la prévalence des sensibilisations aux acariens est comprise entre 10 et 20 %, les valeurs les plus élevées (jusqu'à 30-40 %) étant observées dans les régions chaudes et humides, dont le climat favorise le développement des acariens. Une importante proportion des patients atteints d'allergie respiratoire sont sensibilisés aux acariens (environ 10 % des asthmatiques de moins de 2 ans, 25 % des asthmatiques de 2-6 ans, et près de 60 % des asthmatiques âgés de 6 ans et plus). Le risque de développer une allergie aux acariens est significa-tivement augmenté chez les atopiques exposés, pendant les premières semaines ou les premiers mois de la vie, à des taux élevés d'allergènes d'acariens (≥ 2,5 à 5 mg de Der p 1/gramme de poussière), et, chez les sujets sensibilisés, le risque de déclencher des symptômes (rhinite et/ou asthme) est d'autant plus élevé que le taux d'allergènes d'acariens dans la poussière de maison est élevé.

          En fréquence, la seconde catégorie d'aéroallergènes les plus sensibilisants sont les pollens : on en distingue plusieurs types, selon leur origine (Tableau VIII). La plupart des pollens sont allergisants, sous réserve d'être assez petits et assez légers pour pouvoir être véhiculés à grande distance par le vent et pénétrer facilement dans les voies respiratoires ; la pénétration des allergènes polliniques dans les petites bronches peut être favorisée par la fragmentation des grains de pollens et la "solubilisation" de leurs allergènes par les dérivés de la combustion des hydrocarbures. Ceci pourrait expliquer que, bien que la fréquence des tests cutanés positifs aux pollens soit sensiblement la même chez les sujets vivant en milieu urbain et rural, la prévalence des symptômes liés à une allergie pollinique est significativement plus élevée en milieu urbain. La prévalence de l'allergie pollinique varie avec l'âge : elle est relativement faible chez les enfants de moins de 6-8 ans (< 6 %), puis augmente progressivement jusqu'à l'âge adulte, pour atteindre 8 à 12 %. Elle varie également selon les régions (elle est très faible dans les régions de montagne, relativement faible en bord de mer, et plus importante dans les régions de plaine et de demi-montagne).

          Les poils et squames d’animaux (chat, chien, cheval, petits rongeurs, etc.) représentent également des aéroallergènes importants ; ces allergènes, et notamment ceux du chat, des chevaux et des petits rongeurs, peuvent persister pendant de nombreux mois, voire plusieurs années, sur les sites contaminés. De plus, ils sont extrêmement dispersibles, soit par voie aérienne, soit par l'intermédiaire des vêtements des sujets en contact avec les animaux correspondants : c'est ainsi que l'on a détecté des taux importants d'allergènes de chat dans des lieux publics (écoles, hôpitaux, salles d'attente), et rapporté cette contamination à la présence, dans ces locaux, de sujets vivant en compagnie de chats.

          On peut citer encore de nombreux autres aéro-allergènes, comme des champignons (moisissures), ou certains produits chimiques responsables d’allergies respiratoires professionnelles (isocyanates, par exem-ple). Les moisissures (atmosphériques, domestiques, et professionelles) peuvent aussi induire des manifes-tations liées à une HS semi-retardée (HS du type III, par complexes immuns), telles les alvéolites allergiques extrinsèques, également appelées pneumopathies d'hypersensibilité (maladies du poumon de fermier, des éleveurs d'oiseaux, des fromagers, etc.).

Les trophallergènes : les plus sensibilisants sont les protéines d'origine animale (lait de vache, oeufs, poisson et viande). En dehors de ces protéines animales, de très nombreux trophallergènes peuvent être recen-sés : légumes avec, au premier plan, le céleri ; fruits avec surtout les fruits secs (arachide notamment) et les agrumes ; etc... (Tableau IX). Certains aliments présentent une allergénicité croisée avec d'autres aliments, généralement de la même famille ou de familles voisines, ou avec des antigènes alimentaires comme les pollens.

          Les allergies alimentaires d'apparition précoce (lait, soja, farine et oeuf, notamment) guérissent avant l'âge de 3 à 4 ans dans environ les deux tiers des cas ; toutefois, elles reflètent l'existence d'un terrain atopique, et évoluent généralement vers une allergie respiratoire et/ou une allergie à d'autres aliments au cours des années suivantes. Par contre, les allergies alimentaires d'apparition plus tardive (viandes, poissons, crustacés et coquillages, fruits et légumes) ne guérissent pratiquement jamais, et le développement à un nombre croissant d'aliments est fréquent.

          Si les aliments peuvent induire de réelles manifestations d'allergie humorale (rhinite, asthme, DA, urticaire et oedème de Quincke), certains d'entre eux sont responsables de troubles pseudo-allergiques dus à leurs pro-priétés histaminolibératrices non spécifiques (fraises et certains poissons, notamment) ou à leur richesse en histamine (poissons : thon frais en particulier).

Médicaments et substances biologiques : de très nombreux médicaments et substances biologiques (antibiotiques notamment, et tout particulièrement les bêtalactamines ; hormones hétérologues, telles l’insuline et l’ACTH ; enzymes, telle la chymopapaine ; latex des gants et des sondes ; etc.) sont capables d'induire une sensibilisation et de provoquer des réactions allergiques du type immédiat lors de leur réintroduction dans l'organisme.

2)          Manifestations cliniques de l’allergie immédiate

 

Elles sont extrêmement variées, et peuvent toucher :

          -         la peau (dermatite atopique, urticaire et/ou angio-oedème) ;

          -         les voies respiratoires supérieures (rhinite ou rhinosinusite, souvent associée à une conjonctivite ; laryngite ou trachéite, se traduisant par une toux spasmodique ; oedème de Quincke, touchant la glotte et le larynx, et pouvant être à l’origine d’une mort par asphyxie) ;

          -         les voies bronchiques (asthme) ;

          -         le tube digestif (vomissements, diarrhée ; certaines colopathies chroniques) ;

          -         le système cardiovasculaire (choc anaphylactique).

E - L’anaphylaxie

1)          Aspects historiques

 Le choc anaphylactique fut décrit pour la première fois par Richet & Portier, qui cherchaient à réaliser une accoutumance progressive à une toxine d'actinies (actinocongestine) chez le chien. L'injection intraveineuse (IV) de cette toxine à dose très faible ne provoquant aucun trouble, le protocole expérimental prévoyait une augmentation progressive des doses, dans le but d'obtenir l'accoutumance recherchée ; après une interruption fortuite de l'expérimentation, celle-ci fut reprise 3 semaines plus tard, et, contre toute attente, une dose minime de toxine induisit en quelques minutes un prurit généralisé, une dyspnée, une tachycardie avec effondrement de la pression sanguine, une hypothermie, des crises convulsives, enfin un coma d'évolution fatale en moins d'une heure. L'hypothèse d'un effet toxique fut rapidement écartée, la dose injectée étant minime, et les symptômes observés étant très différents de ceux dus à la toxicité de l'actino-congestine ; aussi, le phénomène observé reçut-il le nom d'anaphylaxie (= contraire de protection).

          Des expériences effectuées ultérieurement dans diverses espèces animales, avec des substances non toxiques (ovalbumine notamment), permirent de suggérer que les mécanismes impliqués étaient de nature immunologique :

          -         nécessité absolue d'injection(s) préparante(s), correspondant à la sensibilisation ;

          -         nécessité d'un intervalle libre entre les injections préparantes et l'injection déclenchante, correspondant au temps nécessaire à la production d'anticorps anaphylactiques et à leur fixation sur les cellules effectrices ;

          -         enfin, identité stricte (spécificité) entre la substance utilisée pour les injections préparantes et celle utilisée pour l'injection déclenchante.

2)          Physiopathologie des réactions anaphylactiques

Les preuves expérimentales du mécanisme de l'anaphylaxie furent apportées par les expériences in vivo et in vitro qui furent réalisées ultérieurement, et qui permirent de montrer que l'anaphylaxie était transférable passivement par le sérum (anticorps), qu'elle résultait, pour l'essentiel, de la dégranulation explosive et massive des mastocytes et des basophiles, et que le principal médiateur en cause était l'histamine (Fig. 6).

Rôle des IgE : il a été mis en évidence par les expériences d'anaphylaxie passive in vivo et in vitro. L’anaphylaxie passive généralisée consiste à sensibiliser un animal indemne de toute sensibilisation active, en lui injectant du sérum provenant d'animaux préalablement immunisés, et en déclenchant, chez cet animal, un choc anaphylactique, par l'injection de l'antigène correspondant (expériences de Nicolle & Richet) (Fig. 7). L’anaphylaxie passive localisée consiste à sensibiliser passivement un animal par l'injection intradermique (ID) du sérum provenant d'animaux immunisés, et à révéler cette sensibilisation par l'injection, 24 à 48 heures plus tard, de l'antigène correspondant, soit par voie ID, au lieu même de la sensibilisation passive (réaction de Prausnitz-Küstner), soit par voie IV (réaction d'Ovary) ; il se produit alors, dans la peau sensibilisée par les anticorps, un oedème, qui peut être révélé par l'extra-vasation d'un colorant vital injecté par voie IV, la réaction étant d'autant plus intense que la concentration des anticorps injectés dans le derme est plus élevée. Les réactions anaphylactiques in vitro sont effectuées sur des organes riches en fibres musculaires lisses (iléon ou corne utérine de cobaye, poumon de singe), prélevés chez des animaux préalablement sensibilisés ; ces organes sont alors placés dans un liquide de survie, puis mis en présence de l'antigène adéquat. Il se produit alors une dégranulation des mastocytes, qui se traduit par une contraction de l'organe isolé (phénomène de Schultz-Dale). Une réaction analogue peut également être obtenue après sensibilisation passive in vitro, par du sérum provenant d'un animal sensibilisé, d'un organe provenant d'un animal indemne de toute sensibilisation ; on parle alors d'anaphylaxie passive in vitro.

          Il est clair que les IgE sont les anticorps responsables de ces réactions anaphylactiques, dans la mesure où le chauffage du sérum à 56° C (qui détruit le site de fixation des IgE sur leurs récepteurs) prévient leur développement. Par ailleurs, le rôle déterminant des IgE dans les réactions anaphylactiques a été confirmé récemment grâce aux études effectuées chez des souris présentant une anomalie des récepteurs FceRI, chez lesquelles il est pratiquement impossible d’induire une réaction anaphy-lactique.

Rôle des mastocytes : il est étayé par de nombreux arguments, parmi lesquels :

          -         l'existence de signes de dégranulation mastocytaire massive (études immunohistologiques et histochimiques des tissus), dans le coeur entre autres ;

          -         une diminution considérable des concentrations tissulaires d'histamine, associée à une augmentation du taux de l'histamine plasmatique et de l'excrétion urinaire de la méthyl-histamine ;

          -         une augmentation de la concentration plasmatique de la tryptase, particulièrement marquée dans les réactions anaphylactiques sévères ;

          -         les résultats des études effectuées chez les souris congénitalement dépourvues de mastocytes (W/Wv et Sl/Sld), chez lesquelles il est impossible d'induire un choc anaphylactique (Tableau VI).

Médiateurs de l’anaphylaxie : le principal médiateur de l’anaphylaxie est l’histamine, comme en témoignent de nombreux arguments, parmi lesquels :

          -         une importante augmentation des concentrations plasmatiques d’histamine et urinaires de méthyl-histamine ;

          -         la reproduction des principaux signes cliniques et des principales modifications cardiovasculaires et biologiques par les injections IV d'histamine (choc histaminique) ;

          -         les effets protecteurs, partiels mais importants, des antihistaminiques H1, alors que, par ses effets H2, l’histamine exercerait plutôt une action anti-anaphylactique.

          Pendant longtemps, on a pensé que les effets cardiovasculaires de l’histamine résultaient de son action directe sur la paroi vasculaire et le muscle cardiaque ; toutefois, les résultats d’études récentes suggérent forte-ment que ces effets de l’histamine résultent d’une stimu-lation de la production de NO (monoxyde d’azote) par les cellules endothéliales et, peut-être par d’autres cellules (cellules musculaires lisses, etc.....).

          Mis à part l’histamine, d’autres médiateurs, tels le PAF et les leucotriènes, et, peut-être, certaines cytokines, pourraient jouer un rôle dans la prolongation et/ou l’aggravation de certains chocs anaphylactiques.

Interactions entre le système immunitaire et le système neuro-endocrinien : dans la mesure où des chocs anaphylactiques sévères ont été rapportés chez des sujets faiblement sensibilisés, certains auteurs ont postulé que la survenue de ces chocs pourrait être facilitée par des anomalies sous-jacentes des mécanismes neuro-endocriniens contrôlant la pression sanguine.

          C’est ainsi qu’il a été montré récemment que les taux plasmatiques et/ou intra-leucocytaires de l’angiotensine, l’angiotensinogène et la rénine étaient significativement plus faibles chez les sujets ayant présenté des réactions anaphylactiques sévères, aux venins d’hyménoptères notamment, que chez les témoins non allergiques, et étaient normalisés par la désensibilisation.

          Par ailleurs, il est clair que le déclenchement des réac-tions anaphylactiques est favorisé par certaines situa-tions qui s'accompagnent d'une diminution, faisant le plus souvent suite à une augmentation transitoire, de la production endogène des corticostéroïdes et des catécholamines (effort physique important ; certains traitements hormonaux ; stresses importants, physiques ou psychiques).

3)          L’anaphylaxie humaine

Dans l'espèce humaine, les réactions anaphylactiques associent plus ou moins complètement, et selon une chronologie le plus souvent stéréotypée, des signes cutanés (urticaire ± angio-oedème), respiratoires (bronchospasme et/ou oedème laryngé), et cardiovasculaires (hypotension plus ou moins profonde, tachycardie réactionnelle, et parfois arrêt cardiaque). Des troubles neurologiques (confusion, crises convulsives, parfois coma), résultant de l’anoxie cérébrale, peuvent être observés dans les chocs sévères.

          Si des réactions anaphylactiques plus ou moins sévères peuvent survenir chez des atopiques allergiques à un allergène donné, lorsqu’ils entrent en contact avec cet allergène (aliment le plus souvent), les réactions anaphylactiques ont pour particularité de pouvoir survenir chez des sujets non prédisposés par un terrain atopique (Tableau VII). Ceci résulte probablement de la nature particulièrement immunogène des substances anaphylactogènes (cf. ci-dessous), ainsi que des condi-tions dans lesquelles s’effectue généralement leur pénétration dans l’organisme (ingestion, injection).

          De nombreuses substances sont susceptibles d'induire un choc anaphylactique dans l'espèce humaine, parmi lesquelles, notamment :

          -         les sérums hétérologues (antitétanique et anti-diphtérique d'origine équine), historiquement ; actuel-lement, des sérums d'origine humaine leur sont préférés, et le risque est beaucoup plus faible. Il n'en reste pas moins que certains sérums d'origine animale sont à nou-veau utilisés (anticorps monoclonaux antilympho-cytaires notamment), et sont parfois à l'origine de chocs anaphylactiques ;

          -         les médicaments et substances biologiques : la liste des médicaments et substances biologiques susceptibles d'induire un choc anaphylactique est très longue. A titre indicatif, les plus fréquemment en cause sont les bêtalactamines, et notamment la pénicilline ; viennent ensuite les anesthésiques généraux (myorelaxants notamment), l'ACTH (y compris de synthèse), la glafé-nine, la vitamine B12, la chymopapaïne (chimio-nucléolyse discale), le latex, etc..... Le risque d'accident anaphylactique est plus élevé lorsque la pénétration s'effectue par voie parentérale, du fait de la diffusion rapide de l'allergène dans l'organisme ; enfin, les anti-hypertenseurs (b-bloquants notamment) constituent un facteur d'aggravation du choc anaphylactique et de résistance au traitement ;

          -         les produits sanguins d'origine humaine : des réactions anaphylactiques ont été observées chez des sujets recevant des perfusions de plasma ou des injections de gammaglobulines humaines, notamment chez les mala-des atteints de déficit en IgA. Deux mécanismes ont été incriminés pour expliquer ces réactions : une allergie à certaines protéines constitutives du plasma ou des gammaglobulines ; une allergie à un allergène exogène, malencontreusement présent dans le produit sanguin administré (aliment, médicament) ;

          -         allergènes divers : ils sont très nombreux. Il peut s'agir, entre autres, d'allergènes alimentaires, des venins d'hyménoptères (les chocs anaphylactiques qu'ils sont susceptibles d'induire étant probablement une cause non exceptionnelle de morts d'apparence spontanée), de pollens ou phanères animales (des réactions anaphylactiques sévères ayant été rapportées lors de séances de tests cutanés et lors de désensibilisations), et d'antigènes parasitaires ; en effet, il est bien connu que certaines parasitoses s'accompagnent de taux élevés d'IgE sériques totales et spécifiques, et des chocs anaphylactiques sévères ont été rapportés lors d'une irruption massive d'antigènes parasitaires dans l'organisme (rupture de kyste hydatique, traitement massif de certaines nématodoses). Enfin, des chocs anaphylactiques liés à la contamination d'aliments par des acariens, des moisissures et des allergènes du latex ont été rapportés récemment.

4)          Diagnostic différentiel

Le diagnostic de choc anaphylactique n'est pas toujours aisé, notamment du fait de la méconnaissance des antécédents (notion de sensibilisation antérieure souvent méconnue, etc...). De plus, comme cela a déjà été évoqué, les chocs anaphylactiques peuvent se produire chez des sujets non atopiques ; enfin, certaines manifestations peuvent ressembler à s'y méprendre à un choc anaphylactique. Il en est ainsi, notamment :

          -         des chocs anaphylactoïdes, qui peuvent résulter tantôt d'une histaminolibération directe, tantôt d'une activation mastocytaire par des facteurs du complément activé (anaphylatoxines C3a et C5a) par certaines subs-tances d'origine médicamenteuse (substituts du plasma, antibiotiques comme la colistine, plasmas mal conservés, produits de contraste) ou non médicamenteuse (Fig. 6 et Tableau VII). C’est pourquoi il importe d’effectuer des dosages systématiques du complément hémolytique, du C3 et du C4, chez tout sujet présentant un choc anaphylactique ou anaphylactoïde, notamment en milieu chirurgical et en anesthésie-réanimation ; ces dosages compléteront utilement le bilan de base (dosages de l’histamine et la tryptase plasmatiques, et de la méthyl-histamine urinaire), et permettront d’orienter le diagnostic étiologique effectué a posteriori. Quoiqu'il en soit, le traitement du choc anaphylactoïde est identique à celui du choc anaphylactique ;

          -         des syncopes vagales, mais généralement régressives spontanément en quelques minutes ;

          -         des chocs toxi-infectieux ou post-traumatiques, qui peuvent survenir chez des sujets hospitalisés dans des services de réanimation, et qui peuvent poser des problèmes de diagnostic différentiel avec un choc anaphylactique ou anaphylactoïde d'origine médicamenteuse ;

          -         enfin, des dyspnées laryngées d'origines diverses (inhalation de corps étranger chez l'enfant, notamment), et qui peuvent ressembler à un choc anaphylactique à prédominance respiratoire.

II -  diagnostic et traitement de l'allergie immédiate

A – Grands principes du diagnostic allergologique

          L'enquête allergologique comporte deux temps : la reconnaissance du terrain atopique et l'identification du/des allergène(s) en cause. Pour ce faire, et en dépit de méthodes immunologiques de plus en plus nombreuses et précises, l'enquête clinique, basée sur l'interrogatoire et les tests in vivo, reste fondamentale.

1)          Reconnaissance du terrain atopique

Elle est le plus souvent aisée à faire, sur la base des renseignements fournis par l'interrogatoire et, éventuellement, par quelques examens biologiques d'appoint.

L'interrogatoire recherche des antécédents d'atopie :

          -         familiaux, le risque étant d'autant plus élevé que le nombre des sujets atteints dans la famille proche (parents, fratrie) est élevé. Toutefois, l'absence d'antécédents familiaux n'exclut pas le risque, pour un enfant, d'être atopique ;

          -         personnels (DA et bronchiolites, chez le jeune enfant ; rhinite/rhinoconjonctivite et asthme, ultérieurement), qui font la preuve (quasi)certaine d'un terrain atopique.

Examens biologiques : ils sont indiqués lorsque les antécédents évocateurs font défaut ou sont incertains. Les examens les plus courants et les plus fiables sont :

          -         la NFS, à la recherche d'une éosinophilie supérieure ou égale à 4 % des leucocytes (soit 400 par mm3). Elle est inconstante, mais fréquente, et ne peut être reconnue comme indice d'atopie qu'après avoir éliminé les autres causes d'hyperéosinophilie, parasitoses et maladies de système notamment ;

          -         le dosage des IgE sériques totales : il est généralement effectué par la méthode du PRIST (paper radioimmunosorbent test : Fig. 1 et 2). Par cette méthode, on peut considérer comme pathologiques des taux supérieurs ou égaux à 1 U/ ml à la naissance (sang de cordon), 5 U/ml entre 1 et 3 mois, et 10 U/ml entre 4 et 6 mois, puis, jusqu'à l'âge de 12 ans, une augmen-tation supérieure à 15 ou 20 U/ml par année. Chez l'ado-lescent et l'adulte, la limite supérieure de la normale se situe aux alentours de 200 à 250 U/ml. Une hyper-IgE-globulinémie est couramment observée dans l'asthme, la DA et les syndromes dermorespiratoires ; mais, là enco-re, doivent être exclues les autres causes d'hyper-IgE-globulinémie ;

          -         les tests multiallergéniques non quantitatifs de dépistage, dont la positivité reflète l'existence d'une sensibilisation vis à vis d'un ou de plusieurs allergène(s) d'un mélange de pneumallergènes (Phadiatop©) ou de pneu-mallergènes et de trophallergènes courants (Alatop©) (Fig. 3). La valeur prédictive de ces tests est de l'ordre de 50 à 60 % avant l'âge de 4 ans, et de 90 à 95 % ultérieurement.

          D'autres examens biologiques peuvent être utilisés pour le dépistage de l'allergie immédiate. Il s'agit :

          -         du dosage des IgE dans les sécrétions, notamment dans les larmes (conjonctivites) ;

          -         de la recherche d'une éosinophilie supérieure ou égale à 10 % dans les sécrétions nasales (rhinites) ou bronchiques (asthme), où l'augmentation du nombre des éosinophiles est positivement et significativement corrélée avec la sévérité de la maladie.

          En pratique, ces examens ne sont effectués que très exceptionnellement, et plutôt pour éliminer une étio-logie allergique que pour la confirmer.

Cas particulier de l'allergie respiratoire : sont très évocateurs d'une rhinite ou rhinosinusite, mais aussi d'un asthme allergiques :

          -         l'aspect de la muqueuse nasale, de couleur lilas, pâle, oedémaciée, brillante, avec une fréquente hyper-trophie des cornets inférieurs ;

          -         un aspect en cadre des sinus maxillaires (RX des sinus, en incidence de Blondeau).

          Seront également recherchés systématiquement, par l'interrogatoire, l'examen clinique et la radiographie, des foyers infectieux ORL et stomatologiques ; ils sont en effet fréquemment associés à une allergie respiratoire, et en majorent l'expression.

2)          Identification des allergènes

 

Elle repose essentiellement sur les données fournies par l'interrogatoire, et sur les tests cutanés (TC) à lecture immédiate.

L'interrogatoire permet, dans la grande majorité des cas, de suspecter un ou plusieurs allergène(s). Des notions importantes doivent être précisées :

          -         le mode de début et les circonstances d'apparition des premières manifestations cliniques (déménagement, reclassement professionnel, acquisition d'un animal familier, etc.) ;

          -         le caractère saisonnier ou non des troubles : des manifestations perenniales à recrudescence automno-hivernale sont très évocatrices d'une allergie aux aca-riens, alors que des manifestations verno-estivales évo-quent plutôt une allergie pollinique ou à certaines moi-sissures atmosphériques. En l'absence de prédominance saisonnière, il faut évoquer un contact permanent avec des allergènes de l'environnement quotidien (animaux familiers ; allergènes professionnels, pour lesquels les troubles s'amendent généralement pendant les congés) ou portés par le malade (allergie bactérienne, certaines allergies fongiques), ou bien encore une polysensibi-lisation à de multiples allergènes échelonnés dans le temps (poussière et acariens, pollens, etc.) ;

          -         le lieu géographique (milieu habituel, déplacement à la campagne, etc.), et les conditions de logement. C'est ainsi, par exemple, que des symptômes liés à une allergie aux acariens peuvent être faussement attribués à une allergie pollinique, chez un sujet séjournant au printemps dans une maison de campagne ancienne et humide, riche en acariens. En ce qui concerne les conditions de logement, doivent notamment être précisées avec soin la composition des sols (tapis, moquettes, etc.), celle de la literie, l'humidité (traces de moisissures), le mode de chauffage, et la présence d'animaux familiers ;

          -         les conditions climatiques favorisant le déclenchement des troubles : l'expression d'une allergie à la poussière et aux acariens est généralement favorisée par un temps froid et humide, incitant au chauffage et au calfeutrage des habitations, alors qu'un temps chaud et sec est propice aux manifestations liées à une allergie pollinique ;

          -         la profession et les conditions de travail, à la recherche d'une possible allergie professionnelle ;

          -         enfin, d'éventuels facteurs déclenchants parti-culiers : contacts avec des animaux ; ingestion d'ali-ments ou de médicaments ; loisirs (équitation, brico-lage) ; contacts avec des proches exerçant des activités particulières, professionnelles ou non ; effort physique (asthme d'effort, allergie alimentaire), etc.

Les tests cutanés (TC) ont pour but de confirmer l'existence d'une sensibilisation à un ou plusieurs des allergènes soupçonnés à l'interrogatoire : les TC à lecture immédiate consistent à introduire dans le derme une très faible quantité d'allergène (cf. fig. 4), soit :

          -         en piquant au travers d'une goutte d'extrait allergénique, préalablement déposée sur la peau (prick-test) ;

          -         par injection directe (IDR) ;

          -         éventuellement par scratch-tests, où l'allergène (aliments frais en particulier) est déposé sur la peau légèrement abrasée.

          Chaque série de tests doit comporter un témoin négatif (solvant), afin d'éliminer tout dermographisme, et un témoin positif (histamine ou phosphate de codéine), afin de contrôler la réactivité cutanée. Une hyporéactivité cutanée peut en effet être observée chez les jeunes enfants et les sujets âgés, ainsi que chez les malades hémodialysés, et chez ceux recevant des anti-histaminiques, des anxiolytiques ou des anti-dépresseurs ; il est donc souhaitable d'interrompre ces médicaments plusieurs jours, voire plusieurs semaines, avant la séance de tests.

          La lecture de ces tests s'effectue à la 15e/20e minute, et leur interprétation repose sur la mesure des diamètres de la papule et de l'érythème ; dans certains cas, il est possible d'observer une réaction retardée, après la 6e/8e heure. La survenue d'une réaction "syndromique" d'aggravation ou d'amélioration des symptômes, au décours des TC, est un bon argument diagnostique. Le risque de survenue d'une telle réaction impose une surveillance d'au moins 30 mn. après la pratique des TC (IDR et scratch-tests notamment).

          La valeur diagnostique des TC à lecture immédiate dépend de :

          -         la nature et du degré de purification et de standardisation des extraits allergéniques : elle est bonne pour la plupart des pneumallergènes, les venins d'hyménoptères, le latex et quelques rares médicaments (notamment les pénicillines et autres bêtalactamines, certaines enzymes et hormones, et les myorelaxants) ; elle est variable pour les trophallergènes, et généralement mauvaise pour les allergènes industriels ;

          -         la concordance avec les données de l'interroga-toire : elle est bonne lorsque cette concordance est bonne, alors que des TC isolément positifs, en dehors de tout contexte clinique, ne présentent aucune valeur diagnostique.

Tests in vitro : quel que soit le test, il est bon de se rappeler qu'un résultat positif ne reflète pas obligatoirement une sensibilisation pathogène (il existe ainsi des sujets sensibilisés, mais qui ne manifestent aucune réaction allergique lorsqu'ils entrent en contact avec l'allergène), et qu'un résultat négatif ne signifie pas que le sujet n'est pas allergique à l'allergène étudié.

          *        Tests de détection, et dosages des IgE sériques spécifiques : il existe plusieurs catégories de tests utilisables par l'allergologue :

          -         les tests d'orientation par groupe d'allergène : ils donnent une réponse purement qualitative, mais permettent d'explorer les IgE spécifiques d'un groupe d'allergènes (Fig. 5 & tableau 1) ;

                    -         les tests multiallergéniques à réponse quanti-tative par allergène (Fig. 6) : ils permettent d'explorer une importante quantité d'allergènes (Matrix©, MAST-CLA©), de préciser la spécificité des IgE détectées, et d'en apprécier les taux de façon semi-quantitative. La valeur diagnostique de ces tests est bonne pour la plupart des pneumallergènes, et très variable pour les trophallergènes ; de toutes façons, elle est inférieure à celle des TC et des RAST. Compte-tenu des importants problèmes d'interprétation qu'ils posent, ces tests ne présentent d'intérêt que chez les sujets polysensibilisés et atteints d'allergies complexes. En aucun cas, ils ne peuvent ni ne doivent servir d'examens de dépistage systématique ;

          -         les tests monospécifiques, enfin : essentiellement basés sur des méthodes radioimmunologiques (RAST, CAP-RAST : Fig. 7 et Tableau 2), mais parfois fluorimétriques (FAST) ou immuno-enzymatiques (ELISA), ils permettent de détecter les IgE sériques spécifiques de la plupart des allergènes courants, et d'en déterminer les taux ; ceux-çi sont exprimés en unités par ml et/ou en classes, selon la correspondance indiquée dans le tableau II ; seuls les taux de classe égale ou supérieure à la classe 2 peuvent être considérés comme significatifs. Pour la majorité des allergènes courants, il existe une bonne correspondance avec les résultats des TC.

          *        Tests divers : il s'agit des tests d'activation cellulaire (Fig. 8), tels le test de la dégranulation des basophiles humains (TDBH, par une méthode optique) et le test de l'histamine-release (méthode immuno-fluorimétrique), qui permettent de mettre en évidence des IgE spécifiques fixées sur la membrane des basophiles sanguins. Mises en présence de l'allergène, ces cellules se dégranulent, ne peuvent plus être vues après coloration spécifique (TDBH), et libèrent de l'histamine qui peut être dosée dans le surnageant (test de l'histamine release). Peuvent également être dosés dans le surna-geant les leucotriènes (LTs), ou étudiés des marqueurs d'activation membranaire (molécules d'adhésion inter-cellulaire, etc.).

          La valeur diagnostique de ces tests est très variable selon la nature des allergènes, la qualité des extraits, et la rigueur avec laquelle ils sont effectués.

          Ces tests ne doivent être utilisés qu'exceptionnellement, par exemple lorsqu'il n'existe pas d'extraits pour TC ou de RAST (certains aliments, nombreux médicaments), et ne devraient être prescrits que par des allergologues confirmés.

Les tests de provocation (TP) consistent à reproduire chez un malade, si possible a minima, les symptômes de sa maladie, par l'administration prudente d'un allergène dont on cherche à prouver la responsabilité. Selon la voie d'introduction et la nature de l'allergène, on distingue :

          -         les TP par injection (généralement sous-cutanée) de l'allergène (pratiquement abandonnés, sauf dans quelques rares cas d'allergie médicamenteuse, avec TC et/ou RASTs négatifs) ;

          -         les TP par voie nasale (rhinites, asthmes sévères) ;

          -         les TP par voie bronchique (asthmes bénins et modérés) : ces tests consistent, après détermination du VEMS et du rapport de Tiffeneau (VEMS/CV), de la courbe débit-volume ou des résistances bronchiques, à faire inhaler au sujet des quantités croissantes de l'allergène incriminé, jusqu'à l'obtention d'une modification significative des paramètres EFR étudiés ;

          -         les TP par voie orale, aux aliments et aux médicaments : ces tests consistent à réintroduire l'aliment ou le médicament incriminé par la voie buccale, à des doses progressivement croissantes, et à étudier les réactions du sujet (signes cardiovasculaires, respiratoires, cutanés, etc.) dans les minutes ou heures suivantes.

          Ces tests de provocation, extrêmement précieux pour démontrer avec une quasi-certitude la culpabilité de l'allergène, ne sont pas dénués de dangers, et doivent donc être effectués en milieu hospitalier, en prenant de très strictes précautions ; d'une façon générale, ils sont à proscrire lorsque l'allergène à utiliser est soupçonné d'avoir déclenché un choc anaphylactique, comme c'est notamment le cas avec certains aliments ou médicaments.

3)          Conclusions

Le plus souvent, le médecin généraliste, le pédiatre, le pneumologue ou le dermatologue peuvent porter le diagnostic positif d'atopie sur les données de l'interrogatoire (antécédents personnels et familiaux), et en s'aidant éventuellement d'examens complémentaires simples (NFS, dosage des IgE sériques totales ou Phadiatop©) ; de même, par l'interrogatoire, éventuellement complété par une recherche d'IgE sériques spécifiques de groupes d'allergènes, ils peuvent suspecter le(s) type(s) d'allergènes en cause.

          Dans un second temps, l'allergologue devra confirmer la nature allergique des manifestations cliniques et, surtout, déterminer avec précision le(s) allergène(s) responsable(s). Pour ce faire, sur la base des renseigne-ments fournis par un interrogatoire soigneux, il effectuera des tests cutanés, dont la valeur diagnostique est incontestable lorsque les résultats concordent avec la clinique et les données de l'interrogatoire. Lorsqu'exis-tent des discordances, le diagnostic étiologique repose sur des examens biologiques plus ou moins sophistiqués (RAST, tests multiallergéniques à réponse quantitative par allergène, plus rarement Tests d'activation cellu-laire), et surtout sur des tests de provocation appropriés.

          L'ensemble de cette démarche diagnostique est schématisé dans le Tableau 3.

B – Les traitements spécifiques de l’allergie immédiate

Ils ne sont indiqués que lorsque le(s) allergène(s) en cause a (ont) bien été identifié(s) (voir ci-dessus).                            

1)          Eviction du (des) allergène(s) responsable(s)

C'est la solution la plus simple et la meilleure, quand elle est possible et peut être réalisée de façon complète. Par exemple :

          -         éviction d'un animal domestique, à l'origine de manifestations allergiques. Toutefois, il n'est pas inutile de rappeler que les allergènes animaux (chat notamment) sont extrêmement tenaces, peuvent persister pendant plusieurs mois dans un habitat après l'éviction, et peuvent même être détectés dans la poussière d'habitats dépourvus de l'animal correspondant.

          -         suppression d'un allergène alimentaire peu courant (viande de cheval, crustacés), ou peu susceptible d'exister sous forme masquée dans d'autres aliments (poisson).

          L'éviction est plus difficile pour les allergènes ubiquitaires tels la poussière de maison et ses acariens ; on peut néanmoins diminuer les effets nocifs de ces allergènes en aménageant l'ameublement et en utilisant de façon régulière des acaricides ; on peut aussi préconiser des séjours en altitude, dont l'effet bénéfique est en grande partie liée à la disparition des acariens au dessus de 1 200 à 1 500 mètres.

2)          L'immunothérapie spécifique (ou désensibilisation)

Bien qu'il existe plusieurs méthodes de désensibilisation (DS), le principe général de la DS repose sur l'administration régulière, à doses généralement croissantes, jusqu'à une dose maximale efficace et bien tolérée, du/des allergène(s) au(x)quel(s) le sujet est allergique. La DS induit un état de tolérance du sujet aux allergènes auxquels il est désensibilisé, ou, pour tout le moins, une diminution de sa sensibilité à ces allergènes

Indications de la désensibilisation : toutes les études sérieuses effectuées à ce jour montrent que la désensibilisation :

                    *        doit être réservée aux allergies du type immédiat, à l'exception peut-être de quelques rares cas d'HSR microbienne ou fongique ;

                    *        ne doit être envisagée que lorsque :

                                       -         la responsabilité de l'allergène est formellement prouvée (cf. Diagnostic allergologique) ;

                                       -         l'éviction de l'allergène est difficilement réalisable, voire impossible ;

                                       -         les manifestations allergiques sont suffisamment fréquentes et/ou sévères (à apprécier sur la consommation médicamenteuse et/ou le risque vital) ;

                    *        ne peut être initiée que chez les sujets dont les manifestations allergiques sont bien contrôlées par un traitement médical adapté (asthme notamment).

                    C'est ainsi que peuvent bénéficier de la DS :

                    -         avant tout, les manifestations respiratoires (rhinites, toux spasmodique, asthme) et oculaires (conjonctivites, blépharo et kératoconjonctivites) liées à une allergie aux pneumallergènes (poussières et acariens, phanères d'animaux, et pollens notamment) ;

                    -         certaines manifestations cutanées pures (DA) ou associées (syndromes dermorespiratoires), habituellement difficiles à désensibiliser ;

                    -         les allergies aux venins d'hyménoptères, enfin.

Méthodes : il en existe plusieurs, suivant la nature de l'extrait allergénique, la voie d'administration de cet extrait, et les modalités d'administration de l'allergène (période de l'année, rapidité de la progression initiale, etc.).

          Les extraits allergéniques les plus couramment utilisés sont des extraits injectables par voie SC : ils peuvent être aqueux (soit tout-prêts, soit lyophilisés, à reconstituer alors avec le solvant) ou retard (extraits adsorbés sur hydroxyde d'aluminium, phosphate de calcium, etc.). Les autres extraits (allergoïdes obtenus par polymérisation ; allergènes conjugués à des macromolécules) n'ont pas fait preuve de leur supériorité et sont assez peu utilisés ; des essais de DS par injections de conjugués allergènes-liposomes, de petits fragments d'allergènes (peptides allergéniques) ou de complexes immuns (allergènes-IgG spécifiques) sont en cours. Enfin, des extraits administrables par voie buccale, sublinguale, nasale ou bronchique ont été mis au point par divers laboratoires ; les doses à administrer sont très élevées, et leur efficacité est controversée.

          Selon la période de l'année à laquelle sont administrés les extraits allergéniques, on distingue les méthodes présaisonnières, où l'extrait allergénique est administré pendant les mois qui précèdent la période d'exposition allergénique (surtout utilisée pour les allergènes saisonniers, pollens notamment), et les méthodes cosaisonnières, où l'allergène est administré pendant la période d'exposition (essentiellement applicable aux allergènes perenniaux tels les poussières et les acariens, les phanères d'animaux domestiques, etc.).

          Enfin, les méthodes de DS varient selon la vitesse avec laquelle la progression des doses d'allergène est réalisée : la méthode usuelle (méthode ascentionnelle classique) consiste à injecter, tout d'abord une à deux fois par semaine, puis une fois toutes les deux à trois semaines, des doses progressivement croissantes d'extrait allergénique ; la dose maximale d'entretien, à la fois efficace et bien tolérée, n'est alors atteinte qu'après pluaieurs mois.

          Certaines méthodes (hyperaccélérées, accélérées, semi-accélérées) permettent d'atteindre la dose maximale efficace en quelques jours ou semaines ; les injections d'allergène doivent être effectuées en milieu hospitalier tant que la dose d'entretien n'est pas atteinte et/ou est mal tolérée. Ces méthodes sont essentiellement applicables aux venins d'hyménoptères, et parfois à d'autres allergènes (acariens, pollens, phanères), lorsqu'un résultat rapide est souhaité ; leurs indications sont limitées par la fréquence élevée, et parfois la sévérité, des complications pendant la période ascensionnelle rapide.

          Quelles que soient la méthode et les extraits utilisés, la DS obéit à quelques règles simples mais essentielles :

          -         sauf dans des cas très précis (protocoles standar-disés des DS hyperaccélérées, accélérées ou semi-accélérées), les doses de départ doivent être d'autant plus faibles et la progression d'autant plus lente que l'allergie est sévère ;

          -         chez les sujets polysensibilisés, il est inutile, voire néfaste, d'effectuer d'emblée une DS à l'ensemble des allergènes en cause : la DS doit être commencée avec l'allergène (ou la famille d'allergènes) le plus gênant, quitte à introduire les années suivantes une DS associée avec un second, voire un troisième allergène ;

          -         la DS doit faire la preuve de son efficacité dès le 3e/6e mois pour les allergènes perannuels, et dès l'année suivante pour les allergènes saisonniers. Toute absence d'amélioration dans ces délais, et a fortiori toute aggravation, impose de reconsidérer les modalités de la DS : choix du/des allergène(s), type d'extrait utilisé, rythme des injections, rapidité de la progression, etc. ;

          -         enfin, les injections d'entretien doivent être effectuées pendant au moins 3 ans, voire 4 à 5 ans, pour que l'efficacité de la DS soit durable.

Mécanismes d'action de la désensibilisation : il s'agit notamment de modifications portant sur la production de diverses classes anticorps, la réactivité lymphocytaire, et la réactivité des organes-cibles (diminution de la réactivité cutanée, nasale ou bronchique) à l'allergène, et sur la réactivité des cellules effectrices (diminution de l'activabilité des basophiles sanguins, mastocytes et éosinophiles tissulaires, et plaquettes, et de la libération de médiateurs par ces cellules). Sur la base des résultats des études récentes, on peut penser que ces modifications résultent, pour l'essentiel, d'une normalisation de la réponse immunitaire Th1/Th2, s'accompagnant d'une diminution de la production des cytokines pro-allergiques et pro-inflammatoires, et d'une augmentation de la production des cytokines "anti-allergiques" et anti-inflammatoires.

(a)     Anciennes hypothèses (modifications de la production des anticorps) :

          -         Modifications de la production des IgE : une diminution importante du taux des IgE totales et spécifiques est observée dans le sérum des sujets désensibilisés, pendant la période d’entretien de la DS . Chez les allergiques à des allergènes perannuels, le taux des IgE sériques devient significativement inférieur au taux détecté avant le début de la DS (Fig. 1) ; dans les allergies aux allergènes saisonniers, tels les pollens, le taux des IgE sériques n’augmente pas, ou que peu, pendant la période d’exposition naturelle à l’allergène.

          Au moins en théorie, cette diminution du taux des IgE pourrait à elle-seule expliquer une réduction de la réactivité à l’allergène, tout simplement en diminuant le nombre des IgE fixées sur les cellules effectrices : en effet, bien que le pontage de deux molécules d’IgE voisines soit suffisant pour induire une activation cellulaire, il a bien été montré que la dégranulation des basophiles et des mastocytes dépendait de la concentration des IgE sur la membrane de ces cellules, et était proportionnelle au degré d’agrégation des récepteurs pour les IgE.

          -         Modifications portant sur les IgG spécifiques : la DS induit le plus souvent une augmentation progressive du taux des IgG sériques spécifiques, qui affecte essentiellement les IgG4 (Fig. 2). Pour un certain nombre d’auteurs, cette augmentation est positivement et significativement corrélée avec l’efficacité clinique de la DS et avec la diminution du taux des IgE sériques. Deux mécanismes pourraient expliquer les effets bénéfiques de ces IgG(4) :

>        tout d’abord, un effet inhibiteur sur les réponses immunitaires, et tout particulièrement sur la production des IgE. Les mécanismes susceptibles d’expliquer cet effet inhibiteur des IgG (et des CI à IgG) sur la production des IgE ne sont pas encore parfaitement élucidés : ont été proposées une modification de la présentation des antigènes aux lymphocytes T, une inactivation directe des lymphocytes et/ou une inhibition par des cellules suppressives, et l’induction d’une réponse à anticorps anti-idiotypiques ;

>        ensuite, un effet "bloquant " des IgG (4 notamment) sur la phase effectrice de la réaction allergique (activation des mastocytes et des basophiles). Les mécanismes susceptibles d’expliquer l'effet inhibiteur des IgG spécifiques sur la fixation des allergènes sur les IgE et sur l’activation des cellules effectrices ne sont pas complètement élucidés : diverses hypothèses ont été proposées, parmi lesquelles une fixation des IgG sur des épitopes également reconnus par les IgE ("blocage" direct), une fixation des IgG sur des épitopes distincts, mais induisant une modification conformationnelle de l’allergène ou une obstruction spatiale masquant les épitopes reconnus par les IgE ("blocage" indirect), et, enfin, l’induction de signaux inhibiteurs par la combinaison de l’allergène aux IgG fixées sur la membrane des cellules effectrices.

          -         Modifications portant sur les auto-anticorps anti-IgE : des taux plus ou moins élevés d’anti-IgE, appartenant essentiellement aux sous-classes des IgG1 et 4, ont été détectés dans le sérum des allergiques. En ce qui concerne les modifications induites par la DS, des résultats contradictoires ont été rapportés, avec une augmentation du taux des anti-IgE dans les DS aux pneumallergènes, et une augmentation de leur taux dans les DS aux venins d’hyménoptères ; on peut suggérer que les modifications observées dans les DS aux venins d’hyménoptères affectent des anti-IgE exerçant des effets pro-allergiques, telles celles interagissant avec le domaine Ce4, qui potentialisent la fixation et/ou le pontage des IgE sur la membrane des cellules effectrices. A l’inverse, il est possible que les modifications observées dans les DS aux pneumallergènes affectent des anti-IgE douées de propriétés anti-allergiques, telles celles interagissant avec les domaines (Ce2)-Ce3 des IgE ; en effet, ces anticorps inhibent la fixation des IgE sur les récepteurs de haute affinité, la libération d’histamine par les basophiles, le chimiotactisme leucocytaire, et la production des IgE in vitro et in vivo chez la souris, et in vitro chez l’homme.

          -         Modifications portant sur les anticorps anti-idiotypiques : le taux des anticorps anti-idiotypiques est augmenté dans le sérum des malades désensibilisés aux pneumallergènes et aux venins d’hyménoptères. Outre un possible effet inhibiteur sur la production des IgE, ces anticorps pourraient interagir avec le F(ab’)2 des IgE fixées sur les membranes cellulaires, inhiber le pontage de ces IgE, et, finalement, inhiber l’activation des cellules effectrices. Cette hypothèse est étayée par les résultats d’études montrant que les anticorps anti-idiotypiques du sérum d’apiculteurs non allergiques et de malades désensibilisés à l’abeille peuvent se fixer sur des idiotypes exprimés sur les IgE spécifiques et inhiber le RAST.

(b)     Hypothèses récentes (modifications portant sur le nombre et l'activabilité des cellules effectrices) : de nombreuses études ont montré que la DS inhibait significativement le nombre des cellules effectrices dans le sang et les tissus : ainsi, chez les asthmatiques désensibilisés au bouleau, le nombre des éosinophiles n’augmente, ni dans le sang ni dans le liquide de lavage bronchoalvéolaire (LBA), pendant la saison pollinique (Fig. 3), et le taux de l’histamine sanguine totale (qui reflète le nombre des basophiles sanguins) est diminué chez les sujets désensibilisés aux pollens. De plus, le nombre des mastocytes est significativement diminué dans la muqueuse nasale des malades désensibilisés pour rhinite allergique aux acariens, dès le troisième mois suivant le début de la DS.

          La DS réduit également l’activabilité des cellules effectrices : ainsi, le taux d’histamine plasmatique n’augmente pas, après une piqûre volontaire, chez les malades désensibilisés avec succès aux venins d’hyménoptères ; par contre, chez les malades chez lesquels la DS n’est pas efficace, la piqûre d’hyménop-tère induit une augmentation considérable du taux plasmatique de l’histamine. Chez les sujets désensibilisés aux pollens, le taux sérique d’ECP (eosinophil cationic protein) n’augmente pas pendant la saison pollinique, et le taux du PAF est significativement diminué dans le plasma des malades désensibilisés pour allergie aux acariens de la poussière de maison. La DS induit également une diminution significative de la libération d’histamine, de LTs et de PAF par les leucocytes sanguins, de l’agrégation plaquettaire, et des propriétés cytotoxiques des plaquettes et des cellules naturelles cytotoxiques ; elle inhibe aussi la dégranulation des mastocytes de la muqueuse nasale chez les sujets désensibilisés pour rhinite allergique (Fig. 4), et la libération d’histamine dans la peau, après injection ID de l’allergène.

          Enfin, les résultats de travaux très récents ont montré que, in vitro, la production (spontanée) de cytokines pro-inflammatoires non typiquement Th1 ou Th2, telles l’IL-8, le MCP-1 et le RANTES par les cellules mononucléées sanguines était très diminuée chez les sujets DS aux venins d’hyménoptères, et que, chez ces mêmes sujets, il existait une diminution significative de la réactivité des basophiles et des mastocytes au MCP-3 et au RANTES ; cette inhibition est liée à une désensibilisation pharmacologique des récepteurs des basophiles et des mastocytes pour ces chémokines, qui résulte d'une production initialement accrue de RANTES par les pla-quettes.

          Les mécanismes responsables de cette diminution du nombre et de l’activabilité des cellules effectrices de l’allergie ne sont pas encore parfaitement connus : les hypothèses initiales ont fait appel aux modifications de la production des anticorps évoquées plus haut. Cependant, de nombreux auteurs ont montré que la diminution du taux des IgE sériques, l’augmentation du taux des IgG spécifiques, et les modifications des taux des anti-IgE et des anticorps anti-idiotypiques n’étaient pas significativement corrélées avec l’efficacité de la DS ; ainsi, on peut penser que les modifications qui portent sur la production des IgE, IgG, anti-IgE et anticorps anti-idiotypiques, ne sont pas les principaux mécanismes responsables de l’efficacité clinique de la DS, et des résultats récents suggèrent fortement que la diminution du nombre et de l’activabilité des cellules effectrices, induite par la DS, résulte essentiellement d’une modification portant sur le nombre et la réactivité des sous-populations lymphocytaires (cf. infra).

(c)     Hypothèses actuelles (normalisation de la réactivité lymphocytaire) : des modifications diverses du nombre et de la réactivité des lymphocytes ont été rapportées chez les sujets désensibilisés. Ainsi, une augmentation transitoire du nombre des lymphocytes T (CD3), et une réduction de la réactivité lymphocytaire in vitro, de la production d’interleukine-2 (IL-2) et du récepteur soluble de l’IL-2 (sIL-2R), ont été mises en évidence dans le sang des malades désensibilisés par des allergènes divers. Par ailleurs, le taux sérique du sIL-2R est significativement diminué chez les sujets désensibilisés avec succès. Bien qu’aucune modification significative du rapport CD4/CD8 n’ait été objectivée dans le sang des malades désensibilisés, non plus que dans la phase tardive de la réaction cutanée induite par l’injection ID d’allergène, une induction et une activation de lymphocytes T "helper" spécifiques a été rapportée dans le sang des enfants désensibilisés aux venins d’hyménoptères, et corrélée avec l’augmentation du taux sérique des IgG(4) spécifiques. De plus, la DS induit la génération et l’activation de lymphocytes T "suppresseurs" (CD8+), qui inhiberaient la production des IgE totales et spécifiques in vitro ; toutefois, cette dernière notion est contestée par certains auteurs.

          Des résultats, publiés récemment, montrent clairement que la DS induit une normalisation de la réponse Th1/Th2 aux allergènes, avec une réorientation vers une réponse du type Th1 : c'est ainsi que, après activation in vitro par les allergènes, les cellules mononucléées sanguines des malades désensibilisés à des allergènes divers produisent significativement moins d’IL-4 et d’IL-5, et plus d'IFN-g qu'avant la DS (Fig. 6). In situ, ont également été rapportées une diminution de l’expression des ARN messagers (mARN) pour l’IL-4 et l'IL-5, et une augmentation de l’expression des mARN pour l’IL-12, l'IL-2 et l’IFN-g. Ainsi, la DS diminue la réponse Th2 et augmente la réponse Th1 aux allergènes. Ces modifications, qui se produisent très rapidement chez les sujets désensibilisés selon une méthode accélérée, et plus lentement dans les DS conventionnelles, pourraient être à l’origine d’une réduction de l’expression du CD23/FceRII sur les lymphocytes B et dans le sérum, et, secondairement, d’une diminution de la production des IgE, ainsi que d’une augmentation de la production des IgG(4), de la diminution du nombre et de l’activabilité des cellules effectrices, et, en fin de compte, de la diminution de la réactivité aux allergènes.

          Finalement, in vitro, les cellules mononucléées sanguines des malades désensibilisés produisent des cytokines douées de propriétés anti-allergiques et anti-inflammatoires, telles l’IL-10 (Fig. 7), le HRIF (histamine release-inhibitory factor), et le PASL (platelet activity-suppressive cytokine) : les sous-populations cellulaires susceptibles de produire ces dernières cytokines n'ont pas encore été clairement identifiées, mais on peut suggérer qu'il s'agit de lymphocytes CD4 ou CD8 du type Th1, comme cela a été démontré pour l'IL-10.

Efficacité de la désensibilisation : les résultats les meilleurs sont obtenus chez l'enfant, l'adolescent et l'adulte jeune mono- ou pauci-sensibilisés ; ils sont moins bons lorsqu'il existe une polysensibilisation, et lorsque l'allergie est intriquée avec des causes non allergiques (sujets âgés notamment).

          En pratique courante, l'efficacité de la désensibi-lisation doit être appréciée essentiellement sur des critères cliniques (modification de la symptomatologie, et diminution de la consommation médicamenteuse). Les autres critères sont secondaires, si l'efficacité clinique est bonne :

          -         diminution de la réactivité cutanée, inconstante, et n'apparaissant généralement que tardivement ;

          -         diminution de la réactivité des organes et des tissus-cibles, lors des tests de provocation spécifiques, qui porte surtout sur la phase tardive ;

          -         diminution des taux des IgE sériques totales, et surtout spécifiques ;

          -         augmentation du taux des IgG (4 notamment) spécifiques.

          En milieu spécialisé, l'efficacité de la DS pourra être appréciée sur les réponses aux tests d'activation cellulaire (TDBH, tests de l'histamine-release ou de la production des LTs, etc.), sur la numération des cellules effectrices (mastocytes, basophiles, éosinophiles, lymphocytes) et les dosages des médiateurs ou des cytokines dans les secrétions ou dans les muqueuses, sur les tests de prolifération lymphocytaire, et, éventuellement, sur l'étude de la réactivité des sous-populations lymphocytaires. Il s'agit là de méthodes lourdes et coûteuses, qui, en fait, n'ont d'intérêt qu'en matière de recherche, pour essayer de préciser les mécanismes de la désensibilisation.    

          Le plus souvent, la décision d'arrêter la DS est facile à prendre, après 3 à 5 ans, sur une association plus ou moins complète des critères d'efficacité, et notamment sur l'efficacité clinique.

Incidents et accidents de la désensibilisation : il s'agit le plus souvent de réactions locales, banales et aisément contrôlées par les antihistaminiques. Peuvent également être observées, mais plus rarement, des réactions granulomateuses, caractérisées par la formation de nodules sous-cutanés, qui se voient plus souvent avec les extraits retard (adsorbés sur hydroxyde d'aluminium) ; les réactions à type de phénomène d'Arthus sont exceptionnelles, en particulier chez l'enfant.

          Les réactions générales, notamment sévères (chocs anaphylactiques a minima ou potentiellement mortels) sont exceptionnelles (moins de une ou 2 p.mille injections), alors que les réactions syndromiques ne sont pas rares : elles surviennent essentiellement en cas de surdosage. Le risque de survenue de telles réactions impose de surveiller le malade pendant au moins 30 mn après l'injection d'extrait allergénique.

III - Aspects cliniques de l'allergie immediate

A - Allergie respiratoire & oculaire

Introduction : avec la dermatite atopique, les manifestations respiratoires sont les manifestations les plus fréquentes de l'allergie immédiate. Ces manifestations allergiques peuvent être gênantes (par leur répétition qui entrave les activités du malade), sévères (certains asthmes, kérato-conjonctivites), et potentiellement fatales (oedème de Quincke avec extension laryngée, crises d'asthme hypersévères). Les allergènes de l'allergie respiratoire et oculaire sont avant tout les aéro-allergènes (poussières, de maison notamment, avec ses acariens, ses allergènes de blatte et/ou d'animaux domestiques ; pollens et moisissures ; allergènes professionnels volatils divers).

          Au niveau du nez, les allergies respiratoires se traduisent par des rhinites, associant plus ou moins complètement prurit nasal, rhinorrhée, et obstruction nasale ; y sont souvent associés des signes oculaires (rhinoconjonctivite) et sinusiens (céphalées et fatigue), et, dans 5 à 10 % des cas, une toux spasmodique et/ou un asthme. Selon leur caractère permanent ou épisodique, on distingue les rhinites et rhinosinusites perenniales (essentiellement dues aux acariens, blattes, moisissures domestiques, animaux domestiques et allergènes professionnels), et les rhinites saisonnières (surtout dues aux pollens et aux moisissures atmosphériques).

          L'allergie immédiate est sans conteste la plus fréquente cause d’asthme (asthme "extrinsèque", par opposition à l'asthme dit "intrinsèque", dont les facteurs étiologiques sont moins faciles à appréhender).

          Cliniquement, l'asthme se manifeste comme une dyspnée paroxystique sifflante, à prédominance expiratoire, et régressant spontanément ou sous l'influence des bronchodilatateurs. Au plan fonctionnel, l'asthme est caractérisé, d'une part par un syndrome obstructif, et d'autre part par une hyperréactivité bronchique (HRB). Enfin, au plan anatomopathologique, on observe, à des degrés divers : un bronchospasme, un oedème de la muqueuse bronchique, une augmentation de la sécrétion et de la viscosité du mucus bronchique, et une fréquente désquamation de l'épithélium bronchique ; dans les formes sévères et évolutives, peuvent être observées une hypertrophie du muscle lisse bronchique et des glandes bronchiques, et une importante infiltration de la paroi bronchique par des éosinophiles.

          Ces divers phénomènes résultent de mécanismes complexes et intriqués, comportant à la fois des anomalies du contrôle neurologique de la bronchomotricité (hyperréactivité des systèmes para-sympathique et NANC bronchoconstricteurs ; diminution de la sensibilité des récepteurs bêta-

adrénergiques bronchorelaxants), et des anomalies résultant de la production exagérée de médiateurs et cytokines vaso-actifs, bronchoconstricteurs et pro-inflammatoires.

          Les examens paracliniques permettent, d'une part de confirmer le diagnostic, et, d'autre part, d'évaluer la sévérité de l'asthme :

          -         la radiographie thoracique est généralement normale en dehors des crises, sauf dans les asthmes sévères et insuffisamment traités, évoluant depuis plusieurs mois ou années. Lorsqu'elle est effectuée pendant une crise, elle montre une distension thoracique (horizontalisation des côtes, élargissement des espaces inter-costaux, abaissement et aplatissement des coupoles diaphragmatiques, et hyperclarté du parenchyme pulmonaire, sur les clichés de face ; augmentation du diamètre antéro-postérieur du thorax, avec espace clair rétrosternal, sur le cliché de profil gauche) ; toujours en crise, elle peut également montrer une atélectasie ou un emphysème localisé (secondaires à une obstruction bronchique complète), un pneumothorax ou un pneumomédiastin (soit conséquences, soit causes de la crise) ;

          -         les explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) : elles sont généralement impraticables au moment de la crise, à l'exception de la mesure du DEP (débit expiratoire de pointe), qui est significativement abaissé. Effectuées à distance des crises, les EFR sont normales dans les asthmes bénins et modérément sévères ; le diagnostic repose alors sur les tests de provocation bronchique, qui consistent à faire respirer au sujet des substances bronchoconstrictrices (histamine, métacholine, etc.), et à déterminer son seuil de sensibilité à ces substances. Chez les asthmatiques sévères, les EFR mettent en évidence une obstruction, plus ou moins réversible sous bronchodilatateurs ;

          -         enfin, l'étude des gaz sanguins, du pH sanguin et de l'équilibre acidobasique n'est indiquée que dans les asthmes sévères : une hypoxie, une hypercapnie et une acidose représentent des signes de sévérité, et imposent une hospitalisation.

                    Le diagnostic d'asthme ne devra être retenu qu'après avoir éliminé un certain nombre de diagnostics différentiels : chez l'adulte, il s'agit notamment des dyspnées laryngées, de l'oedème aigu du poumon, de l'inhalation d'un corps étranger, d'une obstruction ou d'une compression bronchique par des adénopathies, une tumeur, un kyste bronchogénique, etc. Chez l'enfant, il faut évoquer des causes obstructives diverses (corps étranger, sténose bronchique, malformation, tumeur, adénopathies bénignes ou malignes, arcs vasculaires anormaux), une trachéobronchomalacie, un reflux gastrooesophagien (RGO), des troubles de la déglutition, une mucoviscidose, des séquelles de pneumopathie virale, une dilatation bronchique, etc... Chez le nourrisson, enfin, de nombreuses affections autres que l'asthme peuvent être à l'origine d'une inflammation bronchique et bronchiolaire, avec obstruction et wheezing, voire majorer un asthme authentique ; la longue liste de ces affections justifie la pratique d'un bilan systématique complet (cf. Tableau I) ; au terme de ce bilan, une bronchoscopie sera effectuée lorsqu'aucun diagnostic précis ne sera évoqué, ou lorsque seront évoqués certains diagnostics particuliers (inhalation de corps étranger, bronchodysplasie, trachéomalacie/dyskinésie trachéo-bronchique, etc...).

          Le diagnostic étiologique des rhinites et rhino-conjonctivites allergiques et de l'asthme repose usuel-lement sur les données fournies par l'interrogatoire, et sur les résultats des TC à lecture immédiate, et, éventuellement, des RAST. Des tests de provocation (bronchique ou nasale) spécifiques peuvent être effectués lorsque les résultats des TC et/ou des RAST laissent persister un doute.

          Le traitement curatif des rhinites repose sur les médicaments symptômatiques (antihistaminiques locaux et/ou per os ; antidégranulants locaux ; corticoïdes locaux, per os, voire retard injectables), en fonction de la sévérité des symptômes. Le traitement symptômatique de l'asthme repose sur une association plus ou moins complète de trois grandes catégories de médicaments : les bronchodilatateurs (théophyllines per os et injectables ; b2-adrénergiques inhalés, per os ou injectables), les anti-dégranulants/anti-inflammatoires non stéroïdiens inhalés (cromoglycate, nédocromil), et les corticoïdes inhalés, per os, ou injectables. Il doit être adapté en fonction de la sévérité de la maladie asthmatique. Selon un consensus international récent :

          -         le traitement des asthmes bénins et épisodiques, sans HRB, repose sur les bronchodilatateurs inhalés ou per os, donnés de façon ponctuelle, lors des crises ;

          -         les asthmes modérés requièrent un traitement de fond par les antidégranulants/anti-inflammatoires inhalés, auxquels sont ajoutés des bronchodilatateurs inhalés ou per os à la demande ;

          -         enfin, les asthmes sévères, avec obstruction intercritique, nécessitent un traitement de fond par corticoïdes inhalés et bronchodilatateurs inhalés à longue durée d’action, auxquels sont ajoutés des bronchodilatateurs inhalés à courte durée d’action, à la demande.

          D'une façon générale, la prévention des récidives ou de la perennisation de l’asthme et de la rhinite allergiques repose sur l'association plus ou moins complète d'un certain nombre de mesures :

          -         une éviction des facteurs déclenchants, allergéniques ou non (tabagisme ; retrait d'une crèche collective, où le risque d'infections ORL est élevé ; hygiène de la literie ; éviction des animaux domestiques ; etc......), dans la mesure du possible ;

          -         la désensibilisation, dans les formes modérées, bien équilibrées par le traitement médicamenteux.

          Les traitements symptômatiques bien conduits, éventuellement associés à une désensibilisation, donnent généralement de bons résultats chez les sujets jeunes et sensibilisés à un nombre limité d'allergènes ; schématiquement, on peut espérer une guérison dans la moitié des cas, une amélioration dans 25 % des cas, et une absence d'amélioration, voire une aggravation, dans le quart des cas restant.

          En revanche, dans l'asthme "vieilli", où les crises perdent leur caractère aigu et où il existe souvent une polysensibilisation, le traitement est difficile et ses résultats sont souvent décevants. A plus ou moins long terme, deux types de complications graves peuvent survenir : un état de mal asthmatique (crise aiguë sévère), et un asthme à dyspnée continue, majorée par les efforts physiques, les expositions aux allergènes, et les expositions aux irritants respiratoires. Les surinfections sont fréquentes, et l'évolution habituelle se fait vers une insuffisance cardio-respiratoire chronique.

B - Manifestations cutanées de l'HSI

1)          La dermatite atopique

La dermatite atopique (DA), ou eczéma constitutionnel, touche 2,5 à 5 % des individus, selon les auteurs ; il s'agit d'une affection récidivante et chronique, qui affecte essentiellement le nourrisson et le jeune enfant, mais qui peut aussi toucher le grand enfant, l'adolescent et l'adulte.

          Les mécanismes immunopathogéniques en cause restent encore incomplètement connus ; en effet, la DA associe des anomalies relevant à la fois :

          -         d'une HSR (aspect clinique et histologique des lésions, fréquente positivité des patch-tests aux trophallergènes ou/et aux pneumallergènes courants) ;

          -         d'une HSI (antécédents familiaux d'atopie ; taux élevé des IgE sériques ; présence d'IgE sur les mastocytes du derme et les cellules de Langerhans de l'épiderme ; positivité des TC à lecture immédiate dans 70 à 80 % des cas ; évolution fréquente vers une allergie respiratoire).

Aspects cliniques : les lésions, très prurigineuses, débutent par des plaques érythémateuses et oedémaciées qui évoluent, à des degrés variables, vers la vésiculation et le suintement ; l'évolution se fait par poussées, entrecoupées de périodes de rémission, souvent incomplète. A un stade plus tardif on observe des érosions par désquamation, et une lichénification circonscrite.

Classiquement, la DA débute avant l'âge de 1 an (le plus souvent vers 3 ou 4 mois, mais parfois plus tôt) : les lésions prédominent alors aux zones convexes (joues et menton, en épargnant le nez ; cuir chevelu ; faces d'extension des membres) ; dans les formes sévères, une extension au tronc et au siège, voire aux plis, est fréquente. Une rémission spontanée se produit dans environ 50 % des cas, entre l'âge de 10 ans et la puberté. Chez l'enfant plus grand, l'adolescent et l'adulte, les lésions touchent préférentiellement les plis (creux poplité, pli du coude, nuque, sillon rétro-auriculaire), ainsi que, assez souvent, le dessus des mains.

D'autres signes cliniques (dits "mineurs") peuvent aider au diagnostic : une xérose (sécheresse de la peau) et une kératose pilaire, très fréquentes ; une pâleur (faciale notamment), contrastant avec la pigmentation du repli sous-palpébral inférieur (signe de Dennie-Morgan) ; une cheilite de la région péribuccale.

Les principales complications de la DA sont :

          -         les surinfections : les surinfections bactériennes (staphylococciques notamment) sont fréquentes ; elles se développent sur les vésicules rompues spontanément ou par grattage. Une surinfection herpétique doit être évoquée sur l'aspect bien limité, creusant et érosif, voire nécrotique, des lésions, et impose un traitement anti-viral par Zovirax®, de façon à prévenir la formation de bulles géantes, par confluence des lésions (syndrome de Kaposi-Juliusberg) ;

          -         une lichénification de la peau : elle se constitue progressivement, et est d'autant plus marquée que les poussées de DA sont fréquentes et sévères.

          -         une cataracte : c'est une complication rare, observée chez quelques rares malades atteints de DA chronique sévère.

Traitement et prévention : le traitement est essentiellement symptômatique. Il repose sur divers types de mesures, plus ou moins associées :

          -         la lutte contre la xérose, en peau non lésée : elle est assurée par les émollients (crèmes ou huiles de bain) ou/ et les kératolytiques (Xéroderm®, etc.). Il est également souhaitable d'assurer une bonne hydratation générale (boisson), et une humidification de l'atmosphère ; enfin, il est conseillé d'éviter les bains trop chauds et trop longs, qui favorisent le déssèchement de la peau

-         une antiseptie soigneuse, basée sur l'utilisation quotidienne de savons antiseptiques. En cas de surinfection, on pourra être amené à prescrire une antibiothérapie locale. Lorsque la surinfection est majeure, il faudra avoir recours aux antibiotiques antistaphylococciques per os ;

          -         la lutte contre le prurit, par l'administration d'antihistaminiques H1. Toutefois, ces médicaments ne sont pas toujours efficaces aux doses pharmacologiques usuelles ;

          -         la corticothérapie locale, lors des poussées : selon la sévérité, on aura recours à l'application, sur les lésions, de crèmes dermocorticoïdes de niveau 1 (le plus faible), de niveau 2 ou 3, voire de niveau 4 (le plus fort ). La corticothérapie par voie générale est formellement contre-indiquée : en effet, si elle induit une amélioration clinique rapide, elle est généralement responsable d'un phénomène de rebond préjudiciable après l'arrèt, même progressif, du traitement.

          -         dans les formes très sévères, on peut être amené à prescrire de la cyclosporine, mais seulement en milieu hospitalier.

          En ce qui concerne la prévention, la fréquence et la sévérité des récidives peuvent souvent être diminuées grâce à certaines mesures relativement simples :

          -         une lutte quotidienne contre la xérose, par les émollients et l'humidification de l'atmosphère ;

          -         une antiseptie cutanée quotidienne, basée sur l'utilisation de savons liquides antiseptiques

          L'éviction des allergènes, et notamment des trophallergènes, est très discutée, sauf dans les cas particuliers d'allergie évidente à certains allergènes alimentaires comme l'oeuf, le chocolat et les laitages, ou à certains aéro-allergènes (acariens et animaux domestiques, notamment).

          Enfin, la désensibilisation donne parfois de bons résultats ; elle doit être menée très précautionneusement, et avec des extraits aqueux exclusivement.

2)          Urticaires et oedèmes de Quincke

Il s'agit d'affections fréquentes, mais qui, bien souvent, ne relèvent pas d'une allergie.

Description clinique : la lésion élémentaire d'urticaire est une papule oedémateuse, qui résulte de l'extravasation de liquide dans le derme superficiel ; les lésions sont de taille variable, roses ou rouges, avec un fréquent pâlissement progressif de la région centrale. Elles sont prurigineuses, fugaces et migratrices.

L'oedème de Quincke, quant à lui, résulte d'une localisation profonde, hypodermique ou sous-muqueuse, de l'oedème ; il peut être isolé ou associé à une urticaire. De survenue brutale, sous la forme d'un oedème blanchâtre ou rosé, il est peu prurigineux, mais comporte souvent une sensation de tension ou de cuisson. Il se localise avec prédilection aux lèvres, à la langue, aux paupières, au pharynx et aux organes génitaux externes ; la localisation au larynx, avec oedème de la glotte, peut mettre en jeu le pronostic vital, et impose un traitement d'urgence. Une modification de la voix (raucité) et/ou une dysphagie représentent des signe d'alarme d'extension laryngée.

L'oedème de Quincke doit être différencié de l'oedème angio-neurotique héréditaire (OANH), qui lui ressemble cliniquement, mais qui résulte d'un déficit congénital en inhibiteur de la C1-estérase, et dont les aspects cliniques, les mécanismes et le traitement sont évoqués dans un autre chapitre.

Physiopathologie : les urticaires et oedèmes de Quincke résultent de la dégranulation des mastocytes tissulaires, avec libération de substances vasodilatatrices et vasoperméatrices. Divers mécanismes peuvent être en cause :

          -         dépendants des IgE (allergie immédiate, anaphylaxie) ;

          -         médiés par des facteurs du complément activé (C-kinines et anaphylatoxines) ;

          -         non immunologiques, liés à des substances ou agents directement histamino-libérateurs, ou bien riches en histamine.

Etiologies : on distingue les urticaires et oedèmes de Quincke aigus et chroniques, dont les étiologies sont en grande partie distinctes.

          Le diagnostic étiologique des formes aiguës est généralement aisé à effectuer par le seul interrogatoire : les substances en cause sont essentiellement des médicaments ou des aliments (cf. chap. correspondants). Les autres causes, moins fréquentes, sont les maladies virales (phase prodromique de l'hépatite virale, mononucléose infectieuse, virus divers), les parasitoses (helminthiases : ténias, ascaris, distomatose, kyste hydatique, etc.), les contacts avec des animaux ou des végétaux urticants (orties, méduses, chenilles processionnaires, etc.), et les piqûres d'insectes (hyménoptères notamment).

          On définit une urticaire chronique comme une urticaire évoluant par poussées depuis au moins 6 semaines. On distingue :

          -         les urticaires physiques, probablement les plus fréquentes (cf. Tableau II) : il s'agit avant tout du dermographisme, qui peut être très invalidant. D'autres formes, plus rares, sont décrites : l'urticaire à la pression, à la chaleur et au froid, l'urticaire cholinergique, les urticaires aquagénique et solaire ;

          -         les urticaires de cause systémique, non exceptionnelles, où les lésions sont chroniques et fixes, peu prurigineuses, et souvent associées à des manifestations générales (fièvre, arthralgies, syndrome inflammatoire). Les affections en cause sont nombreuses (cf. Tableau III) ;

          -         les urticaires dites "communes" : lorsque leur cause est retrouvée, il s'agit le plus souvent de médicaments (bêtalactamines et antiinflammatoires non stéroidiens notamment), d'aliments ou d'additifs alimentaires. Toutefois, dans près de 70 % des cas, leur étiologie ne peut être déterminée.

Bilan diagnostique : une fois reconnu, par l'interrogatoire ou/et l'examen clinique, le diagnostic positif d'urticaire ou d'oedème de Quincke, le bilan étiologique a pour but de déterminer l'agent responsable :

          -         dans les formes aiguës, le plus souvent l'interrogatoire seul suffit. Selon le contexte, des examens complémentaires seront demandés : NFS, à la recherche d'une éosinophilie sanguine ; examen parasitologique des selles et scotch test ; dosage des transaminases ; bilan allergologique, si l'on soupçonne un aliment ou un médicament.

          -         dans les formes chroniques, si l'on soupçonne une cause physique, le diagnostic étiologique repose sur des tests simples : recherche d'un dermographisme, tests au glaçon (urticaires au froid), au poids (urticaire retardée à la pression), à l'eau (urticaire aquagénique), tests photobiologiques (urticaire solaire), etc. Ces tests, qui sont bien standardisés, doivent être effectués par des médecins compétents et, de préférence en milieu hospitalier (risque de réaction anaphylactique sévère).

En l'absence d'élément d'orientation, sera demandé un bilan complet, comportant : NFS et VS, dosage des IgE sériques totales, électrophorèse des protides, voire immunoélectrophorèse, bilan hépatique, recherche de protéinurie et examen cytobactériologique des urines, radiographies de thorax, des sinus, et panoramique dentaire, sérologie HBs, toxoplasmose et MNI-test, dosages du complément hémolytique et des facteurs C3 et C4, enfin, bilan allergologique (aliments, médicaments, hypersensibilité microbienne ou fongique). Au moindre doute, on demandera un dosage des anticorps antinucléaires et des hormones thyroïdiennes. La biopsie cutanée, avec examen histologique et en immunofluorescence, n'est indiquée que lorsqu'on soupçonne une vascularite urticarienne.

Traitement :

          -         Traitements symptomatiques : les antihistaminiques H1 présentent avant tout un intérêt préventif ; ils doivent être prescrits per os à dose suffisante et de façon prolongée. Il faut proscrire formellement l'emploi des pommades anti-H1, car elles sont peu efficaces, et sont responsables d'eczémas de contact dans un nombre non négligeable de cas. L'Hypostamine® (inhibiteur de la synthèse de l'histamine) est peu utilisée ; elle doit être administrée de façon prolongée (plusieurs mois), et son efficacité est inconstante.

          Le Nalcron® (antidégranulant per os) pourraît présenter un certain intérêt dans les urticaires d'origine alimentaire.

Les antiinflammatoires non stéroïdiens (indométacine en particulier) sont réservés aux urticaires retardées à la pression.

L'indication des corticoïdes par voie générale est limitée aux angio-oedèmes avec localisations pharyngo-laryngées, aux urticaires avec manifestations anaphylactiques sévères, à la maladie sérique, aux formes sévères des vascularites urticariennes, et aux urticaires retardées à la pression résistant aux antiinflammatoires non stéroïdiens.

Enfin, les bêtastimulants sont indiqués sous forme d'adrénaline en spray (Dyspne-Inhal® : 1 à 2 bouffées) en cas d'oedème de Quincke laryngé, ou bien sous forme injectable (Adrénaline au 1/1000e du Codex : 0,25 à 1 ml en SC, IM ou IV lent) ou per os (solution aqueuse au 1/1000e), en cas d'urticaires s'accompagnant de manifestations anaphylactiques sévères.

          -         Traitement étiologique : lorsqu'une étiologie a été retrouvée, il est bien entendu indispensable (éviction d'un allergène, voire désensibilisation dans le cas des allergies aux venins d'hyménoptères ; traitement d'un foyer infectieux bactérien ou fongique, d'une parasitose, etc).

C - Allergie alimentaire

Introduction : sur la base des enquêtes effectuées par questionnaires, on estime que la prévalence de l'allergie alimentaire se situe entre 10 et 24 %, dans les pays occidentaux. Cependant, cette fréquence est certainement très surestimée ; en effet la fréquence des fausses allergies alimentaires, dues à des aliments histaminolibérateurs (alcool, fraises, crustacés, etc.) ou riches en amines vaso-actives ou de putréfaction (boissons et aliments fermentés, gibier, charcuterie, nombreux poissons, chocolat, etc.) est très élevée. De plus, certaines réactions attribuées aux aliments sont en réalité imputables à des additifs divers (colorants et conservateurs notamment), et, dans la plupart des cas, relèvent de mécanismes non immunologiques (activation vagale, inhibition de la cyclo-oxygénase, inactivation de l'histaminase, etc.).

          Les manifestations d'allergie alimentaire liées à une HS immédiate sont les plus faciles à reconnaître dans la mesure où, dans la plupart des cas, les symptômes surviennent rapidement après l'ingestion du (des) aliment(s) déclenchant(s). Les symptômes peuvent être digestifs (oedème et prurit des lèvres et/ou de l'oro-pharynx, nausées et vomissements, diarrhée) ; le plus souvent, il s'agit de symptômes extradigestifs, généralement cutanés (urticaire et/ou oedème de Quincke, voire exacerbation de DA), parfois respiratoires (rhinite, asthme) ou plus généraux (malaise, choc). Les principaux aliments en cause sont le lait de vache, l'oeuf, l'arachide (cacahuète), les poissons et fruits de mer, et de nombreux légumes et fruits ; certains d'entre eux présentent une allergénicité croisée avec d'autres aliments, généralement de la même famille ou de familles voisines, ou avec des antigènes non alimentaires comme les pollens.

          Les allergies alimentaires d'apparition précoce (lait, soja, farine et oeuf, notamment), guérissent avant l'âge de 3 ou 4 ans dans environ les deux tiers des cas ; toutefois, elles reflètent l'existence d'un terrain atopique sévère, et évoluent très souvent vers une allergie respiratoire et/ou vers une allergie à d'autres aliments au cours des années suivantes. Par contre, les allergies alimentaires d'apparition plus tardive (viandes, poissons, crustacés et coquillages, fruits et légumes) ne guérissent que rarement, et le développement progressif d'une allergie à un nombre croissant d'aliments est courant.

          Les manifestations d'allergie alimentaire non liées aux IgE sont plus difficiles à diagnostiquer : il s'agit essentiellement de manifestations digestives (diarrhée pâteuse ou grumeleuse, ballonnements abdominaux), qui apparaissent avec retard après la consommation de l'aliment déclenchant, et présentent un caractère subaigu ou chronique, susceptible d'évoluer vers une malnutrition et un retard de croissance lorsque l'aliment continue à être consommé. Les deux principales affections en cause sont la gastroentéropathie "aiguë" au lait de vache ou de soja, et l'entéropathie au gluten (maladie coeliaque).

          En ce qui concerne le diagnostic de l'allergie alimentaire, deux situations sont possibles :

          -         le diagnostic est (pratiquement) évident : c'est le cas dans la plupart des allergies liées à une HSI, où les manifestations cliniques surviennent en général rapidement après l'ingestion de l'aliment déclenchant, le plus souvent identifié par le malade lui-même ou son entourage, et où le bilan diagnostique (TC à lecture immédiate, effectués avec des extraits allergéniques ou les aliments frais ; RASTs ; épreuves d'exclusion-réintroduction et tests de provocation labial ou oral, éventuellement) ne sert généralement qu'à confirmer le diagnostic ;

          -         le diagnostic est complexe (alimentation diversifiée, retard d'apparition des symptômes, variabilité des troubles d'une fois à l'autre, etc.) : dans ce cas, l'identification du (des) aliment(s) ou additif(s) en cause repose sur une enquête "policière" comportant : un interrogatoire soigneux, éventuellement orienté par les données fournies par un journal alimentaire ; des épreuves d'exclusion-réintroduction, à partir d'un régime hypoallergénique de base, les autres aliments étant réintroduits un par un tous les 3 à 4 jours ; des tests de provocation per os, de préférence en double-aveugle contre placebo, sur la base des renseignements fournis par l'interrogatoire, le journal alimentaire, et les épreuves d'exclusion-réintroduction. Ces tests de provocation ne peuvent être effectués qu'en milieu hospitalier, et sont en principe contre-indiqués chez les malades ayant présenté des réactions anaphylactiques ou anaphylactoïdes sévères ; éventuellement, une biopsie jéjunale, à la recherche d'une éosinophilie de la muqueuse digestive (gastro-entérite à éosinophiles) ou d'une atrophie villositaire (entéropathie au gluten), et des tests in vitro, qui permettent d'explorer l'HSR (tests de prolifération lymphocytaire et d'inhibition de la migration leucocytaire) ou l'HS semi-retardée (recherche d'anticorps précipitants anti-aliments) ; ces derniers tests ne sont effectués que dans certains services très spécialisés, et ne sont pas applicables en pratique courante, d'autant que leur valeur diagnostique est loin d'être parfaite.

          La prévention des récidives repose sur :

                    -         l'éviction du (des) aliment(s) en cause ; cette mesure n'est pas toujours aisée à appliquer lorsqu'il s'agit d'allergènes susceptibles d'être retrouvés, sous forme masquée, dans d'autres aliments. Dans les allergies au lait de vache, ce dernier peut être remplacé par des hydrolysats poussés de caséines,, les hydrolysats de protéines, et le lait de soja ;

          -         le Nalcron® : dans l'ensemble, il donne de bons résultats et facilite la réintroduction, après une ou plusieurs année(s), du (des) aliment(s) non toléré(s) (lait, oeuf et farine, notamment). Toutefois, le Nalcron® n'est efficace que dans les allergies alimentaires liées à une HSI ;

          -         la désensibilisation/accoutumance : réalisée par voie buccale, en milieu hospitalier, et de façon très précautionneuse, elle a permis la réintroduction du lait de vache et de l'oeuf chez un certain nombre de malades. Pour les autres aliments, elle s'est jusqu'à présent révélée inefficace, voire dangereuse.

          La prévention générale de l'allergie alimentaire, quant à elle, est à réserver aux nouveau-nés et aux nourrissons à risque élevé (antécédents familiaux d'atopie, a fortiori d'allergie alimentaire ; taux élevé d'IgE dans le sang de cordon). Elle repose sur les trois mesures suivantes :

          -         l'éviction maternelle des aliments les plus allergisants pendant la fin de la grossesse et la période d'allaitement ;

          -         une prolongation de l'allaitement maternel jusqu'au 6e mois, si possible ; à défaut, on utilisera des laits hypoallergéniques, des préparations à base de soja, des hydrolysats de protéines ou de caséines ;

          -         enfin, un retard apporté à la diversification de l'alimentation sera repoussée (6e mois,) et une grande progressivité de cette diversification.

D -  Allergie aux venins d'hyménoptères

Introduction : en termes de sévérité, les réactions allergiques aux venins d’hyménoptères peuvent aller d’une réaction locale importante à une réaction généra-lisée sévère, parfois mortelle, en passant par des réac-tions systémiques bénignes (cutanées pures) et modé-rées (urticaires et/ou angio-oedèmes associés à des signes généraux, mais spontanément résolutives).

          La prévention des récidives repose essentiellement sur la DS, dont les indications sont déterminées par :

          -         les résultats du bilan allergologique (TC à lecture immédiate ± RASTs), qui doit être franchement positif : en règle générale, le bilan est considéré comme positif lorsqu’il existe un TC positif jusqu’à 1 mcg/ml en IDR, et lorsque le dosage des IgE sériques spécifiques est positif (supérieur à 0,70 PRU/ml pour le RAST). Certaines équipes effectuent également des tests de provocation réalistes, mais leur valeur diagnostique et prédictive, et leur caractère éthique, sont controversés ;

          -         la nature et la sévérité de la réaction initiale sont des facteurs importants à prendre en compte, car la fréquence et la sévérité des récidives augmentent avec la sévérité de la réaction initiale : chez les adultes dont le bilan allergologique est positif, la DS est indiquée dans les réactions généralisées sévères (stades III et IV de la classification de Mueller) ; les réactions systémiques modérées, et notamment les urticaires et angio-oedèmes sans extension laryngée, représentent une contre-indication relative, la DS n'étant envisagée que lorsqu’il existe des facteurs de risque associés (exposition importante, atopie, maladie cardio-vasculaire et/ou broncho-pulmonaire, traitement anti-hypertenseur au long cours). Les autres réactions (locales pures, même importantes ; systémiques mineures et atypiques), et les patients dont les TC et/ou les RASTs sont négatifs, ne représentent pas une bonne indication de la désensibilisation ;

          -         en ce qui concerne les facteurs de risque associés, l'âge du patient est important à prendre en compte dans la décision de désensibiliser ou non : en effet, la majorité des réactions et des récidives sévères surviennent chez l'adulte, et notamment chez le sujet âgé ; par contre, chez l'enfant, il existe une tendance marquée à la "guérison" spontanée, en quelques mois ou années. Les maladies chroniques sévères, cardiovasculaires et/ou bronchopulmonaires, et les traitements antihypertenseurs au long cours, représentent un important facteur de sévérité des réactions allergiques aux venins d’hyménoptères, les deux tiers ou les trois quarts des décès par choc anaphylactique survenant chez des patients ayant de tels antécédents. Le rôle de l’atopie en tant que facteur prédisposant à l’allergie aux venins d’hyménoptères est discuté ; il semble, toutefois, que l'atopie représente un certain facteur de risque, au moins pour les réactions sévères. Enfin, parmi les autres facteurs de risque, on peut retenir le risque d'exposition (apiculteurs et familles d'apiculteurs, notamment) et, peut-être, le sexe (M).

          Lorsque la DS a été décidée, son efficacité est jugée sur une association plus ou moins complète de plusieurs critères : tolérance des injections de venin ; diminution de la réactivité cutanée, voire négativation des TC (25 à 75 % des cas, selon les séries) ; modifications des taux des IgE et IgG(4) spécifiques ; enfin, importance des réactions aux repiqûres accidentelles, voire même, pour certains auteurs, aux TP réalistes. L'arrêt de la DS est généralement décidé sur plusieurs paramètres : une association plus ou moins complète des critères d'efficacité, une durée suffisamment longue de la DS (3 ans au minimum), et une dose cumulée de venin injectée de plusieurs milliers de microgrammes.

E - Allergies aux médicaments et substances biologiques

Introduction : les patients qui rapportent des réactions susceptibles d'évoquer une allergie aux médicaments et substances biologiques (vaccins, sérums, produits de contraste radiologiques, etc.) sont nombreux ; la fréquence de ces réactions augmente avec l'âge (moins de 10 % avant 20 ans, et jusqu'à 35 % après 60 ans), et est directement liée au nombre de traitements et de médicaments prescrits.

          Les médicaments les plus fréquemment en cause sont les antibiotiques (ATB) (plus de 50 % des cas), et surtout les bêtalactamines, les sulfamides anti-infectieux (10 à 20 %) et les médicaments appartenant au grand groupe des antipyrétiques-antalgiques-aspirine et autres anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS : 20 %) ; mais de multiples autres médicaments et substances biologiques peuvent être responsables de réactions, parfois sévères, tels les anesthésiques généraux, et surtout les curarisants (ou myorelaxants), le latex, les produits de contraste, les anticoagulants, les hormones, les enzymes, les vaccins et sérums, etc.

          Il faut cependant souligner plusieurs notions importantes :

          -         certaines réactions ressemblant à une réaction allergique sont liées à une action pharmacologique du médicament : c'est notamment le cas de la plupart des réactions à l'aspirine et aux autres AINS, aux anesthésiques locaux et à certains anesthésiques généraux (hypnotiques, narcotiques) ;

          -         en particulier chez l'enfant et, à un moindre degré, chez l'adulte, de nombreuses réactions d'aspect allergique sont la conséquence d’infections ayant motivé la prescription de médicaments (ATB, sulfamides, antipyrétiques et AINS), et ne sont pas liées à une allergie médicamenteuse ;

          -         enfin, environ 1 % des réactions évoquant une allergie médicamenteuse sont liées à des additifs présents dans certaines formes médicamenteuses, mais pas à la molécule de médicament elle-même.

                    Ainsi, 20 à 30 % seulement des réactions d'aspect allergique attribuées aux médicaments sont réellement liées à une hypersensibilité (HS) médicamenteuse. Selon une fréquence décroissante, les types d'HS en cause sont :

          -         les réactions d'HS immédiate, liées aux IgE (40 %) : les plus fréquentes sont les réactions cutanées (prurit, urticaire et/ou oedème de Quincke). Viennent ensuite les manifestations respiratoires (rhinite et/ou asthme), et, plus rarement, les réactions très sévères, à type de choc anaphylactique. Les médicaments responsables sont essentiellement les ATB (bêtalactamines surtout) ; viennent ensuite les myorelaxants et le latex, puis les sérums, les hormones , etc. ;

          -         les réactions d'HS retardée (près de 30 %), à type d'eczéma, de photodermatose (où le médicament devient allergisant par exposition aux rayons UV solaires), ou d’éruption maculo-papuleuse : les principaux médicaments responsables sont certains ATB et les sulfamides anti-infectieux, les neuroleptiques, antihistaminiques, anesthésiques locaux, et certains antiseptiques et désinfectants ;

          -         les réactions d'HS semi-retardée (2,5 %), avec, notamment, le phénomène d'Arthus, la maladie sérique, les vascularites aux sulfamides et ATB (bêtalactamines notamment), et certaines réactions (dites anaphylactoïdes) ressemblant à des réactions anaphylactiques, mais non liées aux IgE ;

          -         enfin, des réactions rares, dont les mécanismes sont encore mal connus : il s'agit des toxidermies (potentiellement) sévères (syndromes de Stevens-Johnson et de Lyell/nécro-épidermolyse toxique, surtout liés aux sulfamides, AINS, bêtalactamines et barbituriques), de la pustulose exanthématique aiguë généralisée (PEAG), et des pneumopathies "d'hypersensibilité", imputables à de très nombreux médicaments (immuno-suppresseurs et anticancéreux, ATB, sulfamides, cardiorégulateurs, etc.).

          Les médicaments peuvent aussi, mais rarement, être à l'origine de réactions d'HS un peu particulières, que l'on ne peut pas qualifier d'allergiques à proprement parler, et qui se traduisent par une cytopénie (diminution du nombre des cellules sanguines : hématies, leucocytes, plaquettes) ; les médicaments les plus souvent en cause sont les bêtalactamines, les régulateurs du rythme cardiaque, et les AINS.

                     Toute réaction suspecte doit être signalée au médecin qui, seul, pourra effectuer un diagnostic précis ou, à défaut, orienter le patient vers un allergologue bien rodé à ces problèmes. Là encore, il est important de souligner quelques notions importantes :

          -         le patient doit se souvenir des divers médicaments auxquels il a été exposé avant, pendant et après l'accident médicamenteux (y compris en cas d'auto-médication) ;

          -         chez les patients rapportant des réactions répétées à des médicaments de familles diverses, il faut éliminer une possible intolérance à des additifs par un examen comparatif des fiches signalétiques des médicaments non tolérés et tolérés, et, éventuellement, des TPO. Doit également être évoquée une intolérance aux antipyrétiques et AINS, souvent associés aux anti-infectieux, notamment chez l’enfant ;

          -         le diagnostic de certaines allergies médicamenteuses peut être fait grâce à des TC : les TC à lecture immédiate permettent d’explorer les réactions liées à des IgE pour certains ATB (bêtalactamines en particulier), diverses hormones, les vaccins, les myorelaxants, le latex, et certaines enzymes (chymopapaïne) ; les TC à lecture retardée, présentent une bonne valeur diagnostique et prédictive pour les eczémas de contact et les PEAG(patch-tests) et les photodermatoses (photopatch-tests ou phototests après ingestion du médicament). Par contre, les TC ne présentent aucune valeur dans les réactions liées à une intolérance au médicament ;

          -         les tests sanguins (dosage des anticorps anti-médicament, IgE notamment ; tests d'activation des basophiles sanguins, etc.) ne présentent généralement pas plus de valeur diagnostique que les TC, et ne sont qu'exceptionnellement nécessaires.

                    Mis à part le traitement immédiat, qui dépend de la nature et de la sévérité de la réaction, la prévention des récidives repose avant tout sur l'exclusion du médicament auquel le patient est allergique et des médicaments de la même famille ; en effet, il n'existe pas, à proprement parler, de méthodes de désensibilisation comparables à celles qui peuvent être pratiquées dans les allergies respiratoires ou aux venins d'hyménoptères. Ainsi, lorsque cela est possible, il faut recourir à des médicaments ou substances biologiques doués des mêmes propriétés, mais appartenant à des familles différentes.

          Toutefois, dans les rares cas où la réintroduction du médicament ou de la substance biologique est indispensable, elle peut parfois être effectuée à moindre risque par une méthode d'accoutumance, qui consiste à administrer, sous surveillance en milieu hospitalier, des doses tout d'abord très faibles, puis lentement croissantes, du médicament ; cette méthode s'applique avant tout aux réactions allergiques du type immédiat, et donc liées aux IgE, mais elle a aussi été utilisée avec un certain succès dans d'autres types de réactions, en particulier chez les patients intolérants à l'aspirine et aux AINS.

 

HYPERSENSIBILITE DE TYPE II (PAR ANTICORPS CYTOTOXIQUES)

 

I - Introduction

Les réactions d'hypersensibilité cytotoxique (ou HS de type II) sont dues à des anticorps (IgM, IgG) qui se fixent sur les antigènes de la membrane des cellules ou des tissus cibles, dont ils induisent la destruction en activant localement le système du complément. Les antigènes impliqués dans ces réactions d'hypersensibilité peuvent être constitutifs de la membrane cellulaire, comme dans le cas des cytopénies auto-immunes ou de la maladie hémolytique du nouveau-né, ou adsorbés sur cette membrane, comme, par exemple, dans le cas des anémies hémolytiques induites par la pénicilline et les céphalosporines.

          Deux mécanismes, qui agissent généralement en synergie, sont susceptibles d'expliquer la destruction des tissus ou des cellules cibles par les anticorps cytotoxiques :

          -         la formation du complexe lytique C5b-6,7,8,9, après que le système du complément ait été activé par la voie directe (ou classique) depuis le facteur C1. Les premiers signes de cytolyse apparaissent avant que le C9 n'ait été fixé et activé, le complexe C5b-6,7,8 induisant déjà une dépolymérisation de la membrane des cellules sur lesquelles il est fixé; la fixation additionnelle de six molécules de C9 sur la membrane cellulaire, à proximité immédiate du complexe C5b-6,7,8, induit la formation de "trous" dans la membrane, permettant ainsi une entrée massive d'eau et de sodium dans la cellule, alors que le potassium et les protéines intracellulaires en sont chassées;

          - la libération, dans le microenvironnement, de certains facteurs du complément activé (C5a notamment), qui exercent des effets chimiotactiques et activateurs (opsonisation) sur les cellules effectrices de l'immunité (polynucléaires neutrophiles et cellules monomacrophagiques notamment). Ces cellules se fixent alors, par leurs récepteurs pour le Fc des immunoglobulines et pour les facteurs C3b et C3d du complément, sur les cellules sensibilisées par les anticorps cytotoxiques et le complément, et les détruisent.

          Physiologiquement, les anticorps cytotoxiques jouent un rôle important dans certaines réactions de défense anti-infectieuse (bactéries, virus) et anti-tumorale. Les réactions d'HS cytotoxiques liées aux anticorps sont à l'origine des rejets accélérés (sur-aigus) d'allogreffe; elles sont également responsables d'affections pathologiques diverses, et notamment de certaines cytopénies d'origine médicamenteuse ou non, et de certaines maladies auto-immunes (syndrome de Goodpasture, pemphigus, pemphigoide bulleuse, etc...).

II - Réactions d’hypersensibilité de type II dues aux médicaments

                              Les réactions d'HS de type II dues aux médicaments sont à peu près les seules qui intéressent les allergologues, les autres réactions d'HS cytotoxique intéressant surtout les immunohématologistes (incompatibilité rhesus foetomaternelle, anémies hémolytiques post-transfusionnelles) ou des services spécialisés (maladies auto-immunes).

A - Manifestations hématologiques

Ce sont elles qui sont les plus fréquentes et les plus facilement identifiables. Elles se traduisent par une anémie, une leucopénie ou une thrombopénie, selon que les cellules sanguines détruites sont des hématies, des leucocytes ou des plaquettes.

1)          Les anémies hémolytiques 

Les anémies hémolytiques (AH) induites par les médicaments peuvent être classées en deux groupes distincts: les AH dues à des anticorps anti-médicament, et celles dues à des auto-anticorps.

          Les AH induites par la pénicilline et les céphalosporines représentent l'exemple-type des anémies hémolytiques liées à des anticorps anti-médicament. Elles s'observent chez des sujets ayant reçu des doses très importantes de pénicilline ou de céphalosporines. Certains métabolites de ces médicaments (radicaux penicilloil ou cephalosporoil) se fixent sur les hématies et, devenant ainsi immunogènes, induisent la synthèse d'anticorps cytotoxiques qui, en retour, viennent se fixer sur les radicaux penicilloil ou cephalosporoil adsorbés sur la membrane des hématies, dont ils induisent la lyse, soit en activant le complément, et/ou, surtout, en favorisant leur captation par les cellules réticulo-endothéliales du foie et de la rate (cf. Chap. Allergie médicamenteuse).

          Certains médicaments comme l'a-methyl-DOPA (Aldomet*) peuvent induire des anémies hémolytiques qui sont dues à des anticorps anti-érythrocytaires (IgM et IgG anti-D). L'origine de ces anticorps résulte de la modification des antigènes rhesus, induite par la fixation de l'Aldomet* sur la membrane érythrocytaire, les anticorps élaborés étant capables de réagir de façon croisée avec les antigènes rhesus natifs (normaux). Les AH induites par l'Aldomet* ne touchent qu'environ 1 p.cent des sujets traités; elles n'apparaîssent qu'après plusieurs mois de traitement, et persistent plusieurs semaines après l'arrèt du médicament, du fait de la persistance des anticorps dans la circulation sanguine (cf. Chap. Maladies auto-immunes).

2)          Les Thrombopénies 

L'exemple-type des thrombopénies immuno-allergiques d'origine médicamenteuse est le purpura au Sedormid* (médicament maintenant retiré du commerce), ainsi que certains purpuras induits par la quinine ou la quinidine, où les anticorps anti-médicament se fixent sur le médicament lui-même adsorbé sur la membrane plaquettaire.

          En revanche, les thrombopénies induites par la pénicilline seraient dues à des auto-anticorps dirigés contre certains antigènes de la membrane plaquettaire, modifiés par la pénicilline.

1.3.    Les leucopénies : la plupart (neutropénies notamment) n'ont pas une origine immuno-allergique ; cependant, certaines agranulocytoses et neutropénies pourraient être dues à des anticorps anti-médicament se fixant sur les médicaments (phenylbutazone, amidopyrine) eux-mêmes fixé sur la membrane des granulocytes.

          Si un mécanisme de type II explique bien certaines cytopénies d'origine médicamenteuse, bon nombre d'entre elles résultent de l'adsorption, sur la membrane des cellules sanguines, de complexes immuns constitués d'antigènes médicamenteux et d'anticorps anti-médicament activant le complément. Ce dernier mécanisme, qui se rapproche de l'HS de type III, a pu être impliqué dans les anémies hémolytiques induites par la rifampycine, dans les agranulocytoses induites par la céphalotine, et dans les thrombopénies induites par des médicaments divers (aspirine, céphalotine, digitoxine, rifampicine, sulfamethazine, etc...).

B - Manifestations diverses

la plupart des manifestations non hématologiques induites par les médicaments sont dues à des réactions d'HS des types I, III (par complexes immuns) ou IV (HS retardée). Certaines d'entre elles pourraient cependant être liées à une HS de type II: ainsi, certaines néphropathies intersticielles et tubulo-intersticielles induites par la pénicilline et les céphalosporines seraient dues à des anticorps anti-médicament venant se fixer sur les radicaux penicilloil ou cephalosporoil, eux-mêmes fixés sur certaines protéines du tissu rénal (membrane basale notamment).

          Nous ne reparlerons pas ici des purpuras induits par certains médicaments, dans la mesure où ils ne sont que l'expression cutanée d'une anomalie hématologique (voir plus haut). Certaines autres manifestations cutanées, comme les érythèmes pigmentés fixes à la phénolphtaléine, pourraient être liées à des anticorps anti-médicament venant se fixer sur le médicament, lui-même fixé au niveau de la peau.

          Enfin, on a détecté des anticorps anti-médicament dans le serum des patients atteints d'ictères cholostatiques induits par la chlorpromazine. Cependant, le rôle précis de ces anticorps est discuté ; en effet, il n'existe pas de corrélation entre leur taux sérique et la sévérité de l'atteinte hépatique.

III – Réactions d’HS de type II non liées aux médicaments

       A – Manifestations hématologiques

               1) Anémies hémolytiques

L'exemple-type de l'anémie due à des anticorps cytotoxiques est l'AH par incompatibilité rhesus foeto-maternelle. Au cours de cette maladie, la mère (Rh-) est immunisée, en fin de grossesse, par des hématies (Rh+) d'origine foetale; les anticorps ainsi produits sont tout d'abord des IgM, puis, lors d'une grossesse hétérospécifique ultérieure, des IgG qui traversent le placenta, et viennent se fixer sur les hématies du foetus, dont elles induisent la destruction.

          Des accidents comparables peuvent être observés à la suite de transfusions incompatibles. Ils surviennent généralement chez des polytransfusés ou des femmes multipares qui ont élaboré, à la suite de transfusions ou de grossesses hétérospécifiques antérieures, des anticorps irréguliers, qui sont responsables de la destruction des hématies transfusées. Les anticorps responsables de ces accidents sont, le plus souvent, des anticorps anti-D, mais il peut aussi s'agir d'anticorps d'une autre spécificité (anti-Kell, anti-C ou -c, anti-E ou -e, anti-Duffy, etc...). La prévention de ces accidents repose sur la recherche systématique de ces anticorps (agglutinines irrégulières) avant toute transfusion, chez les polytransfusés et les femmes multipares.

          Des anémies hémolytiques dues à des auto-anticorps anti-érythrocytaires sont parfois observées au cours ou au décours de certaines maladies virales, et au cours de certaines maladies auto-immunes comme le lupus érythémateux disséminé. La production de ces auto-anticorps anti-érythrocytaires résulte probablement de l'importante perturbation des mécanismes immunorégulateurs, induite par les infections virales ou associée aux maladies auto-immunes.

               2) Neutropénies

La plupart des granulopénies n'ont pas une origine immunologique. Cependant, des auto-anticorps induisant la destruction des polynucléaires neutrophiles ont pu être détectés chez des patients atteints de neutropénies primitives (idiopathiques), ainsi que chez des patients atteints de certaines maladies auto-immunes (lupus érythémateux disséminé, arthrite rhumatoide, etc...).

               1) Thrombopénies

Certaines thrombopénies non induites par des médicaments peuvent être attribuées à une HS du type II. Il s'agit du purpura thrombopénique idiopathique et des thrombopénies associées à certaines maladies auto-immunes comme le lupus érythémateux disséminé, malignes (leucémie lymphoide chronique, lymphomes) ou infectieuses (mononucléose infectieuse, maladies virales diverses). Ces diverses thrombopénies sont dues à des auto-anticorps anti-plaquettaires.

       B – Manifestations diverses (de type auto-immunes)

Le syndrome de Goodpasture, qui associe une atteinte rénale à une atteinte pulmonaire, est le seul type de glomérulonéphrite qui soit dû à des auto-anticorps spécifiques d'organe; en effet, les autres types de glomérulonéphrites sont, pour la plupart, dus à la formation de dépôts de complexes immuns le long de la membrane basale glomérulaire. L'atteinte pulmonaire associée au syndrome de Goodpasture résulte d'une réactivité croisée des anticorps anti-membrane basale glomérulaire avec la membrane basale pulmonaire.

          Le pemphigus et la pemphigoide bulleuse sont des maladies cutanées caractérisées par des lésions bulleuses de grande taille. Il s'agit de maladies auto-immunes qui sont dues à des auto-anticorps spécifiques de certains antigènes de la membrane basale dermo-épidermique (pemphigoide bulleuse) ou de la substance intersticielle de la peau (pemphigus).

          Le syndrome de Dressler est une atteinte cardiaque qui fait suite à un infarctus du myocarde, et qui est dû à des auto-anticorps anti-coeur. La production de ces anticorps résulte de la stimulation du système immunitaire par des antigènes cardiaques plus ou moins modifiés, dont la libération massive dans l'organisme s'effectue lors de l'accident coronarien.

          Des anticorps cytotoxiques spécifiques d'organe ont été également mis en évidence chez certains patients atteints de stérilités d'apparence primitive (auto-anticorps anti-spermatozoides, anti-placentaires ou anti-ovariens), de sclérose en plaques (auto-anticorps anti-protéine basique majeure de la myéline), de diabète insulinodépendant (auto-anticorps anti-cellules b pancréatiques), voire de rhumatisme articulaire aigu (auto-anticorps anti-coeur) (cf. Chapitres sur les maladies autoimmunes).

 

HYPERSENSIBILITE PAR COMPLEXES IMMUNS (HS DU TYPE III)

 

I – Introduction et généralités

A)          Définition et rôle physiologique

Les complexes immuns (ou immuns complexes : IC) sont constitués de la combinaison d'une ou de plusieurs molécule(s) d'antigène avec une ou plusieurs molécule(s) d'anticorps spécifiques.

          La formation d'IC dans l'organisme est un phénomène normal, qui contribue à la neutralisation et à la destruction physiologique des antigènes exogènes et des auto-antigènes dénaturés ou altérés, en facilitant leur phagocytose.

B)          Circonstances de la pathogénicité des immuns complexes

La présence d'IC ne préjuge donc pas de leur pathogénicité. C'est leur persistance dans la circulation ou/et les tissus qui risque de provoquer une réaction inflammatoire anormale. La pathologie qui en résulte, et qui constitue l'ensemble des phénomènes d'hypersensibilité du type III, correspond à des situations associant, à une réponse anticorps variable, une stimulation antigénique intense ou prolongée.

          L'antigène responsable peut provenir :

          -         soit de l'environnement

          -         soit d'une infection prolongée ou chronique ;

          -         soit de l'individu lui-même, d'où des relations étroites avec la pathologie auto-immunitaire.

C)Formation des IC

Les complexes immuns peuvent se former :

          -         soit avec un antigène introduit dans l'organisme ;

          -         soit avec un antigène tissulaire ;

          -         soit dans la circulation, où leur taille conditionne leur déplacement éventuel ;

          -         soit à la surface d'une cellule.

          Leur structure dépend des forces d'union entre antigène et anticorps, mais aussi de liaisons entre les fragments Fc d'un même isotype.

D)         Elimination des IC

Les IC sont normalement éliminés plus ou moins rapidement par les cellules mononucléées du foie, de la rate et des poumons. Leur taille conditionne pour une grande part cette élimination : les IC dont le poids moléculaire (PM) est supérieur à 1x106 D sont éliminés en quelques minutes par le foie. Les IC de petite taille peuvent circuler pendant de longues périodes et échapper à la phagocytose; mais ils risquent de se déposer, et de déclencher ainsi localement une réaction inflammatoire.

          La taille des IC est donc un des facteurs essentiels de leur pathogénicité.

II – Facteurs de pathogénicité des immuns complexes

A)          Rôle de la taille des IC (Fig. 1)

1 – Rapport antigène/anticorps

Le rapport dans lequel antigène et anticorps se trouvent en présence conditionne en grande partie la taille des IC : les immuns complexes de grande taille, formés en zone d'équivalence ou en zone d'excès d'anticorps avec des antigènes multivalents, sont généralement peu pathogènes, car aisément détruits par les cellules phagocytaires. Cependant, ils peuvent parfois former des dépôts intra-vasculaires, le long de la membrane basale (glomérulaire par exemple) ou dans certains tissus, et être à l'origine de manifestations pathologiques (phénomène d'Arthus, glomérulo-néphrites).

          Les immuns complexes de taille moyenne ou de petite taille, et notamment ceux de petite taille qui se forment en zone d'excès d'antigène, sont les plus pathogènes. En effet, ils circulent facilement (IC solubles), peuvent traverser les membranes basales, et former des dépôts extravasculaires au niveau des tissus (versant épithélial des glomérules rénaux par exemple). En outre, la localisation tissulaire de ces IC rend plus difficile leur destruction par les cellules phagocytaires. Enfin, les enzymes lysosomiales libérées par ces dernières ne peuvent pas être inactivées comme elles le seraient, dans le sang ou le liquide intersticiel, par des inhibiteurs sériques physiologiques.

2 – Affinité de l’anticorps pour l’antigène

L'affinité de l'anticorps pour l'antigène conditionne également la taille des IC. Plus elle est forte, plus l'IC risque d'être de grande taille. Enfin, des facteurs surajoutés peuvent aussi contribuer à augmenter la taille des IC : antiglobulines anti-isotypes ou anti-idiotypiques ; facteurs du complément (C1q, C3b, C4b) ; facteurs anti-complémentaires (immunoconglutinines anti-C3 ou C4, facteurs H et C4BP).

B)          Rôle des facteurs hémodynamiques

 

La formation de dépôts d'IC au niveau des tissus est favorisée par certains facteurs hémodynamiques :

1) régions de turbulences circulatoires : courbures et bifurcations des vaisseaux sanguins (capillaires rénaux et cutanés), valvules cardiaques, etc... ;

2) régions de pression sanguine élevée (rein) ;

3) régions de filtration (rein, plexus choroides, synoviale articulaire).

 

C)Rôle de l’activation du complément

 

Les dépôts d'IC activent le complément, soit par la voie directe (IC à IgM et à IgG), soit par la voie alterne (IC à IgA notamment) ; cette activation est un phénomène favorable, dans la mesure où la fixation des facteurs du complément (C1q, C3b et C4b) limite la croissance infinie des dépôts d'IC et favorise leur solubilisation. Mais elle a aussi pour conséquences d'induire :

1) une lyse des cellules du microenvironnement (activation jusqu'aux facteurs C8 et C9) ;

2) la production de facteurs biologiquement actifs (C kinines, anaphylatoxines, C3b, etc...), qui exercent d'importants effets pro-inflammatoires (cf. Fig. 2).

 

D)         Rôle de l’affinité tissulaire

 

Elle conditionne surtout la localisation des dépôts d'IC.

Affinité de certains antigènes : certains antigènes constitutifs des complexes immuns ont une affinité particulière pour certains tissus. Ainsi, l'ADN, qui entre dans la composition de la plupart des IC détectés chez les patients atteints de LED (lupus érythémateux disséminé), possède une forte affinité pour le collagène de la membrane basale glomérulaire, ce qui explique, entre autres, la fréquence élevée des atteintes rénales dans le LED.

Affinité de certains anticorps : certaines classes et sous-classes d'immunoglobulines se fixent plus aisément que d'autres au niveau des tissus ; ainsi, par exemple, les IC à IgG2a sont beaucoup plus pathogènes que les IC à IgM chez les souris NZB/NZW (BW). Ce phénomène s'explique probablement par le fait qu'il existe de nombreux récepteurs pour le Fc des IgG2a dans les tissus de ces souris.

E) Cryosolubilité

Cette propriété qu'ont certaines immunoglobulines et certains complexes immuns de précipiter au froid ( < 20° C), représente également un facteur responsable de la formation de dépôts d'IC au niveau de certains tissus comme la peau (syndrome de Raynaud).

III – Pathologies liées aux immuns complexes

       A – Le phénomène d’Arthus

Ce phénomène, décrit en 1903 chez le lapin (réaction inflammatoire locale liée à des injections répétées, par voie sous-cutanée, et toujours au même endroit, de protéines hétérologues) fut alors considéré à tort comme une forme particulière d'anaphylaxie locale, dans la mesure où, après la phase de sensibilisation initiale par voie locale, la réintroduction de l'antigène par voie veineuse induisait un choc mortel d'aspect anaphylactique. Ce n'est qu'ultérieurement que le phénomène d'Arthus fut attribué à une réaction d'HS du type III, sur la base des données fournies par les études histologiques et immunologiques.

1 – Etude expérimentale

Le phénomène d'Arthus est une réaction inflammatoire locale qui peut être induite par l'administration répétée (à raison d'une injection chaque semaine environ) d'une même substance à un même endroit de l'organisme. Il s'agit bien d'un phénomène immunologique, puisque :

          -         la substance injectée doit avoir les caractéristiques d'un antigène ;

          -         la réaction est spécifique, son déclenchement ne pouvant être obtenu que par la réinjection de l'antigène sensibilisant ;

          -         les premières injections, qui n'induisent aucune réaction visible, correspondent à la phase de sensibilisation, et induisent la production d'anticorps spécifiques (IgM, puis IgG) de l'antigène immunisant. Ces anticorps peuvent être détectés dans le serum par des méthodes de précipitation simples in vitro (Ouchterlony), et peuvent transférer passivement la sensibilisation à un animal non immunisé ;

          -         enfin, l'immunofluorescence directe permet de détecter, au niveau des lésions, des dépôts granuleux d'IC et de complément.

          Les aspects morphologiques du phénomène d'Arthus peuvent aisément être étudiés lorsque l'antigène est injecté itérativement au niveau de la peau, par voie intradermique (ID) ou sous-cutanée (SC): après la 2ème ou 3ème injection, se produit une réaction inflammatoire locale, tout d'abord transitoire et régressant après chaque injection, puis durable et caractérisée par de petites lésions hémorragiques.

          Enfin, vers la 7ème ou 8ème injection, on observe une nécrose, parfois longue à cicatriser.

          L'étude chronologique, anatomo-pathologique et histologique, permet de montrer que les lésions évoluent en plusieurs étapes :

          -         une phase initiale (premières heures suivant la réintroduction de l'antigène), caractérisée par la formation intravasculaire d'agrégats plaquettaires, associée à la formation de thromboses ;

-                 une phase ultérieure, pendant laquelle se constitue un infiltrat cellulaire riche en polynucléaires neutrophiles (PMNs), auxquels s'associent des cellules mononucléées, après la 24ème/48ème heure. Pendant cette phase, on observe également, le plus souvent, une prolongation des modifications vasculaires (agrégation plaquettaire, thromboses).

2 – Mécanisme des lésions (fig 3 et 4)

Lorsque l'antigène est injecté par voie locale, une faible quantité de cet antigène diffuse dans les vaisseaux sanguins avoisinants, où il se combine avec les anticorps spécifiques apparus à la suite des stimulations antigéniques précédentes. Il se forme alors localement des complexes immuns de grande taille (en excès d'anticorps) qui, lors des premières injections, restent dans la lumière vasculaire où ils sont aisément phagocytés; ceci explique le caractère initialement peu intense et transitoire de la réaction inflammatoire.

Lors des injections ultérieures, des immuns complexes de plus grande taille se bloquent dans les capillaires ; ces IC constitués d'IgM ou/et d'IgG vont activer le complément par la voie directe. La formation de C3b qui en résulte induit une agrégation et une activation des plaquettes, qui provoquent des thromboses localisées, et libèrent leur contenu en amines vasoactives (histamine chez le lapin).

D'autres facteurs (C4a, C2b) exercent des effets vasodilatateurs ou vasoperméabilisants directs.

D'autres enfin (C3a, C5a) induisent une dégranulation non spécifique des polynucléaires basophiles et des mastocytes; il s'ensuit une libération d'amines vaso-actives et de PAF-acether, ce dernier concourant à entretenir l'agrégation et l'activation plaquettaires. Le rôle joué par les mastocytes dans la pathogénie de ces réactions d'HS semi-retardée est étayé par les résultats d'études récentes menées chez les souris W/Wv (congénitalement dépourvues de mastocytes), chez lesquelles la formation des dépôts tissulaires de complexes immuns est significativement plus faible que chez les souris congéniques +/+ (possédant un nombre normal de mastocytes); de plus, une activation, par l'antigène, de basophiles préalablement sensibilisés par des IgE spécifiques formées, comme les IgM et les IgG, lors des premières injections de l'antigène, entraîne exactement les mêmes conséquences.

La conséquence immédiate de ces activations plus ou moins intriquées est une hyperperméabilité des capillaires où sont bloqués les complexes immuns. Ceux-ci peuvent alors facilement traverser la paroi de ces capillaires, et se déposer dans les tissus adjacents.

          Dans une seconde étape, qui résulte de l'activation continue du système du complément par les dépôts d'immuns complexes, se produisent les phénomènes suivants :

          -         la persistance des phénomènes vasculaires précédents (thromboses et augmentation de la perméabilité capillaire) ;

-                 l'attraction et l'activation, par le C3a et le C5a, des polynucléaires neutrophiles, qui libèrent leur contenu en enzymes lysosomiales toxiques dans le microenvironnement; ces polynucléaires neutrophiles libèrent également d'autres médiateurs (kallikréinogènes, PAF, leucotriènes, etc...), qui contribuent à entretenir la réaction inflammatoire locale. Ils parviendront toutefois, mais seulement au bout de plusieurs jours, à phagocyter les IC, d'où l'évolution favorable, mais parfois prolongée, du phénomène d'Arthus. Il est parfois possible d'observer, au sein de cet infiltrat cellulaire, un certain nombre de polynucléaires éosinophiles; attirées sur place par le C5a et par l'ECFA produit par les polynucléaires basophiles, ces cellules sont capables de phagocyter les complexes immuns, mais libèrent dans le microenvironnement des protéines basiques cytotoxiques. Quelques rares cellules monomacrophagiques peuvent parfois être aussi observées; elles participent au processus inflammatoire en libérant localement des médiateurs divers comme les leucotriènes, le PAF, des collagénases, etc...

3 – Le phénomène d’Arthus en pathologie humaine

Des réactions pathologiques dues à la formation locale de dépôts de complexes immuns peuvent être observées dans diverses circonstances, dans l'espèce humaine :

          -         injections répétées de substances antigéniques à un même endroit de l'organisme (ACTH, insuline de porc, sérums xénogéniques) ;

          -         rappels de vaccinations (antidiphtérique, antitétanique, antipoliomyélitique) chez des sujets hyperimmunisés ;

          -         enfin, et surtout, alvéolites "allergiques" extrinsèques : ces affections, anciennement appelées pneumopathies à précipitines, surviennent chez des sujets exposés de façon prolongée et/ou répétée à l'inhalation de certains antigènes organiques présents dans l'air ambiant. Il peut s'agir de moisissures du foin (maladie des poumons de fermier), d'antigènes (plumes, IgA secrétoires des défécations) d'origine aviaire (maladie des éleveurs d'oiseaux), et d'allergènes divers (champignonistes, fabricants de certains fromages, etc...). Sur le plan clinique et paraclinique, ces alvéolites se manifestent d'une façon à peu près stéréotypée : elles débutent par des épisodes aigus (pneumopathie aiguë fébrile, dyspnéisante et tussigène) qui surviennent 5 à 10 heures après l'exposition à l'allergène. Suit une phase subaiguë, caractérisée par une dyspnée qui tend à devenir permanente, spontanée et à l'effort, et qui s'accompagne de toux, parfois de douleurs thoraciques, et d'un état sub-fébrile, d'un amaigrissement et d'une altération de l'état général, tous signes susceptibles de faire évoquer une tuberculose ou un cancer broncho-pulmonaire. Il se développe ensuite une phase chronique, caractérisée par une insuffisance respiratoire chronique (fibrose) qui se complique, à terme, d'une insuffisance cardiaque chronique (coeur pulmonaire chronique). Au plan radiologique, on observe des anomalies variables, qui s'aggravent progressivement (syndrome intersticiel suivi de fibrose). Peuvent également être observés une atteinte pleurale (pleurésie, pneumothorax ou/et pneumomédiastin), des atélectasies, des infiltrats non systématisés et labiles (très évocateurs d'une étiologie aspergillaire). Les explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) révèlent l'existence d'un syndrome restrictif associé à une perturbation des échanges gazeux alvéolocapillaires; ces anomalies sont tout d'abord transitoires (pendant et au décours des crises), puis deviennent permanentes et de plus en plus marquées. L'étude immunohistologique des lésions (lorsqu'elle est effectuée) révèle des aspects tout à fait analogues à ceux décrits pour le phénomène d'Arthus: dépôts d'IC activant le complément; richesse de l'infiltrat en polynucléaires neutrophiles; nécrose, puis évolution fibreuse. Le diagnostic repose essentiellement sur la mise en évidence de précipitines (anticorps précipitants) spécifiques de l'allergène incriminé dans le serum et dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire. Enfin, en l'absence de traitement (qui doit être le plus précoce possible), elles évolueront vers une fibrose intersticielle progressive, et mortelle à plus ou moins long terme.

Il est certain que ces affections relèvent principalement d'une hypersensibilité de type III. Néanmoins, certains arguments permettent fortement de penser que participent aussi à leur pathogénie : des mécanismes dépendants des IgE (fréquente association à des réactions allergiques du type immédiat, respiratoires (asthme) ou non (urticaire) ; fréquente augmentation du taux des IgE sériques totales et spécifiques ; augmentation du nombre des mastocytes et de la concentration en histamine dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire; augmentation du nombre des macrophages alvéolaires FceR-II+, probablement sensibilisés par des IgE) ; une réaction d'hypersensibilité retardée, rendant compte de certaines réactions granulomateuses ; enfin, une activation de l'immunité non spécifique (système du complément, macrophages alvéolaires) par les antigènes incriminés.

B – La maladie sérique aiguë

1 – La maladie sérique aiguë chez l’homme

Cette affection survient généralement lors de la première administration d'un antigène dans l'organisme. Il s'agit le plus souvent de serums hétérologues (serums antitétanique, antidiphtérique ou antivenimeux d'origine animale), mais il peut aussi s'agir d'autres antigènes comme certains médicaments (béta-lactamines et sulfamides notamment).

Les symptômes de la maladie sérique aiguë apparaissent en général entre le 5ème et le 10ème jour qui suivent l'administration de l'antigène, et régressent spontanément après le 10ème/15ème jour. Dans les formes complètes, on observe:

          -         de la fièvre (généralement modérée);

          -         une protéinurie;

          -         une éruption cutanée (scarlatiniforme, morbilliforme ou urticarienne);

          -         des arthralgies (fréquentes et atteignant généralement plusieurs articulations);

          -         des adénopathies;

-                 parfois, des manifestations neurologiques (polynévrite) ou cardiovasculaires (thrombose coronarienne).

 

2 – La maladie sérique aiguë expérimentale

Pendant longtemps aucune interprétation satisfaisante ne put être donnée à la maladie sérique humaine, du fait de ses caractéristiques (survenue lors de la première administration de l'antigène, chronologie particulière), ne permettant de l'assimiler à aucune des manifestations d'hypersensibilité connues, humorales ou cellulaires. La compréhension des mécanismes immunologiques impliqués ne fut permise que tardivement, grâce aux études expérimentales menées chez l'animal (lapin) et pratiquées avec des antigènes radiomarqués dont on peut suivre le devenir dans l'organisme.

          a - Réalisation expérimentale : lors d'une première injection de sérum-albumine bovine (BSA) à forte dose (5 à 10 g) par voie intraveineuse, on observe l'apparition, entre les 9ème/10ème jours et les 15ème/20ème jours, de troubles très proches de ceux observés au cours de la maladie humaine:

          -         glomérulonéphrite aiguë avec protéinurie abondante ;

          -         légère augmentation de la pression artérielle ;

          -         atteinte myocardique, s'accompagnant parfois d'une insuffisance ventriculaire gauche ;

          -         manifestations vasculaires périphériques (artérite) inconstantes ;

          -         éruptions cutanées érythémateuses, particulièrement bien visibles chez les lapins blancs.

          L'étude de la courbe de disparition de la BSA radiomarquée (Iode 131) et de la courbe d'apparition des anticorps anti-BSA révèle les phénomènes suivants (cf. Fig. 5) :

-         dans un premier temps, une diminution rapide de la concentration plasmatique de l'antigène, due à sa répartition dans le secteur vasculaire ;

-         dans un second temps (entre le 2ème et le 7ème jour), on assiste à une diminution normale de la concentration plasmatique de l'antigène ;

-         enfin, pendant la 2ème semaine, c'est-à-dire pendant la période où se manifestent les troubles cliniques, on observe une cassure de la courbe qui correspond à une accélération de la vitesse de disparition de l'antigène, qui finit par ne plus être décelable dans le sérum. C'est alors, vers la fin de la 2ème semaine, que l'on peut mettre en évidence une brusque apparition des anticorps circulants spécifiques, dont le taux croît rapidement pour atteindre un plateau maximal vers le milieu de la 3ème semaine.

On ne peut ainsi jamais observer la présence simultanée, dans le sérum, de molécules libres d'antigène ni d'anticorps. En revanche, on peut détecter dans le sérum, mais surtout au niveau des tissus, des complexes immuns constitués de l'antigène administré et d'anticorps spécifiques. La période de détection de ces IC correspond à la période des troubles cliniques (du 9ème/10ème jour au 17ème/20ème jour).

On peut également mettre en évidence, pendant cette période, une baisse du taux du complément sérique, due à l'activation du complément par les dépôts d'IC; la présence d'IC activant le complément a bien été mise en évidence par immunofluorescence, au niveau des lésions caractérisant la maladie sérique aiguë. Ultérieurement, le taux du complément sérique se normalise progressivement après le 18ème/20ème jour.

          b - Mécanismes immunologiques : après son injection, l'antigène peut être détecté sous forme libre, dans le serum, pendant 5 à 7 jours environ, période pendant laquelle s'effectue la sensibilisation.

          Dès qu'ils apparaîssent, les anticorps spécifiques, élaborés en réponse à la stimulation antigénique, se combinent avec l'antigène, et forment des IC circulants de petite taille (en excès d'antigène); ces IC se déposent au niveau des tissus, où ils induisent des lésions par un mécanisme analogue à celui décrit pour le phénomène d'Arthus. C'est pendant cette période que se manifestent les symptômes de la maladie.

          Après le 12ème/15ème jour, toutes les molécules d'antigène se sont combinées sous forme de complexes immuns, et l'on observe alors une augmentation du taux des anticorps spécifiques libres dans le serum.

          Enfin, après le 15ème/20ème jour, tous les dépôts d'immuns complexes ont été détruits, et les symptômes régressent progressivement.

3 – Diagnostic

Le diagnostic d'une maladie sérique aiguë ou de ses équivalents repose donc sur :

          -         la symptômatologie évocatrice (nature des symptômes, guérison spontanée) ;

          -         l'interrogatoire, à la recherche d'une injection de serum hétérologue ou d'une prise de médicaments quelques jours avant l'apparition des troubles ;

          -         le dosage du complément hémolytique, dont le taux est significativement abaissé (consommation du complément au niveau des dépôts d'IC).

          Exceptionnellement, on pourra avoir recours à l'immunofluorescence directe (mise en évidence de dépôts granuleux d'IC et de complément, au niveau des lésions), à la recherche et au dosage, dans le serum, des IC circulants (voir plus loin), et à la recherche et au titrage, après le 15ème/20ème jour, d'anticorps précipitants spécifiques de l'antigène incriminé, dans le serum.

C – La maladie sérique chronique

Elle résulte de la formation continue de complexes immuns circulants, lorsque l'antigène est administré itérativement pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois, chez l'animal, en adaptant la dose à la réponse anticorps, de façon à maintenir une situation en "excès d'antigène". Les complexes immuns se localisent essentiellement au niveau du rein, où ils induisent une glomérulonéphrite durable, associée à un syndrome néphrotique (protéinurie, hypoprotidémie, hyperlipémie).

D – Autres maladies dues à des IC circulants

Chez l'animal : l'exemple-type des maladies dues à des complexes immuns circulants chez l'animal est la maladie auto-immune des souris NZB et BW (NZBxNZW), qui associe une anémie hémolytique auto-immune (par auto-anticorps anti-érythrocytaires) et une glomérulonéphrite due à des dépôts d'immuns complexes constitués d'auto-anticorps antinucléaires et de DNA.

Dans l'espèce humaine : de nombreuses maladies humaines résultent, au moins en partie, de la formation d'IC circulants se déposant au niveau des tissus :

-         les maladies auto-immunes diffuses (non organospécifiques), et notamment le LED et l'arthrite rhumatoide ;

-         certaines maladies infectieuses, virales (éruptions cutanées de la varicelle, de la rougeole, de la rubéole ; arthralgies et urticaire de l'hépatite B) ou bactériennes (glomérulonéphrites d'origine streptococcique, voire staphylococcique), voire mycobactériennes (lèpre) ou parasitaire. Dans tous ces cas, la pathologie liée aux complexes immuns n'est qu'un épiphénomène de la maladie causale.

          Dans de nombreux cas, on observe la formation d'IC, à laquelle il est impossible de rapporter une pathologie quelconque. D'autre part, des IC circulants peuvent être détectés chez des sujets parfaitement sains, et notamment chez les sujets âgés. Ces observations doivent donc susciter une grande prudence dans l'interprétation des méthodes de détection des immuns complexes et la signification des complexes immuns ainsi détectés.

          Le rôle des IC au cours de certaines maladies reste donc encore bien souvent incertain: ainsi, par exemple, on observe fréquemment des taux élevés d'IC circulants chez la plupart des patients cancéreux, ainsi qu'au cours de certaines leucémies. Il s'agit d'IC constitués d'antigènes tumoraux et d'anticorps spécifiques. Si ces immuns complexes sont bien, dans certains cas, le reflet de la réponse immunitaire de rejet des tumeurs, dans d'autres cas, ils paraissent plutôt être responsables d'une immunodépression préjudiciable.

IV – Méthodes de détection des immuns complexes

       A) Détection des IC circulants

Méthodes physiques : certaines d'entre elles sont basées sur le fait que les CIC ont un PM élevé (ultracentrifugation, précipitation sélective des IC par le polyéthylène-glycol ou PEG) ; les autres sont basées sur la propriété qu'ont certains immuns complexes de précipiter à basse température (< 20° C), alors qu'ils restent solubles à des températures plus élevées (cryo-précipitation).

Quelle que soit la méthode utilisée, il est possible de redissoudre le précipité ou le culot de centrifugation qui contient les complexes immuns, et d'y doser les immunoglobulines par la méthode de Mancini ou par radioimmunologie.

Méthodes biologiques : elles sont nombreuses. Les principales sont :

          -         la méthode de fixation sur du C1q, ou les IC se fixent sur du C1q, lui-même fixé sur un support, cette fixation pouvant être révélée par des antiglobulines radiomarquées ou combinées à une enzyme ;

          -         la méthode des cellules Raji : les cellules Raji sont des cellules lymphoblastoides qui possèdent des récepteurs pour le Fc des immunoglobulines et pour les facteurs C1q et C3 du complément. Les IC se fixent donc sur les cellules Raji par leurs fragments Fc, ainsi que par les facteurs d'origine complémentaire qu'ils ont fixés et activés in vivo. Ainsi fixés sur les cellules Raji, les complexes immuns circulants peuvent être révélés par des antiglobulines radiomarquées.

          Citons également:

          -         la méthode de l'agrégation plaquettaire: ce test est basé sur la propriété qu'ont les complexes immuns de se fixer sur les récepteurs pour le Fc des immunoglobulines présents sur la membrane des plaquettes;

          -         l'inhibition de la fixation d'anticorps radiomarqués sur les facteurs rhumatoides: les facteurs rhumatoides sont, pour l'essentiel, des IgM anti-IgG ayant une forte affinité pour les IgG. En se fixant sur ces facteurs rhumatoides, les IC à IgG inhibent la fixation d'IgG agrégées radiomarquées.

Valeur de ces méthodes : d'une façon générale, les diverses méthodes de détection et de dosage des complexes immuns circulants ont une faible valeur diagnostique, notamment parce qu'elles permettent également de détecter les agrégats d'immunoglobulines, et peuvent ainsi donner des résultats faussement positifs. D'ailleurs, le grand nombre de méthodes non spécifiques de détection des IC circulants est bien le reflet de leur faible valeur diagnostique.

          Seule la méthode de fixation sur du C1q échappe (en partie) à cette critique, du fait que le C1q se combine avec beaucoup plus d'affinité aux complexes immuns qu'aux agrégats d'immunoglobulines.

       B) Détection des dépôts d'IC

la détection des dépôts d'IC repose essentiellement sur l'immunofluorescence. La mise en évidence de dépôts d'immunoglobulines dans les tissus apporte des arguments en faveur de la présence de complexes immuns, surtout quand ces dépôts ont un aspect granuleux et quand ils sont associés à la présence de complément.

Cependant, l'immunofluorescence peut également mettre en évidence la présence d'auto-anticorps dirigés contre certains antigènes tissulaires. Enfin, elle peut parfois détecter des dépôts non spécifiques d'immunoglobulines.

       C) Méthodes spécifiques de détection des IC

il s'agit de méthodes d'identification d'IC dont l'antigène est connu ou suspecté, ou peut être aisément mis en évidence. Ces méthodes basées sur des techniques radio-immunologiques ou sur la microscopie électronique sont les seules qui aient une valeur diagnostique réelle; cependant, elles se heurtent à un certain nombre de difficultés, d'ordre technique notamment.

 

IMMUNITE A MEDIATION CELLULAIRE ET HYPERSENSIBILITE RETARDEE (HS DU TYPE IV)

 

I - Introduction

                    On peut parler indifféremment d'immunité à médiation cellulaire (IMC) ou d'hypersensibilité retardée (HSR), dans la mesure où l'HSR n'est que la manifestation pathologique des réponses immunitaires à médiation cellulaire, les mécanismes impliqués au cours des réponses IMC et des réactions d'HSR étant tout à fait identiques. En outre, la confusion entre les deux termes est accentuée par le fait que l'on parle couramment "d'allergie tuberculinique" pour exprimer l'existence d'une sensibilisation de type cellulaire tout à fait profitable à l'organisme, puisque susceptible de le protéger contre le risque d'infection par le bacille tuberculeux (voir plus loin).

          Les réactions immunitaires à médiation cellulaire jouent un rôle physiologique important dans la défense de l'organisme contre les infections par les microorganismes à développement intracellulaire (mycobactéries et virus notamment), et dans la résistance aux tumeurs. Les réactions d'HSR sont le principal type de réactions impliquées dans le rejet des allogreffes ; enfin, comme celà sera revu ultérieurement, les réactions d'HSR peuvent être à l'origine de certaines affections pathologiques comme les eczémas de contact, les allergies microbiennes et parasitaires, l'érythème noueux, voire certaines maladies auto-immunes.

          Trois grands types de réactions d'HSR ont été décrits : les réactions d'HSR "classiques" (de type tuberculinique), qui constituent le principal modèle d'étude des réactions d'HSR, et qui ont permis d'en déterminer les principaux critères ; les réactions d'HSR (cutanée) à basophiles, ou réactions de Jones-Mote, qui caractérisent notamment la phase de début des dermites de contact et les urticaires chroniques, et dont les mécanismes n'ont été élucidés que récemment ; les réactions d'HSR cytotoxique enfin, essentiellement impliquées dans les réactions de rejet d'allogreffe et de défense anti-virale et anti-tumorale.

II – La réaction d’HSR classique (de type tuberculinique)

A)   Aspects historiques: "l'allergie de la tuberculose"

1 – Le phénomène de Koch (1891)

Si, chez un cobaye ayant reçu une première injection de bacilles tuberculeux (BK) vivants par voie sous-cutanée (SC), on pratique, après un délai de quelques semaines, une seconde injection de BK par voie intradermique (ID), on observe, 24 à 48 heures après cette seconde injection, une réaction inflammatoire locale dont les aspects chronologiques et morphologiques (induration) contrastent avec ceux des autres réactions d'hypersensibilité.

          La réaction tardive ainsi induite évolue ultérieurement vers la nécrose, puis l'élimination de l'escarre, sans adénopathie régionale, ni dissémination bacillaire. Les BK réintroduits dans l'organisme sont en effet détruits et éliminés (immunité de surinfection) ; par contre, le cobaye meurt quelques semaines plus tard de sa primo-infection tuberculeuse.

2 – L’allergie tuberculinique

Le même type de réaction peut être observé si l'on injecte par voie ID, chez un cobaye préalablement sensibilisé par une injection de BK vivants, des produits obtenus à partir de filtrats de BK en culture (tuberculine). Si la tuberculine est injectée par voie intraveineuse (IV), on observe une réaction générale caractérisée par une hyperthermie transitoire, à la 24ème/48ème heure.

          Les tests cutanés à la tuberculine sont utilisés couramment chez l'homme pour détecter une sensibilisation préalable, résultant parfois d'une infection tuberculeuse, le plus souvent d'une vaccination par le BCG.

       B) Critères généraux de l'HSR

1 – Thymodépendance des réactions d’HSR

Les études in vivo ont permis de démontrer que les réponses immunitaires à médiation cellulaire et les réactions d'hypersensibilité retardée étaient très dépendantes du thymus et des lymphocytes T, et que les anticorps y jouaient un rôle négligeable. Ainsi :

          -         aucune anomalie de l'IMC ne peut être détectée chez les patients atteints de déficits purs de l'immunité humorale (a/hypogammaglobulinémies congénitales/héréditaires), non plus que chez les animaux bursectomisés à la naissance. En revanche, aucune sensibilisation de type cellulaire et aucune réaction d'HSR ne peuvent être obtenues chez les animaux ou les individus athymiques (souris nude ou thymectomisées à la naissance; syndrome de Di George) ;

-                 le transfert passif des sensibilisations de type cellulaire ne peut être réalisé que par des lymphocytes T provenant d'animaux préalablement sensibilisés de façon adéquate, et non par leur serum (anticorps).

2 – Conditions de la sensibilisation

 

          a - absence de prédisposition immunologique individuelle : sous réserve d'avoir été convenablement immunisé, n'importe quel animal ou individu peut développer une sensibilisation de type cellulaire, et présenter une réaction d'HSR lorsque l'antigène est réintroduit dans l'organisme.

          Ainsi, contrairement à ce qui se produit dans l'allergie immédiate, où il existe un terrain prédisposant (terrain atopique), l'HSR est un phénomène qui ne requiert aucune prédisposition immunologique particulière. Si, au cours des dermites de contact, l'HSR apparaît avec des délais variables et pour des expositions variables à l'antigène, les différences entre individus n'ont aucun support immunologique, et ne sont probablement dues qu'à des variations interindividuelles de la réactivité cutanée (possibilités de couplage entre les allergènes et les protéines cutanées; teneur de la peau en cellules de Langerhans, voire en mastocytes : cf. plus loin).

          b - nature des antigènes et conditions d'administration : expérimentalement, l'induction d'une sensibilisation de type cellulaire doit répondre à certaines règles :

          -         seuls les antigènes de PM élevé, ou dont le PM est augmenté par une combinaison spontanée, dans l'organisme, avec des molécules porteuses de PM élevé, sont susceptibles d'induire une sensibilisation de type cellulaire. Ainsi, certaines substances chimiques simples de faible PM (haptènes), comme le chrome ou le nickel présents dans la poudre de ciment et certains bijoux, sont capables d'induire une sensibilisation de type cellulaire et des réactions d'HSR (dermites des cimentiers, etc...), en se combinant avec les protéines et glycoprotéines de la peau.

          L'immunogénicité croît avec le PM des substances sensibilisantes: au maximum, les sensibilisations les plus fortes sont obtenues pour des antigènes exprimés sur la membrane des cellules vivantes : ainsi, une sensibilisation modérée peut être obtenue par l'administration de BK tués, alors que des BK vivants (ou du BCG) induisent une très forte sensibilisation. Cette particularité explique le rôle de l'IMC et des réactions d'HSR dans la défense de l'organisme contre les infections par les microorganismes à développement intracellulaire, contre le cancer, et dans les rejets d'allogreffe.

          -         les doses utilisées doivent être relativement faibles (les doses relativement fortes induisant préférenciellement une immunité humorale), tout du moins en ce qui concerne les antigènes protéiques, et les sensibilisations les plus fortes sont obtenues lorsque l'antigène est administré par voie intradermique ou sous-cutanée.

          -         enfin, les adjuvants renforcent considérablement les sensibilisations de type cellulaire a ainsi, si la tuberculine injectée seule est incapable d'induire une sensibilisation de type cellulaire, l'injection simultanée de cire ou d'adjuvants divers (adjuvant de Freund notamment) permet d'induire une immunité tuberculinique à peu près comparable à celle obtenue par l'injection de BK vivants, chez l'animal d'expérience.

          L'importance des facteurs adjuvants a également été mise en évidence au cours de certaines réactions pathologiques d'HSR, dans l'espèce humaine: ainsi, les rayons UV renforcent l'immunogénicité de nombreuses substances exogènes, en augmentant la combinaison de ces substances (haptènes) avec les protéines de l'organisme, et en stimulant la production de certains facteurs amplificateurs de la réponse immunitaire, comme l'IL-1 ou ETAF (dermites de contact). Les rayons UV sont par ailleurs capables de dévoiler l'immunogénicité de certains constituants propres à l'organisme (auto-antigènes), et d'induire ou de favoriser le développement de certaines maladies auto-immunes.

3 – Aspects des réactions d’HSR

                    -         aspects chronologiques : comme celà a déjà été évoqué, les réactions d'HSR se distinguent des autres réactions d'hypersensibilité par leurs aspects chronologiques. Lors de la réintroduction de l'antigène sensibilisant dans l'organisme, la réaction inflammatoire qui caractérise les réactions d'HSR débute à la 6ème/12ème heure seulement, et atteint son maximum à la 24ème/48ème heure, pour se résorber ensuite progressivement en quelques jours.

          Cependant, cette réaction tardive est souvent précédée par une réaction inflammatoire plus précoce (premières heures suivant la réintroduction de l'antigène), dont la signification sera discutée ultérieurement.

                    -         aspects morphologiques : alors que l'allergie immédiate est caractérisée par des lésions érythémateuses et oedémateuses, les réactions d'HSR se traduisent par un érythème induré qui, cependant, est parfois associé à une spongiose et à la formation de vésicules, comme dans le cas des eczémas de contact. Cette induration résulte de l'abondance en cellules dans l'infiltrat sous-jacent, et de l'épaississement de l'épiderme, lorsque la réaction d'HSR se produit au niveau de la peau (cf. ci-dessous).

                    -         aspects histologiques     : si, pendant les premières heures qui suivent la réintroduction de l'antigène dans l'organisme, on observe un infiltrat polymorphe contenant à la fois des cellules mononucléées et des polynucléaires neutrophiles (PMNs), voire des basophiles, les réactions d'HSR classiques sont caractérisées, à partir de la 12ème/24ème heure, par un infiltrat abondant, constitué exclusivement de cellules mononucléées.

          Ces cellules proviennent pour la plupart de la circulation sanguine, puis prolifèrent sur place, dans un second temps, comme le démontrent les résultats des études autoradiographiques. L'étude de leurs caractéristiques cytologiques (microscopie optique et électronique), histochimiques et antigéniques (antigènes de différenciation) a permis de montrer que l'infiltrat associé aux réactions d'HSR comportait environ 50 p.cent de lymphocytes T (lymphocytes T CD4+ essentiellement) et 50 p.cent de cellules de la lignée monomacrophagique ou de cellules apparentées (cellules de Langerhans, au niveau de la peau). Des lymphocytes B, en nombre variable, peuvent également être détectés au sein de cet infiltrat.

          Au niveau de la peau, cette infiltration cellulaire, qui est tout d'abord purement intradermique, gagne ensuite l'épiderme, où elle atteint son maximum entre la 24ème et la 72ème heures, avant de régresser très progressivement.

          Ainsi, les aspects histologiques des réactions d'HSR du type tuberculinique diffèrent fondamentalement de ceux qui peuvent être observés dans les réactions d'allergie immédiate, qui sont caractérisées par un oedème prédominant et par un infiltrat pauvre en cellules, et où prédominent les éosinophiles. Ils diffèrent également des aspects observés dans les réactions d'HS semi-retardée, qui sont caractérisées par un infiltrat où prédominent les polynucléaires neutrophiles.

4 – Difficultés de la désensibilisation spécifique

Comme cela sera revu plus loin, certaines allergies (microbiennes notamment) relèvent d'une HSR. Ces états pathologiques échappent généralement à la désensibilisation spécifique.

          Celle-ci a bien pu être réalisée expérimentalement chez l'animal (voir plus loin), mais, en règle générale, elle est imparfaite et transitoire; de plus, elle se heurte au risque d'exacerbation des manifestations allergiques, et donc à un risque d'aggravation de l'état des patients.

C) Mécanismes immunologiques des réactions d'HSR

1 – Phases de sensibilisation

Dans les jours qui suivent la première immunisation par un antigène, une certaine proportion des lymphocytes T prolifère (transformation lymphoblastique) au niveau de la région paracorticale des ganglions lymphatiques locorégionaux. Il s'agit de lymphocytes Th1 possédant des récepteurs spécifiques pour l'antigène, qui vont ainsi donner naissance à un plus grand nombre de lymphocytes T spécifiques (expansion clonale), et notamment à des lymphocytes Th1 mémoire à vie longue, qui pourront rapidement reconnaître l'antigène sensibilisant lorsqu'il sera introduit à nouveau dans l'organisme.

          L’activation de ces lymphocytes fait suite à la migration des cellules présentatrices d'antigène, du site de la stimulation antigénique vers les ganglions lymphatiques loco-régionaux, où ces cellules présentent l'antigène aux lymphocytes T.

          L'orientation de la réponse immunitaire, ainsi induite, vers une réponse du type Th1, résulte de la production simultanée d'IL-12 par les cellules présentatrices d'antigène. Le rôle déterminant de cette cytokine dans l'induction des sensibilisations de type cellulaire est étayé par les résultats d'études récentes diverses montrant que :

          -         chez les souris sensibilisées par des allergènes divers, l'injection d'IL-12 induit une réponse immunitaire à médiation cellulaire, alors que les anticorps anti-IL-12 inhibent le développement des réponses IMC ;

          -         in vitro, les cellules présentatrices d'antigène (cellules dendritiques) présentent des interactions membranaires avec les LyTh1 (mais pas avec les LyTh2), et produisent alors de l'IL-12.

3.2.    Déclenchement des réactions d'HSR : ce sont les études in vitro qui ont permis de comprendre les mécanismes immunologiques impliqués dans les réactions d'HSR, et de démontrer que ces réactions se déroulaient en deux phases distinctes, bien que partiellement intriquées: une phase inductrice/amplificatrice spécifique initiale, puis une phase effectrice non spécifique.

          Pendant la phase inductrice/amplificatrice initiale, qui peut être objectivée in vitro par le test de transformation lymphoblastique (TTL : voir plus loin), les lymphocytes Th1 mémoire spécifiques de l'antigène sensibilisant reconnaissent l'antigène qui leur est présenté par les cellules auxiliaires de l'immunité, et produisent de l'IL-2, qui contribue à recruter et à activer localement un plus grand nombre de lymphocytes T ; ces derniers prolifèrent et donnent naissance à de nouveaux lymphocytes T mémoire, d'une part, et à des lymphocytes T effecteurs, d'autre part.

          Pendant la phase effectrice, les lymphocytes T effecteurs, ainsi recrutés et activés, produisent des cytokines qui vont, à leur tour, recruter et activer des leucocytes d'origine sanguine. Les premières lymphokines synthétisées sont le LIF (facteur inhibant la migration des leucocytes) et le LAF (facteur activateur des leucocytes, et notamment des PMNs), ce qui explique l'afflux initial des polynucléaires neutrophiles, pendant les premières heures de la réaction d'HSR.

          Ultérieurement, les lymphocytes T effecteurs produisent des cytokines chimiotactiques et activatrices pour les cellules monomacrophagiques et les cellules apparentées, comme les cellules de Langerhans. Il s'agit notamment du MCP (macrophage-chemotactic protein-1), et du MIF/MAF (macrophage migration-inhibiting factor/macrophage-activating factor) ; le rôle joué par ces cytokines est étayé par les résultats des études expérimentales effectuées chez l'animal, et ayant montré que les injections d'anticorps anti-MCP-1 inhibaient l'expression des réactions cutanées d'HSR.

          La production de ces cytokines peut être objectivée in vitro par diverses méthodes, et notamment par le test d'inhibition de la migration leucocytaire ou TML (voir plus loin). Des études récentes ont permis de caractériser la nature biochimique (glycoprotéines) de ces cytokines, ainsi que certaines de leurs propriétés physiques (PM 22 500-55 000) et biologiques (activation des processus phagocytaires, bactéricides et tumoricides des macrophages, etc..). Les résultats de ces études permettent de penser que le MIF, le MAF et l'IFN-g ne sont qu'un seul et même facteur, ou des facteurs étroitement apparentés.

          Ainsi recrutées et activées localement, les diverses cellules de l'infiltrat, et notamment les cellules monomacrophagiques, vont détruire l'antigène et induire des lésions tissulaires, en libérant dans le microenvironnement certaines substances cytotoxiques (enzymes lysosomiales, anions peroxyde, eau oxygénée, etc...) et/ou en s'attaquant directement aux cellules sur lesquelles est fixé l'antigène.

          Enfin, certaines cytokines contribuent à stimuler la prolifération des kératinocytes, ce qui se traduit par un épaississement de l'épiderme, au niveau des réactions d'HSR cutanées, ou à stimuler, d'une façon plus générale, la réaction inflammatoire (IL-6).

D) Contrôle des réactions d'HSR

Les mécanismes immunologiques qui contribuent à inhiber les réponses IMC et les réactions d'HSR présentent certaines particularités qui permettent de les distinguer de ceux qui contrôlent les réponses anticorps et les réactions d'HS immédiate. Les cellules en cause sont :

d'une part, des lymphocytes T "suppresseurs" classiques, spécifiques de la fraction porteuse (carrier) de l'antigène, et non de ses déterminants hapténiques ;

d'autre part, les cellules monomacrophagiques, recrutées et activées sur le site de la réaction d'HSR : l'hypothèse selon laquelle la suppression des réponses IMC est essentiellement effectuée par ces cellules est étayée par le fait que, chez le cobaye, les injections de fortes quantités de MIF induisent une suppression de la réactivité immunologique de type retardé, en stimulant la production, par les macrophages, de facteurs retrouvés dans le sérum, et qui dépriment la production des cytokines par les lymphocytes T.

          Il s'agit, entre autres :

          -         de prostaglandines (PGE2) et de dérivés lipo-oxygénés de l'acide arachidonique (LTB4 et 15-HETE) ;

          -         de la chaîne p40 de l'IL-12, qui se comporte comme un antagoniste compétitif de l'IL-12, au niveau de ses récepteurs.

enfin, et surtout, les lymphocytes Th2, recrutés et activés secondairement : le rôle de ces cellules dans l'inhibition des réponses IMC et des réactions d'HSR est étayé par les résultats des études expérimentales et humaines ayant montré :

          -         une forte expression des cytokines du type Th2 (IL-4 et IL-10 notamment) sur le site des réactions d'HSR, à partir des 24e/36e heures ;

          -         une augmentation significative de l'expression des réactions cutanées d'HSR chez les souris déficientes en IL-10 ;

-                 les effets inhibiteurs de l'IL-10 sur la production in vitro d'IL-12 par les cellules présentatrices d'antigène, et les effets potentiateurs des anticorps anti-IL-10 sur la production d'IL-12, et sur le développement des réponses IMC et des réactions d'HSR in vivo.

E) Aspects particuliers des réactions d'HSR

1 – Rôle des polynucléaires neutrophiles

Les résultats de diverses études expérimentales, effectuées chez l'animal, permettent de suggérer que ces cellules pourraient moduler les réponses IMC et les réactions d'HSR, tantôt en produisant des cytokines inductrices/amplificatrices (IL-1 notamment), tantôt en produisant des médiateurs immunosuppresseurs et anti-inflammatoires (PGE2).

2 – Rôle des lymphocytes B

Un certain nombre de lymphocytes B peut être détecté au sein de l'infiltrat qui caractérise les réactions d'HSR. Le rôle précis de ces cellules n'est pas encore parfaitement clarifié ; néanmoins, il semble qu'elles pourraient participer activement à la phase inductrice/amplificatrice initiale des réactions d'HSR, en présentant l'antigène aux lymphocytes T, et/ou en produisant certains facteurs amplificateurs non spécifiques comme l'IL-1.

          D'autre part, certaines études ont permis de montrer que les lymphocytes B pouvaient jouer le rôle de cellules effectrices de l'HSR, en produisant des lymphokines comme le MIF et le MAF, ainsi que de la lymphotoxine, cytotoxique pour les cellules tumorales.

          Enfin, les résultats d'études diverses, dont certaines déjà anciennes, suggèrent fortement que les anticorps produits par les lymphocytes B pourraient moduler l'expression des réponses IMC et des réactions d'HSR (cf. infra).

3 – Effets modulateurs des anticorps sur les réaction d’HSR

Si, 15 jours à trois semaines après une sensibilisation de type cellulaire, on réintroduit l'antigène sensibilisant dans des conditions telles qu'il va stimuler essentiellement la production des anticorps (voie IV ou intrapéritonéale ; dose plus forte, en l'absence d'adjuvant), on observe une inhibition complète des possibilités de réponse immunitaire du type cellulaire. Cette inhibition (phénomène de split-tolerance) est due à des anticorps dont les effets suppresseurs sur l'IMC ont pu être confirmés par des expériences de transfert passif. Il s'agit d'IgG dont la nature et la spécificité ont pu être reconnues récemment:

          - certaines de ces IgG (IgG-2 notamment, chez la souris) sont spécifiques de l'antigène (id+), et activeraient des cellules suppressives (lymphocytes T, cellules monomacrophagiques), soit sous forme libre, soit sous forme de complexes immuns ;

          - les autres sont des anticorps anti-idiotypiques, qui pourraient activer des lymphocytes T suppresseurs spécifiques. La production de tels anticorps a été récemment mise en évidence chez des souris infectées par le BCG.

          Il apparaît ainsi que les anticorps sont capables d'exercer des effets suppresseurs sur les réponses IMC et les réactions d'HSR.

          Cependant, les immuns complexes (IC à IgM, à IgG-1 et à IgG-3, chez la souris), et des anticorps anti-idiotypiques, dont la production a été récemment détectée au cours de certaines réactions d'HSR, seraient également capables de renforcer la réactivité immunologique du type retardé, en inactivant les lymphocytes T suppresseurs impliqués dans le contrôle des réactions d'HSR, et en favorisant le recrutement et l'activation des lymphocytes Th1 spécifiques par l'antigène.

III - L'HSR de type cytotoxique

                              Les réactions d'HSR du type cytotoxique s'exercent généralement à l'encontre des antigènes portés sur la membrane de cellules vivantes, et, comme celà sera revu ultérieurement, jouent donc un rôle important dans les réactions de défense contre les infections virales, dans les réactions de rejet d'allogreffe et de défense anti-tumorale, ainsi que dans certaines maladies auto-immunes (hépatites, diabète insulinodépendant, encéphalite AI expérimentale, etc...).

          Les lymphocytes T sensibilisés et activés spécifiquement produisent des cytokines diverses, et notamment de l'IFN-g, qui induisent la génération de lymphocytes T cytotoxiques (CTL : cytotoxic T lymphocytes) capables de reconnaître spécifiquement les antigènes portés par les cellules étrangères (greffes) ou anormales (cellules infectées par des virus, cellules tumorales), et de détruire ces cellules.

          Histologiquement, l'infiltrat cellulaire qui caractérise les réactions d'HSR du type cytotoxique est donc essentiellement constitué de lymphocytes T qui, pour la moitié environ, sont du type helper/inducteur (Lyt-1+, chez la souris ; CD4+, dans l'espèce humaine), et, pour la moitié restante, du type cytotoxique (Lyt-2,3+, chez la souris ; CD8+, chez l'homme).

          Cependant, des cellules naturelles cytotoxiques (cellules NK ou natural killer) peuvent également être retrouvées au sein de cet infiltrat, notamment pendant les premiers jours de la réaction. Les résultats de certains travaux récents ont permis de démontrer que ces cellules n'étaient pas directement responsables de la destruction des cellules cibles, et permettent de penser qu'elles stimulent la génération et l'activation des CTL en produisant de l'IL-2 et de l'IFN-g.

IV - Réactions d'HSR à basophiles (et/ou à mastocytes)

A)          Aspects histologiques

Histologiquement, ces réactions sont caractérisées par un infiltrat comportant 50 à 60 p.cent de basophiles (ou de mastocytes), les autres cellules étant principalement des lymphocytes T helper.

               B)    Implications cliniques et expérimentales

Chez l'animal: des réactions d'HSR cutanée à basophiles (CBH : cutaneous basophil hypersensitivity) ont pu être induites expérimentalement chez le cobaye par l'injection, dans des conditions très précises (voie épicutanée, dose faible, administration simultanée d'adjuvant), d'antigènes de nature protéique.

          Des réactions similaires, mais où prédominent les mastocytes, sont observées au cours de certaines maladies auto-immunes comme l'uvéite AI induite chez le rat.

Dans l'espèce humaine : des réactions ressemblant étroitement aux réactions de CBH décrites chez l'animal sont observées en clinique humaine pendant la phase de début des dermites (eczémas) de contact et certaines urticaires chroniques. Un infiltrat riche en mastocytes et en lymphocytes T est observé dans certaines réactions de rejet d'allogreffe et de défense anti-tumorale, dans certaines maladies auto-immunes (arthrite rhumatoide) et dans certaines réactions du greffon contre l'hôte.

C) Mécanismes immunologiques

Ce sont les études expérimentales in vitro qui ont permis de comprendre les mécanismes intimes impliqués dans ces réactions d'HSR un peu particulières, au cours desquelles les lymphocytes Th1 spécifiquement activés par l'antigène libèrent des cytokines qui contribuent à recruter et à activer les basophiles ou les mastocytes au niveau de la réaction d'HSR (GM-CSF, IL-3 et IL-4, notamment).

D) Fonctions des basophiles et des mastocytes

Le rôle joué par ces cellules dans les réactions d'HSR a pu être démontré grâce aux travaux menés depuis plusieurs années, notamment chez les souris génétiquement dépourvues de mastocytes (W/Wv), chez qui la réaction inflammatoire précoce fait complètement défaut, et chez qui l'intensité de la réaction plus tardive est significativement diminuée, bien que ces résultats soient contestés par certains.

          De plus, les antihistaminiques H1 (cimétidine) et les anti-sérotonine (methysergide, kétansérine) inhibent de façon significative l'expression des réactions d'HSR cutanées et pulmonaires chez l'animal.

Fonctions effectrices : les basophiles et les mastocytes, recrutés et activés par les mécanismes évoqués précédemment, libèrent localement des médiateurs vaso-actifs et pro-inflammatoires (histamine, sérotonine, etc...). Cette libération s'effectue par vagues successives, dont la première (entre la 1ère et la 6ème heure) correspond à la phase précoce de la réaction ; la seconde se situe aux alentours de la 24ème heure, et la dernière peu avant la 48ème heure. Les médiateurs ainsi libérés, notamment au cours des deux premières vagues, induisent une augmentation de la perméabilité capillaire qui favorise l'afflux local des lymphocytes T et des basophiles ou des mastocytes, eux-mêmes engagés dans la réaction d'HSR.

          En outre, l'augmentation de la perméabilité capillaire induite par ces médiateurs est probablement responsable de la spongiose et de la formation des vésicules, dans les eczémas de contact et les urticaires chroniques.

          Par ailleurs, les mastocytes et, à un moindre degré, les basophiles, sont doués de propriétés phagocytaires et cytotoxiques , et, à ce titre, pourraient jouer un rôle analogue à celui joué par les cellules monomacrophagiques au cours des réactions d'HSR classiques.

Fonctions immunomodulatrices : il semble bien, également, que les mastocytes et les basophiles engagés dans les réactions d'HSR jouent un rôle modulateur sur l'expression de ces réactions.

          Les résultats d'études réce,tes ont montré que, in vitro, les mastocytes murins en culture pouvaient présenter des antigènes divers aux lymphocytes T ; il se pourrait donc qu'il en soit de même in vivo, d'autant que les mastocytes produisent également des cytokines immunostimulantes diverses, et notamment de l'IL-1. Par ailleurs, l'histamine libérée par les mastocytes et les basophiles pourrait activer des lymphocytes T "contrasuppresseurs" (effets de type H1), et, par là-même, amplifier la réponse IMC.

          D'autre part, les mastocytes et les basophiles pourraient également jouer un rôle modérateur sur l'expression des réactions d'HSR, en produisant, après la 48ème heure, certains médiateurs doués de propriétés immunodépressives et anti-inflammatoires , comme les prostaglandines (PGE2), le LTB4, l'histamine (effets H2) et la sérotonine.

V - IMC, HSR et pathologies

                              Des déficits de l'IMC sont observés fréquemment en pathologie courante; les caractéristiques propres à ces déficits ont déjà été évoqués ou le seront dans d'autres chapitres, et l'on se bornera ici à étudier les maladies qui résultent d'une sensibilisation de type cellulaire et de réactions d'HSR (à l'exception des maladies auto-immunes).

A)          Les dermites (eczémas) de contact

ces affections cutanées sont déclenchées par le contact répété de la peau avec des substances le plus souvent non immunogéniques (haptènes), mais qui acquièrent leur pouvoir sensibilisant et déclenchant en se combinant avec des macromolécules de la peau. Ces substances sont extrèmement variées, et très répandues dans l'environnement, professionnel ou non : il peut s'agit de médicaments (pénicilline par exemple), de substances chimiques, minérales (nickel, chrome présents dans la poudre de ciment et certains bijoux ou accessoires vestimentaires), ou végétales (sèves d'arbres, primevère, etc...).

          Cliniquement, s'associent érythème, vésiculation et prurit, dans les formes aiguës. L'aspect histologique des lésions est caractérisé par une vésicule creusée en plein épiderme, et par un infiltrat dermo-épidermique, tout d'abord riche en cellules mononucléées et en basophiles (réaction de CBH), puis qui évolue progressivement pour prendre l'aspect d'une réaction d'HSR classique (infiltrat mononucléé constitué de lymphocytes T, de cellules monomacrophagiques et de cellules de Langerhans).

               B) Maladies diverses

Les urticaires chroniques : il s'agit d'urticaires récidivantes, dont chaque épisode est caractérisé par une durée anormale (plusieurs semaines parfois), et dont l'étiologie reste le plus souvent obscure.

          Les biopsies révèlent la présence de lymphocytes T (CD4+) et de nombreux basophiles ou mastocytes. La concentration de la peau en histamine est augmentée. Ces aspects permettent donc d'assimiler, au moins dans une certaine mesure, les réactions d'urticaire chronique à des réactions d'HSR cutanée à basophiles/mastocytes.

Les allergies microbiennes, mycobactériennes et fungiques : la plupart des allergies microbiennes (streptocoque notamment), mycobactériennes (BK et tuberculine) et fungiques (Candida albicans) se traduisent par des manifestations d'HSR cutanées (érythème noueux, érésypèle, acné pustuleuse ou rosacée, certaines urticaires et oedème de Quincke, eczéma), oculaires (uvéites et conjonctivites chroniques; atteintes rétiniennes parfois), et articulaires.

          Comme celà a déjà été évoqué plus haut, elles ne relèvent pas, en principe, de la désensibilisation spécifique.

Allergies médicamenteuses : certaines réactions allergiques aux médicaments correspondent à une réaction d'HSR. Il s'agit notamment des eczémas de contact ou par ingestion (anesthésiques locaux; antiseptiques locaux contenant des ammoniums quaternaires; b-lactamines; sulfamides; néomycine; antihistaminiques H1) et des réactions de photosensibilité (photodermatoses dues à l'acide nalidixique, aux tétracyclines, aux phénothiazines et à la chlorpromazine, etc...).

               C) Relations entre HSR et allergie immédiate

Introduction (arguments fournis par la dermatite atopique) : l'existence de relations entre HSR et allergie immédiate a été évoquée depuis longtemps. En effet, la dermatite atopique (DA ou eczéma constitutionnel) est bien souvent la manifestation initiale d'une allergie immédiate ; les taux d'IgE sériques totales y sont généralement élevés ; les tests cutanés à lecture immédiate (prick-tests, IDR) et les RAST-IgE pour les allergènes courants (poussière et ses acariens ; trophallergènes divers ; pollens parfois) y sont fréquemment positifs ; enfin, dans plus de 30 p.cent des cas, se développent ultérieurement des manifestations d'allergie immédiate authentiques, respiratoires (rhinite, asthme) ou/et oculaires (conjonctivite, blépharoconjonctivite).

          Or, histologiquement, la DA est caractérisée par des lésions d'HSR typiques, comportant un nombre élevé de lymphocytes T (CD4+), de cellules monomacrophagiques et de cellules de Langerhans. D'autre part, une importante augmentation du nombre des mastocytes est couramment observée dans la peau des sujets atteints de DA, en particulier pendant les poussées aiguës et dans les formes chroniques lichénifiées.

          Le rôle joué par l'IMC dans la pathogénie de la DA est étayé par les résultats de certaines études in vitro, qui ont permis de démontrer que les réponses IMC dirigées contre certains (auto-)antigènes cutanés (cellules cutanées, sueur) étaient exacerbées chez les patients atteints de DA ; cette hyperréactivité résulte probablement d'un déficit fonctionnel des lymphocytes T suppresseurs impliqués dans le maintien de la tolérance pour les auto-antigènes, comme permettent de le suggérer les anomalies observées en culture lymphocytaire mixte autologue (AMLR : autologous mixed lymphocyte reaction). Enfin, comme celà sera revu plus loin, les tests cutanés à lecture retardée aux allergènes courants (pneumallergènes, trophallergènes) sont couramment positifs, non seulement en réponse immédiate (voir plus haut), mais aussi en lecture retardée (patch-tests, IDR).

          Paradoxalement, il existe, chez les sujets atteints de DA, un déficit de l'IMC dirigée contre les antigènes bactériens, mycobactériens (anergie ou hypoergie tuberculinique) et fungiques. L'origine de ce déficit n'est pas claire ; cependant, elle pourrait correspondre à une hyperactivation de certains lymphocytes T suppresseurs, soit par de l'histamine (effets H2), soit/et par des prostaglandines dont la production serait stimulée par des taux élevés d'immuns complexes circulants. Quoiqu'il en soit, ces divers déficits pourraient expliquer la sensibilité accrue des atopiques aux infections (virales et bactériennes notamment), ces infections pouvant par ailleurs déclencher ou exacerber les poussées de DA (cf. Chap. Allergie immédiate).

          Certaines autres observations, faites chez les patients atteints de manifestations allergiques du type immédiat, permettent également de confirmer l'existence de relations entre HSR et allergie immédiate : ainsi, on observe couramment un infiltrat riche en lymphocytes T (CD4+) durant la phase tardive des réactions d'allergie immédiate, ainsi qu'une augmentation significative de la proportion des lymphocytes T activés (lymphocytes CD4+ exprimant des antigènes d'histocompatibilité de classe II et des récepteurs pour l'IL-2) dans le sang des sujets atteints d'asthme sévère.

Rôle des cytokines dans l'expression des manifestations d'HS immédiate : comme celà a déjà été évoqué (cf. HSR à basophiles et/ou à mastocytes), certaines cytookines exercent des effets mitogéniques, chimiotactiques et activateurs sur les basophiles et les mastocytes.

          La production de ces cytokines a pu être obtenue en stimulant les lymphocytes de sujets normaux par des mitogènes non spécifiques (PHA, Con.A) ou par certains antigènes (streptokinase-streptodornase d'origine streptococcique; candidine; etc...), et les conditions de libération de ces cytokines permirent tout d'abord de suggérer qu'elles jouaient un rôle important dans les réactions d'HSR ( réactions de Jones-Mote notamment).

          Cependant, l'hypothèse selon laquelle elles pouvaient également participer activement aux réactions allergiques du type immédiat fut ultérieurement étayée par un certain nombre d'observations. Ainsi :

          -         in vitro, les cellules mononucléées sanguines des atopiques produisent des quantités anormalement élevées de cytokines stimulant la croissance et la différenciation des basophiles (IL-3 ; GM-CSF) ; soit spontanément, soit après stimulation par la PHA, les acariens ou certains antigènes bactériens, elles libèrent également des lymphokines exercant des effets histaminolibérateurs ou potentialisant la dégranulation IgE-dépendante des basophiles et des mastocytes (HRF, IL-2) ;

          -         in vivo, du HRF a pu être détecté localement, dans les réactions allergiques du type immédiat (rhinites entre autres), et le pic de production du HRF coincide avec le pic tardif de libération d'histamine ; cette production de HRF s'accompagne par ailleurs d'un déficit de la production du HRIF (histamine release-inhibitory factor), comme celà a été montré dans le liquide de lavage broncho-alvéolaire de patients asthmatiques. Ces anomalies sont dans l'ensemble assez bien corrélées avec la sévérité de la maladie (DA, asthme), et sont corrigées par la désensibilisation spécifique ;

          -         in vivo, le HRF induit une dégranulation des basophiles et des mastocytes, qui se traduit par une réaction urticarienne lorsqu'il est injecté par voie intradermique, ou par un bronchospasme lorsqu'il est administré par inhalation. Ces résultats confirment ceux de travaux antérieurs, qui avaient démontré que les surnageants de cultures de lymphocytes provenant de sujets asthmatiques étaient capables d'induire une réaction urticarienne, lorsqu'ils étaient administrés, par voie ID, à des sujets non allergiques.

Rôle des IgE dans l'HSR : on a démontré que les IgE pouvaient jouer un certain rôle dans les réactions d'HSR, notamment dans la dermatite atopique et dans les réactions d'HSR cutanée à basophiles.

          Ainsi, chez les sujets atteints de DA, des IgE sont fixées, par leur fragment Fc, sur la membrane des cellules de Langerhans et des autres cellules dendritiques de l'épiderme, essentiellement au niveau des lésions, mais aussi en peau saine. Il semble que ces anticorps favorisent la captation des allergènes de l'environnement (poussière et acariens, antigènes microbiens, voire pollens) par les cellules de Langerhans et les cellules dendritiques, et puissent ainsi induire ou exacerber la réaction d'HSR qui caractérise la dermatite atopique ; cette hypothèse est étayée par le fait que les poussées de DA sont fréquemment déclenchées ou aggravées par l'exposition aux allergènes et par les surinfections cutanées.

          On a également démontré que des IgE étaient fixées sur les mastocytes cutanés des patients atteints de DA et, chez l'animal, qu'elles pouvaient se fixer sur les basophiles infiltrant les réactions de CBH et sur les mastocytes présents dans certaines réactions de rejet de greffe ou de défense anti-tumorale (tumeurs expérimentales). In vitro, lors de l'exposition à l'antigène, ces IgE peuvent induire une dégranulation des basophiles et des mastocytes, qui libèrent alors des médiateurs chimiotactiques et activateurs pour les autres cellules impliquées dans la réaction d'HSR. Cette observation est à rapprocher du fait que, chez les sujets atteints de DA, les tests cutanés pratiqués avec des allergènes courants sont fréquement positifs, non seulement en lecture immédiate (10ème-15ème minute), mais aussi en lecture retardée (48ème-72ème heure).

          Les résultats d'une étude expérimentale récente ont confirmé que les IgE pouvaient jouer un rôle dans la pathogénie des réactions d'HSR, en démontrant que l'injection IV de faibles quantités d'IgE spécifiques (incapables à elles-seules d'initier une réaction d'HSI) était capable d'initier une réaction (cutanée) d'HSR chez des souris préalablement sensibilisées, et recevant par voie intradermique l'antigène correspondant.

IV – Méthodes d’étude de l'IMC/HSR

               A) Méthodes in vivo

Tests cutanés à lecture retardée : in vivo, la détection des sensibilisations de type cellulaire repose avant tout sur la pratique des tests cutanés à lecture retardée (lecture à la 48ème-72ème heure). On dispose de quatre types de tests :

          -         la cutiréaction, par scarification, imprécise et exposée à des erreurs par excès ou par défaut, et actuellement abandonnée ;

          -         la bague multipuncture (monotest), plus précise, mais parfois difficile à lire ;

          -         les intradermoréactions (IDR), qui consistent à injecter par voie ID 0,02 à 0,03 ml de la solution/suspension antigénique ; il s'agit du test de référence, à préférer dans tous les cas ;

          -         les tests épicutanés (épidermotests, patch-tests), utilisés pour le diagnostic des eczémas de contact : ils consistent à appliquer, sur la peau normale ou légèrement abrasée, l'antigène maintenu sous pansement occlusif pendant 48 heures.

          Ces tests sont considérés comme positifs si l'on constate, à la 48ème-72ème heure :

          -         en cas de cuti ou de bague multipuncture, une induration palpable de plus de 2 mm de diamètre ;

          -         en cas d'intradermoréaction, une induration palpable de plus de 5 ou 6 mm de diamètre ;

          -         en cas d'épidermotest, une réaction eczémateuse sur la surface d'application.

          La positivité du test permet d'affirmer qu'il existe bien une immunité à médiation cellulaire spécifique de l'antigène testé, mais elle ne permet généralement pas d'affirmer avec certitude (sauf pour les patch-tests, dans les eczémas de contact) que cette sensibilisation est responsable des symptômes observés. Aussi, la survenue d'une réaction syndromique (parfois d'amélioration, le plus souvent de déclenchement/aggravation des symptômes) vers la 48ème heure suivant l'administration de l'antigène est un argument de grande valeur pour le diagnostic étiologique des allergies (microbiennes notamment) de type retardé.

          Toutefois, la recherche d'une réaction syndromique est formellement contre-indiquée lorsqu'un organe vital est en jeu (atteinte des tuniques internes de l'oeil, tout particulièrement).

          Les tests cutanés à lecture retardée sont couramment utilisés pour l'étude :

          -         de la réactivité à la tuberculine (tests tuberculiniques) ;

          -         des allergies microbiennes, aux moisissures, aux champignons et aux levures, voire de certaines allergies parasitaires ;

          -         des eczémas de contact (patch-tests aux produits de beauté, substances terpéniques, métaux divers, cuirs, nylons, etc...) ;

          -         des déficits de l'IMC (tests à la tuberculine, à la candidine, au DNCB ou au DNFB). Dans ce cas, l'intradermoréaction à la PHA peut également être pratiquée, mais elle a une signification toute différente : la réaction inflammatoire locale observée ne correspond pas à une "allergie" à la PHA, mais à une prolifération et une activation locales des lymphocytes T; in vivo, elle réalise l'équivalent de la réponse in vitro à ce même mitogène (voir plus loin).

Tests de provocation : ils consistent à reproduire les symptômes d'HSR, en réintroduisant dans l'organisme l'antigène suspecté. On peut classer dans cette catégorie de tests les patch-tests utilisés pour le diagnostic étiologique des eczémas de contact, puisqu'ils visent à reproduire une lésion d'eczéma, en appliquant l'antigène directement sur la peau (voir plus haut).

          Les autres tests de provocation (par voie nasale, bronchique, digestive, voire oculaire), qui sont couramment utilisés pour le diagnostic étiologique des allergies de type immédiat, ont une place réduite dans l'exploration des HSR.

B)          Méthodes d'étude in vitro

in vitro, à part la numération des lymphocytes T et de leurs diverses sous-populations, l'exploration de l'IMC et de l'HSR repose essentiellement sur des tests fonctionnels. Il s'agit :

du test de transformation lymphoblastique, qui consiste à étudier, soit par méthode optique, soit par méthode radioisotopique (incorporation de thymidine tritiée), la réponse proliférative des lymphocytes T, après qu'ils aient été activés.

          L'exploration des états d'HSR repose sur l'étude de la réactivité des lymphocytes T aux antigènes spécifiques incriminés; lorsque l'antigène est ajouté au milieu de culture, les lymphocytes T helper/inducteurs préalablement sensibilisés in vivo reconnaissent alors l'antigène, et se transforment en lymphoblastes qui donnent naissance à de nouveaux lymphocytes. Cependant, l'interprétation de ce test est délicate, dans la mesure où un test positif signifie bien que le sujet est sensibilisé par l'antigène testé, mais ne permet pas d'affirmer que la sensibilisation ainsi détectée est à l'origine des symptômes.

          L'exploration des déficits de l'immunité cellulaire repose, quant à elle, sur l'étude de la réactivité lymphocytaire aux mitogènes (PHA, Con.A), en culture mixte lymphocytaire, et à certains antigènes courants (tuberculine ou PPD, candidine, streptokinase-streptodornase, etc...).

de tests objectivant indirectement la production de cytokines : activés par les antigènes ou les mitogènes, les lymphocytes T libèrent des cytokines dont la production peut être étudiée in vitro par diverses méthodes, parmi lesquelles :

                    - le test de la migration leucocytaire (TML), en un temps, où lymphocytes et leucocytes sont incubés en même temps en présence de l'antigène. Les cytokines produites par les lymphocytes T spécifiquement sensibilisés et activés (LIF, MIF) exercent alors leurs effets sur les leucocytes, dont elles inhibent la migration, dans une chambre en verre à fond plat ;

                    - le test d'inhibition de la migration des leucocytes (TIML) et le test d'inhibition de la migration des macrophages péritonéaux de cobaye (TIMMPC) : il s'agit de tests en deux temps, qui consistent à recueillir le surnageant de cultures lymphocytaires, et à tester l'activité inhibitrice de ce surnageant sur la migration des leucocytes humains (TIML) ou des macrophages péritonéaux de cobaye (TIMMPC) ;

                    - le test de l'agglutination leucocytaire, en un temps, qui consiste à incuber en même temps les leucocytes et les lymphocytes sanguins avec l'antigène. Comme dans le cas du TML, les lymphocytes T spécifiquement sensibilisés et activés produisent des cytokines (LAF, MAF) qui induisent une agglutination des leucocytes.

du test de cytotoxicité lymphocytaire (CMC : cell-mediated lympholysis) enfin, qui permet l'étude des propriétés fontionnelles des lymphocytes T cytotoxiques en présence de cellules allogéniques marquées par un radio-isotope.

 

Figure 1 : structure des IgE

 

           

 

Abréviations :

CL (domaine constant des chaînes légères)               VL (domaine variable des chaînes légères)

Ce (domaines constants des chaînes e)                      Ve (domaine constant des chaînes e)

FceRI (récepteur de forte affinité pour les IgE          FceRII (récepteur de faible affinité pour les IgE)

eBP/Mac-2 (e-binding protein)

 

Figure 2 : mécanismes régulant la synthèse des IgE

 

                                                                      

 


Figure 3 : conception classique de la réaction allergique du type immédiat

 

 

 

Abréviations : LTs (leucotriènes)                                         

                        PAF (platelet-activating factor)                                            

                        PGs (prostaglandines)

 

Figure 4 : conception actuelle de la phase tardive de la réaction allergique du type immédiat

           

 


Figure 5 : conceptions actuelles sur les anomalies immunologiques de l’atopie

 

 

 

Figure 6 : mécanismes immunologiques schématiques des réactions anaphylactiques et anaphylactoïdes

 


Figure 7 : anaphylaxie passive généralisée in vivo

 

 

Tableau I : gènes (possiblement) associés à l'atopie

 

                       

 

 

 

Tableau II : caractéristiques respectives des basophiles et des mastocytes séreux et muqueux chez l'homme

Caractéristiques

Basophiles

Mastocytes muqueux (T)

Mastocytes séreux (TC)

Localisation

 

essentiellement sanguine

 

muqueuses digestive et respiratoire

tissu conjonctif, sous-muqueuse respiratoire et digestive, péritoine

Origine

 

précurseurs médullaires de la lignée granulocytaire

précurseurs myéloïdes mononucléés localisés dans la moelle osseuse, les tissus périphériques, et le sang

Maturation et différenciation

 

T-dépendante

 

 

T-dépendante

(IL-3, IL-4, IL-10)

 

Facteurs micro-environnementaux (SCF)

 

Cytologie :

               -forme

               - diamètre               -noyau

               - membrane               granulations              

 

irrégulière

constant (10/15 m)

polylobé

régulière

grosses (1m environ)

métachromatiques (±)

 

ronde

variable (15/25 m)

rond

irrégulière

petites (0,1 à 0,5 m)

non métachrom/métachromatiques

Contenu des granules

-protéoglycans

-histamine              

-sérotonine            

-enz. lysosomiales

 

chondroitine sulfate

1pg/cellule

(traces)

(0 à ±)

 

chondroitine sulfate

1 pg/cellule

(traces)

tryptase

 

héparine sulfate

4 à 10 pg/cellule

(traces)

tryptase + chymase

Médiateurs

LTB4, LTC4PAF

LTB4, LTC4PAF

prostaglandines (PGD2)

FceRI (nb)

6 000 à 600 000 /cell.

               100 000 environ par cellule

Dégranulation :

-IgE-dépendante

-Ca-ionophore

-tachykinines (SP)

 

oui (+)

faible/nulle

faible/nulle

 

oui (++)

faible/nulle

faible/nulle

 

oui (+++)

oui (+++)

oui (+++)

Inhibiteurs :

-cromoglycate

-théophylline

-corticoïdes

-IFN-g

-b-adrénergiques

 

faible/nulle

faible/nulle

faible/nulle

faible/nulle

oui

 

faible/nulle

faible/nulle

faible/nulle

faible/nulle

oui

 

oui

oui

faible/nulle

oui

oui

 

 

Abréviations :

IL-3, 4, 10 (interleukines 3, 4, 10)                                                                           

            LTB4, C4 (leucotriènes B4, C4) ;

            PAF (platelet-activating factor)                                                                                                       

            PGD2 (prostaglandine D2)

            SCF (stem cell factor)


 

Tableau III : origine des principaux médiateurs de l'HSI

Médiateurs et enzymes

Intragranulaires (préformés)

Néoformés (synthétisés

Mastocytes

 

 

histamine, ECFA, NCFA

tryptase, chymase

 

PGD2, PGF2a, TXs

LTB4, LTC4, LTD4, LTE4

PAF

Basophiles

histamine, NCFA, ECFA

PGD2, PGF2a, TXs

Eosinophiles

et

autres cellules

MBP, ECP, EPO, EDN

 

 

PGD2, PGF2a, TXs

LTB4, LTC4, LTD4, LTE4

PAF

 

Abréviations :

            ECFA (eosinophil chemotactic factor of anaphylaxis)                                                                                                        

            ECP (eosinophil cationic protein)

            EDN (eosinophil-derived neurotoxin)                                                                                                                                                                                                                   

            EPO (eosinophil peroxydase)

            LT (leucotriènes)                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                             

            MBP (major basic protein)

            PAF (platelet-activating factor)                                                                                                                                                                                                                                                                

            PG (prostaglandines

            NCFA (neutrophil chemotactic factor of anaphylaxis)                                                                                                        

            TXs (thromboxanes)

 


 

Tableau IV : principales activités biologiques des médiateurs de l'HSI

Médiateurs

 

Effets sur

Vaisseaux                   Coeur              Muscle lisse    Epith. resp.         Leucocytes

 

Histamine

 

VD, PC

 

Cond. AV Ê

Rythme

Contraction

 

Mucus 

 

Chimiotactisme et activation

 

PAF

 

VD, PC

 

Arythmie

 

Contraction

 

 

 

Chimiotactisme et activation

 

PGF2a

PGD2

TXA2

 

VD, PC

 

 

 

 

Contraction

Contraction

Contraction

 

 

 

 

Chimiotactisme

Activation

 

LTB4

 

SRSA (LTC4, D4 et E4)

 

 

VD, PC

 

 

 

Contraction Ê

 

 

 

Contraction

 

 

 

Mucus

 

Chimiotactisme et activation

Activation (±)

 

 

Abréviations :

            Cond. AV (conduction auriculo-ventriculaire)                                                        

            LT (leucotriènes)

            PAF (platelet-activating factor)                                                                                                                                                      

            PC (perméabilité capillaire

            PG (prostaglandines)                                                                                                                                                                                                                     

            SRSA (slow-reacting substance of anaphylaxis)

            TX (thromboxanes)                                                                                                                                                                                                                                    

            VD (vasodilatation)

 



 

Tableau V : principales cytokines impliquées dans les réactions d’HSI

Cytokines

Principaux effets sur les cellules effectrices

IL-1

 

 

- cofacteur de différenciation des PNE

- potentialisation de l'histaminolibération

- augmentation de la production d'IL-4 par les LyTh2

IL-2

 

 

- production de facteurs éosinophilopoïétiques par les MNCs des asthmatiques

- chimiotactisme et activation des PNE

- potentialisation de l'histaminolibération

IL-3

 

 

 

- principal facteur de croissance des PNB et des mastocytes (muqueux)

- adhérence et activation des PNB et des mastocytes

- cofacteur de croissance des PNE

- augmentation de l'expression du CD 23 sur les mono-macrophages

IL-4

 

 

- cofacteur de croissance et différenciation des mastocytes

- cofacteur de croissance et différenciation des PNE

- adhérence des mastocytes

IL-5

 

- principal facteur de croissance et (pré)activation des PNE

- cofacteur de différenciation et activation des PNB et des mastoctes

IL-6

 

- chimiotactisme des PNE

- potentialisation de l'histaminolibération

IL-7

- préactivation des PNB et des mastocytes

IL-8

- chimiotactisme et activation des PNB et des mastocytes

IL-9

- cofacteur de différenciation des mastocytes

IL-10

 

- cofacteur de croissance des mastocytes

- augmentation de l'expression du CD 23 sur les mono-macrophages

GM-CSF

 

- chimiotactisme et activation des PNN, PNE et macrophages

- préactivation des PNB et des mastocytes

IFN-g

- cofacteur d'activation des mastocytes

TNF-a/b

- histaminolibération

 

 



 

Tableau VI : étude des réactions anaphylactiques induites par l'injection IV d'anticorps anti-IgE chez les souris WBB6F1 et WCB6F1 (Martin et al, 1989)

Souris

 

Rythme cardiaque

(variation en %)

Compliance dynamique

(variation en %)

Mortalité (%)

 

WBB6F1

                                    +/+

                                    W/Wv

 

+ 70 ± 15

non/peu modifié

 

 

 

- 20 ± 5

non/peu modifiée

 

 

 

50

0

 

 

WCB6F1

                                    +/+

                                    Sl/Sld

 

+ 45 ± 10

non/peu modifié

 

 

 

- 25 ± 5

non/peu modifiée

 

 

 

71

0

 

 

 

 


 

Tableau VII : caractères distinctifs des réactions allergiques du type immédiat, anaphylactiques,

et anaphylactoïdes

Réaction

 

 

Terrain prédisposant

 

Sensibilisation

Antérieure

 

Mécanisme :

Dégranulation

 

Manifestations cliniques

 

Allergique

 

 

oui (terrain

atopique)

 

nécessaire

 

 

dépendante des IgE

 

 

DA, urticaire

Rhinite, asthme

Conjonctivite

Anaphylactique

 

 

 

non

 

 

 

nécessaire

 

 

 

dépendante des IgE

 

 

 

Urticaire ± AO

± bronchospasme

± hypotension

± collapsus CV

Anaphylactoïde

 

 

 

non

 

 

 

nécessaire      

 

non

 

dépendante des

IgM et/ou IgG

directe

 

Urticaire ± AO

± bronchospasme

± hypotension

± collapsus CV

 

TABLEAU VIII : classification et chronologie des principaux pollens

Origine

Pollen

Période

Arbres

 

 

 

noisetier (coudrier), aulne, bouleau

peuplier, hètre, chène, érable, noyer

platane, maronnier (±)          

troène, tilleul

Février / Mars

Mars / Avril

Avril / Mai

Juin / Juillet

Graminées

fourragères

dactyle, phléole, paturin, agrostis,

cynodon, flouve, ivraie, houlque, fétuque

mi Mai-mi Juillet

 

Céréales

blé, orge, avoine, maïs

mi Mai -mi Juillet

Herbacées

 

 

 

plantain

armoise

pariétaire

ambrosia

Avril /Septembre

fin Juillet/Octobre

mi-Avril/mi-Oct.*

Sept.-Oct.**

*                      midi méditerranéen

**        vallée du Rhone, région lyonnaise, Le Havre, Amérique du Nord

 



TABLEAU IX : liste des aliments reconnus comme les plus allergisants

 

Protéines du lait de vache : b-lactoglobuline,  a-lactoglobuline, caséines, albumine

 

Protéines de l'oeuf : blanc  (ovalbumine,  conalbumine, ovomucoïde) >>> jaune

 

Poissons, crustacés, mollusques

 

Graines comestibles : cacahuètes,  amandes, noix, noisettes, etc...

 

Farines : blé, seigle, orge, soja, etc... >>> avoine

 

Nombreux fruits : agrumes  notamment (orange, pamplemousse, etc...), mais aussi les bananes et les pommes (surtout la peau), considérées classiquement comme hypoallergéniques. A noter que les fruits mûrs sont moins allergisants que les fruits verts, et qu'il existe une antigénicité croisée entre la pomme et certains pollens d'arbres (bouleau notamment)

 

Nombreux légumes : petits pois, pois chiches, haricots, lentilles, ail, céleri  (et sel de céleri)

 

Viandes : boeuf (antigénicité croisée evec le lait de vache) et veau >> porc >> poulet ; à noter que la viande de poulet est la moins allergisante

 


Figure 1 : méthode de dosage des IgE sériques totales (principe du PRIST)

 

 

 

Figure 2 : interprétation du dosage des IgE sériques totales

 

 

 


Figure 3 : principe des tests multiallergéniques non quantitatifs de dépistage in vitro

 


 

Figure 4 : principe des tests in vivo dans l’allergie immédiate

 

 

 

 

 


Figure 5 : principe des tests d’orientation par groupes d’allergènes in vitro

 

 

 

 

Table 1 : principaux tests in vitro d'orientation par groupes d'allergènes

Tests

Groupes d'allergènes étudiés

 

 

 

Stallerscreen

 

 

 

     5 acariens

     4 moisissures

     4 phanères

     3 plumes

     5 arbres (pollens)

     5 céréales (pollens)

     pollens de graminées + céréales + herbacées

 

 

RAST alimentaires

 

 

 

     Fx2 (produits de la mer)

     Fx5 (aliments courants de l'enfant)

     Fx7 (légumes)

     Fx8 (fruits courants)

     Fx9 (fruits exotiques)

     Fx10 (viandes)


 


Figure 6 : principe des tests multiallergéniques in vitro à réponse quantitative par allergène

 

 

 

 

Figure 7 : principe du (CAP) RAST

 

 


 

Tableau 2 : expression des résultats du CAP-RAST

Classes

Unités (PRU)

0

1

2

3

4

5

6

< 0,35

0,35 à 0,70

0,70 à 3,5

3,5 à 17,5

17,5 à 50

50 à 100

> 100


 

Figure 8 : principes des tests d’activation cellulaire in vitro

 

 

 


 

Tableau 3 : démarche diagnostique en allergologie

Médecin

Objectifs et méthodes

Examens complémentaires

Généraliste, pédiatre, pneumologue, dermatologue, allergologue

 

 

 

 

 

 

Terrain atopique : interrogatoire : antécédents personnels et familiaux

   - évocateurs ...........................

   - incertains ............................

 

 

Diagnostic étiologique :

interrogatoire

 

 

 

 

 

inutiles

NFS, IgE sériques totales ou Phadiatop©

 

 

IgE sériques spécifiques

de groupes d'allergènes, éventuellement

 

Allergologue seul

 

 

 

 

 

 

 

 

Diagnostic étiologique : tests cutanés :

   - concordants ..........................

   - discordants ..........................

 

 

 

 

 

 

 

 

inutiles

RAST, tests multiallergéniques à réponse quantitative par allergène ; plus rarement tests d'activation cellulaire,

     et/ou

tests de provocation

 

 

 

 

 

 

Tableau I : démarche diagnostique des bronchites dyspnéisantes récidivantes du nourrisson

Interrogatoire policier

 

Examen clinique

 

Examens complémentaires systématiques

Antécédents :

 - prématurité

 - ventilation néonatale

 - troubles du transit

 - dermatite atopique

 - accès de cyanose

 - stridor

 - toux aux liquides

 - âge et mode de début

 - chronologie des épisodes

 - état intercritique

 - tabagisme familial

 - crêche

Recherche de :

 - hypotrophie

 - dermatite atopique

 - stridor

 - distension thoracique

 - cyanose

 - hippocratisme digital

 

 

 

 

 

 

 - radio thoracique

 - TOGD

 - test de la sueur

 - taux des IgM, G, A et E

 - examen ORL

 - a1-antitrypsine

 

 

 

 

 

 

 

 

  4 situations possibles :

 

Diagnostic

fait

 

Diagnostic

évoqué

 

Pas de diagnostic, mais manifestations peu préoccupantes

Pas de diagnostic, mais manifestations préoccupantes

- RGO

- mucoviscidose

- déficit en IgA

- bronchodysplasie

- anomalies des arcs

   aortiques

- allergie

 

 

 

 

 

 

 

 

 

- corps étranger inhalé

- kyste bronchogénique

   de la carène

- fistule oeso-trachéale

- incoordination de la déglutition

- maladie des cils

- trachéomalacie

 

poursuivre les examens en milieu hospitalier (endoscopie +++)

surseoir (au moins temporairement)

à d'autres investigations

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

poursuivre les investigations (endoscopie +++)